Passe d'armes entre LFI et le RN sur les soignants non vaccinés


JULIEN DE ROSA / AFP
Paris, France | AFP | mercredi 07/12/2022 - A malin, malin et demi : la France insoumise et le Rassemblement national se renvoient la balle mercredi à l'Assemblée nationale sur leur projet partagé de réintégration des soignants non-vaccinés, chacun accusant l'autre de coups tordus au détriment des personnels concernés.

En reprenant dans sa propre niche parlementaire la proposition de loi insoumise sur la réintégration des soignants non-vaccinés contre le Covid, le RN avait tenté mardi un coup politique, semant la zizanie au sein de l'alliance Nupes, où PS et PCF notamment ont aussitôt réclamé le retrait du texte.

C'est ce qu'a finalement fait mercredi matin le groupe LFI: les Insoumis ont expliqué que "les soignants suspendus n'ont pas vocation à servir les coups de communication du RN", ajoutant qu'ils déposeraient "une nouvelle proposition de loi" sur le sujet.

Dénonçant "une basse reddition politicienne", le parti d'extrême droite a accusé LFI de faire "passer ses intérêts politiciens avant l’intérêt général", et préférer "sacrifier les soignants en retirant son texte plutôt que de le voir discuté à l’occasion de la journée parlementaire réservée au groupe RN".

Ce n'est pas la première fois que le RN met la gauche dans l'embarras: lors du vote de la première motion de censure LFI contre le gouvernement, dans le cadre du budget, le parti de Marine Le Pen s'était rallié contre toute attente à ce texte, divisant l'alliance de gauche et offrant clé en main un angle d'attaque à la macronie sur une prétendue collusion LFI/RN.

Le RN avait ensuite voté d'autres motions de censure LFI, entraînant des défections plus ou moins importantes des autres partenaires de gauche.

Mardi, le groupe RN à l'Assemblée nationale a inscrit à l'agenda de sa niche parlementaire du 12 janvier la proposition de loi controversée de leurs adversaires insoumis sur la réintégration des soignants non-vaccinés contre le Covid, dans l'accord de LFI.

Son examen aurait donc pu reprendre là où il s'était arrêté le 24 novembre, lors de la journée réservée aux insoumis.

Très favorables au retour des soignants non-vaccinés, les députés RN estiment que le texte insoumis, porté par la députée insoumise Caroline Fiat et qui n'avait pas pu être adopté faute de temps, "aurait pu faire l’objet d’un vote positif d’une majorité de députés en janvier prochain".

Le RN avait toutefois échoué mardi à obtenir que l'un des siens en soit désigné co-rapporteur.

LFI avait dans un premier temps paru se satisfaire de la situation, indiquant dans un communiqué: si les élus d'extrême droite "souhaitent nous laisser la moitié de leur niche, libre à eux".

Mais cette attitude a suscité l'incompréhension de nombreux députés LFI, dont la plupart des 17 élus insoumis de la précédente législature. 

"Ce n'était pas une bonne séquence, mais on a éteint dans l'oeuf la polémique et cela a permis de réaffirmer une ligne claire", se réjouit mercredi l'un d'entre eux. Selon lui, le RN profite juste de son avance électorale pour au maximum "brouiller le jeu". 

Crispations 

L'épisode a dans un premier temps crispé les partenaires de LFI dans la Nupes. "Pas ça!", avait tweeté mardi soir le chef des communistes Fabien Roussel, tandis que le premier secrétaire du PS Olivier Faure avait appelé mercredi matin LFI à ne pas tomber "dans ce piège à pieds joints". 

A quelques semaines du congrès du PS, où il sera confronté à deux candidats opposés à l'alliance avec LFI, Olivier Faure réclamait que les insoumis "prennent une décision qui permette de ne pas laisser l'idée qu'il puisse y avoir une confusion" entre le RN et la gauche.

La macronie s'est engouffrée dans la brèche, accusant, par la voix du patron du parti présidentiel Renaissance Stéphane Séjourné, "l'extrême gauche et la Nupes" de franchir "une nouvelle étape dans leur lune de miel avec les lepénistes".

"Il n’y a jamais eu et il n’y aura jamais d’accord de notre groupe avec l’extrême droite", a insisté mercredi le groupe des députés insoumis dans son communiqué, dénonçant des "mensonges inacceptables" à ce sujet. 

"Le groupe LFI retire son texte usurpé par le RN. La frontière est claire", a souligné sur Twitter Jean-Luc Mélenchon, accusant à l'inverse "la macronie et le RN" de voter "ensemble contre les locataires et pour l’insécurité".

"Une décision qui s'imposait", pour Fabien Roussel, "C’est la bonne décision. Le RN joue. Pas la gauche", a salué Olivier Faure. "Une bonne décision" aussi pour la députée écologiste Sandrine Rousseau.

le Mercredi 7 Décembre 2022 à 06:13 | Lu 348 fois