Tahiti, le 14 février 2024 - Mercredi 14 février, se tenait un séminaire sur l'usage et l'apprentissage de la langue tahitienne dans les écoles. Au lycée hôtelier de Punaauia, une trentaine de membres du corps enseignant se sont attelés à répondre à cette question : comment encourager les jeunes à parler le reo mā’ohi ?
“Je ressens à la fois de la fierté d'enseigner notre langue, mais il faut remettre en question notre manière d'enseigner”. “Il faut faire comprendre l'enjeu aux élèves, leur donner de l'ambition”. “Comment voulez-vous que j'enseigne le tahitien si je ne le parle pas chez moi ?”. Ces réflexions, entendues à la volée lors d'un atelier du séminaire entre professeurs du premier et second degrés, témoignent de la situation : les jeunes Tahitiens parlent de moins en moins le reo mā’ohi.
Or, pour ces professeurs venus suivre ce séminaire de manière bénévole, il est primordial que la jeunesse réintègre cette langue vernaculaire dans leur vocabulaire, et en fasse usage pour s'exprimer, pas juste pour se saluer. C'est là tout le défi de ce genre de séminaire, organisé par le ministère de l'Éducation.
“L'objectif final c'est d'améliorer l'enseignement des langues et de la culture polynésienne, mais on ne peut le faire que si on co-construit ensemble”, témoigne Samanta Bonnet-Tira, coordinatrice du séminaire. Cela passe donc par des temps d'échange, sous forme d'ateliers ludiques pour que les enseignants “partagent leurs difficultés, leurs réussites pour construire ensemble des actions concrètes”.
Des actions concrètes
Des actions dans le genre, il en existe déjà. C'est le cas d'une vingtaine d'écoles à Tahiti, qui ont mis en place un système de parité horaire. L'école d'Erima, à Arue, a mis en place ce système à la dernière rentrée des classes. Sa directrice, Sandra Poheroa, l'explique : “Ce genre de dispositifs est mis en place pour que les enfants puissent réussir à parler le reo mā’ohi 50 % du temps, et le français l'autre moitié du temps, dans tous les domaines confondus.” Elle précise d'ailleurs que ses élèves sont demandeurs de l'apprentissage du tahitien.
Alors quand des initiatives comme ce séminaire voient le jour, la directrice n'hésite pas. “Je suis toujours intéressée par ce genre d'initiatives, car je vais pouvoir récupérer des informations, des échanges que je vais ensuite partager à mon équipe pédagogique. Plus on est formés, mieux on se débrouille pour pouvoir transmettre le savoir. En l'occurrence ici, le reo mā’ohi.”
Le tahitien dans les cœurs, mais pas dans les bouches
La richesse des langues polynésiennes est tout bonnement impressionnante. Un bulletin de l'observatoire des pratiques linguistiques de septembre 2017 en a recensé 37 dans le Pacifique, issus d'un ancêtre commun : le proto-austronésien, terme inventé par le linguiste allemand Wilhelm Schmidt en 1899. Ce terme signifie littéralement “ancienne langue des îles du Sud”.
Cette langue mère s'est ensuite répandue d'île en île et a semé ses bourgeons, qui sont désormais des langues à part entière, avec leur similitude et leur particularité. Bref, un véritable vivier linguistique. Mais depuis les années 80, et même si les Tahitiens la chérissent, ce bulletin fait état d'un délaissement du reo mā’ohi dans le langage courant, surtout chez les jeunes.
Marie Salaün, Mirose Paia et Jacques Vernaudon, dans un article intitulé “Paroles d'enfants sur une langue en sursis” de ce même bulletin, s'étaient entretenus avec plusieurs enfants du Fenua sur leur usage du tahitien. La conclusion de l'article est la suivante : “La langue d'origine est [désormais] moins perçue dans sa fonction d'outil de communication que comme une composante primordiale de l'héritage et comme marqueur d'identité”. En bref, les enfants sont attachés à cette langue qui témoigne de leur attachement à la Polynésie, mais ne la privilégie pas dans le langage courant.
Pourtant, la directrice d'école, Sandra Poheroa, témoigne de l'importance d'apprendre la langue dès le plus jeune âge. “Les enfants sont comme des éponges, plus ils vivent dans ce genre de dispositifs, au contact de la langue, plus ils ont de chances d'acquérir des structures langagières qu'ils pourront utiliser.”
“Je ressens à la fois de la fierté d'enseigner notre langue, mais il faut remettre en question notre manière d'enseigner”. “Il faut faire comprendre l'enjeu aux élèves, leur donner de l'ambition”. “Comment voulez-vous que j'enseigne le tahitien si je ne le parle pas chez moi ?”. Ces réflexions, entendues à la volée lors d'un atelier du séminaire entre professeurs du premier et second degrés, témoignent de la situation : les jeunes Tahitiens parlent de moins en moins le reo mā’ohi.
Or, pour ces professeurs venus suivre ce séminaire de manière bénévole, il est primordial que la jeunesse réintègre cette langue vernaculaire dans leur vocabulaire, et en fasse usage pour s'exprimer, pas juste pour se saluer. C'est là tout le défi de ce genre de séminaire, organisé par le ministère de l'Éducation.
“L'objectif final c'est d'améliorer l'enseignement des langues et de la culture polynésienne, mais on ne peut le faire que si on co-construit ensemble”, témoigne Samanta Bonnet-Tira, coordinatrice du séminaire. Cela passe donc par des temps d'échange, sous forme d'ateliers ludiques pour que les enseignants “partagent leurs difficultés, leurs réussites pour construire ensemble des actions concrètes”.
Des actions concrètes
Des actions dans le genre, il en existe déjà. C'est le cas d'une vingtaine d'écoles à Tahiti, qui ont mis en place un système de parité horaire. L'école d'Erima, à Arue, a mis en place ce système à la dernière rentrée des classes. Sa directrice, Sandra Poheroa, l'explique : “Ce genre de dispositifs est mis en place pour que les enfants puissent réussir à parler le reo mā’ohi 50 % du temps, et le français l'autre moitié du temps, dans tous les domaines confondus.” Elle précise d'ailleurs que ses élèves sont demandeurs de l'apprentissage du tahitien.
Alors quand des initiatives comme ce séminaire voient le jour, la directrice n'hésite pas. “Je suis toujours intéressée par ce genre d'initiatives, car je vais pouvoir récupérer des informations, des échanges que je vais ensuite partager à mon équipe pédagogique. Plus on est formés, mieux on se débrouille pour pouvoir transmettre le savoir. En l'occurrence ici, le reo mā’ohi.”
Le tahitien dans les cœurs, mais pas dans les bouches
La richesse des langues polynésiennes est tout bonnement impressionnante. Un bulletin de l'observatoire des pratiques linguistiques de septembre 2017 en a recensé 37 dans le Pacifique, issus d'un ancêtre commun : le proto-austronésien, terme inventé par le linguiste allemand Wilhelm Schmidt en 1899. Ce terme signifie littéralement “ancienne langue des îles du Sud”.
Cette langue mère s'est ensuite répandue d'île en île et a semé ses bourgeons, qui sont désormais des langues à part entière, avec leur similitude et leur particularité. Bref, un véritable vivier linguistique. Mais depuis les années 80, et même si les Tahitiens la chérissent, ce bulletin fait état d'un délaissement du reo mā’ohi dans le langage courant, surtout chez les jeunes.
Marie Salaün, Mirose Paia et Jacques Vernaudon, dans un article intitulé “Paroles d'enfants sur une langue en sursis” de ce même bulletin, s'étaient entretenus avec plusieurs enfants du Fenua sur leur usage du tahitien. La conclusion de l'article est la suivante : “La langue d'origine est [désormais] moins perçue dans sa fonction d'outil de communication que comme une composante primordiale de l'héritage et comme marqueur d'identité”. En bref, les enfants sont attachés à cette langue qui témoigne de leur attachement à la Polynésie, mais ne la privilégie pas dans le langage courant.
Pourtant, la directrice d'école, Sandra Poheroa, témoigne de l'importance d'apprendre la langue dès le plus jeune âge. “Les enfants sont comme des éponges, plus ils vivent dans ce genre de dispositifs, au contact de la langue, plus ils ont de chances d'acquérir des structures langagières qu'ils pourront utiliser.”
Parau noa atu ā tātou nō te reo, mātutu noa ā i te aura’a o te mau ta’o, patu noa atu ā i te tahi Fare Vāna’a, mai te peu rā e’ita te reo tahiti e orahia i te ’utuāfare, ho’ona ’ore te mau ha'ara'a.
On peut parler de notre langue, discuter du sens des mots, on peut même créer une Académie, mais si l'on ne parle pas le tahitien à la maison, cela ne sert pas à grand-chose.
John Doom, dans un bulletin de l’observatoire des pratiques linguistique
On peut parler de notre langue, discuter du sens des mots, on peut même créer une Académie, mais si l'on ne parle pas le tahitien à la maison, cela ne sert pas à grand-chose.
John Doom, dans un bulletin de l’observatoire des pratiques linguistique