Pascale Haiti-Flosse élue présidente du Taho’e Tatou, le nouveau parti de Gaston Flosse


Sans surprise, Pascale Haiti-Flosse a été élue présidente de ce parti fondé de toutes pièces pour elle. Crédit photo : Thibault Segalard.
Tahiti, le 25 octobre 2024 - Comme prévu, Gaston Flosse a annoncé, ce vendredi soir, la création de son nouveau parti politique : le Taho’e Tatou. Sans surprise, son épouse Pascale Haiti-Flosse a été élue présidente de ce parti fondé de toutes pièces pour elle.
 
Les partisans du vieux lion, vêtus historiquement d’orange, vont devoir se mettre au rose. Suite à sa démission de l’Amuitahira’a en juillet, et après avoir cadenassé symboliquement les portes de sa désormais ancienne permanence politique il y a deux semaines, Gaston Flosse a réuni ses fidèles pour une grand-messe, celle d’une assemblée exécutive. L'objectif de la soirée : annoncer la naissance officielle de son tout nouveau parti politique, Taho’e Tatou. Celui-ci sera porté par un slogan à l’eau de rose — "amour, solidarité, souveraineté" — le tout avec la tortue comme emblème, un clin d’œil, diront certains, à l’impressionnante longévité de sa carrière politique. Et comme présidente, surprise-surprise : c’est son épouse, Pascale Haiti-Flosse, qui accède au poste.
 
D'ailleurs, quant à l’amour, il n’est plus vraiment au programme pour Bruno Sandras, le successeur de Flosse à la tête de l’Amuitahira’a. Le vieux lion, fidèle à son sens de la formule, n’a pas hésité à remettre une pièce dans la machine pour décocher quelques piques à son ancien poulain, recourant même à la Bible pour enfoncer le clou. Dans une allusion légèrement théâtrale, il a comparé Bruno Sandras à un "voleur", tout en s’auto-adjugeant le titre de "bon pasteur". Car oui, le vieux lion voulait "régler" ses "affaires avant de partir", en parlant surtout de ses affaires politiques, où il a ouvertement concédé que son passage de flambeau ne pourrait être que pour son épouse. "L'objectif était évidemment de mettre Pascale", a-t-il également confié ce vendredi soir. "C'était mon dernier problème ; je peux partir serein et en paix."
 

Le Taho’e Tatou sera porté par un slogan à l’eau de rose — "amour, solidarité, souveraineté" — le tout avec la tortue comme emblème.
Pascale Haiti-Flosse présidente... à l'unanimité
 
Comme prévu donc, pour prendre la tête de cette nouvelle aventure politique, Gaston Flosse et ses fidèles n'ont donc pas eu à chercher bien loin : Pascale Haiti-Flosse, sa compagne, accède ainsi au rang suprême de présidente de ce nouveau parti, bien que l’élection ait été moins une surprise qu’un passage de relais soigneusement orchestré. En effet, lorsque Flosse demande à l’assemblée : "Y a-t-il des candidats ?", seul le nom de Pascale est murmuré dans la salle. Suivi d’un vote express à la levée, voté… à l’unanimité.
 
Pascale, de son côté, longtemps pressentie pour prendre la succession de son mari, joue la carte de la sincérité, les larmes aux yeux : "Je suis prête, mais cela n’a pas été facile. On me le demande depuis des années, mais le parcours de Gaston, depuis son inéligibilité, m'a fait peur. Tous ses soutiens ont quitté le navire, et je n'avais pas envie que ça m'arrive. Mais aujourd'hui je suis fière d'avoir cette équipe" déclare-t-elle, tout en laissant entendre que son époux reste l’éminence grise derrière elle et continuera de couver de son œil aguerri les futures turpitudes du parti.
 

Flosse, toujours aussi friand de ses souvenirs glorieux, a une nouvelle fois rappelé à l’assistance ses congrès d’antan où il rassemblait, selon lui, "jusqu’à 7000 personnes". Crédit photo : Thibault Segalard.
Le grand congrès du 3 mai prochain
 
Le travail va donc devoir commencer pour le Taho’e Tatou : recruter des adhérents pour que la marmite politique prenne à feu doux. Ce vendredi soir, devant une soixantaine de fidèles réunis pour l’occasion, Gaston Flosse n’a pas manqué de rappeler la mission : Il faudra recruter de nouveaux militants d’ici le 3 mai, date prévue pour le premier congrès de Taho’e Tatou. Six mois donc, pour vérifier si la mayonnaise prend. D'ailleurs, Flosse, toujours aussi friand de ses souvenirs glorieux, a une nouvelle fois rappelé à l’assistance ses congrès d’antan où il rassemblait, selon lui, "jusqu’à 7000 personnes". Reste à voir si l'aura de son épouse, ou l’ombre de son passé politique, saura attirer les foules avec le même enthousiasme.
 
Seul changement à noter au niveau du système de gouvernance : le vieux lion a opté pour une structure en fédérations communales. Chaque commune aura donc son "président de fédération", chargé de collecter les cotisations sous la supervision directe de la présidente.
 
Un parti souverainiste, mais surtout "progressiste"
 
Dans son très long discours d’introduction, Gaston Flosse s’en est donné à cœur joie en évoquant le système d'autonomie de la Polynésie, qu’il décrit comme "arrivé à bout de route". Selon lui, le transfert de compétences de l’État aux collectivités a atteint ses limites depuis belle lurette. " On ne peut plus rester comme ça." Pour ce nouveau chapitre politique, le vieux lion a prôné un modèle inédit de "souveraineté" : "L’État peut transférer certaines compétences aux collectivités, nous avons atteint la limite depuis 2004. Il est temps de passer à autre chose." Autrement dit, pas question d’indépendance radicale à la manière du Tavini, mais une souveraineté "associée" à la France.
 

Dans son très long discours d’introduction, Gaston Flosse s’en est donné à cœur joie en évoquant le système d'autonomie de la Polynésie, qu’il décrit comme "arrivé à bout de route". Crédit photo : Thibault Segalard.
 Et le Taho’e Tatou, se définira-t-il comme un parti "souverainiste" ? "Non", rétorque Pascale Haïti-Flosse, qui préfère le terme de "progressiste" pour qualifier le nouveau mouvement. D'autant que le souverainisme permettrait à la Polynésie de "reprendre la justice sous son contrôle", a rappelé Gaston Flosse. Un constat ironique, pour l'un des hommes politiques les plus condamnés par la justice de la 5ème République.
 
D'autant qu'en parlant de condamnation, l’avenir de ce parti pourrait être rapidement rattrapé par les affaires judiciaires. Pascale Haiti-Flosse est sous le coup d’une peine de trois ans d’inéligibilité, prononcée dans l’affaire du faux bail. Confiance affichée néanmoins, à en croire ses déclarations, ce vendredi : "Nous avons rencontré notre avocat il y a deux semaines et il nous garantit que cela se passera bien et que nous n'avons rien à craindre à ce niveau-là", affirme-t-elle.
 

Rédigé par Thibault Segalard le Vendredi 25 Octobre 2024 à 22:40 | Lu 2496 fois