Par amour du vin et de la vanille


Fareata Lehartel et Honoarii Nhun Fat étaient encore étudiants à Bordeaux lorsqu’ils ont imaginé ce projet audacieux de vin à la vanille (Crédit photos : ACL/Tahiti Infos & Localizedesign/Vinosus).
Tahiti, le 20 novembre 2024 – Du vin à la vanille : il fallait oser, Fareata Lehartel et Honoarii Nhun Fat l’ont fait ! Au terme de trois ans de travail avec une famille de vignerons d’Aquitaine et un oncle producteur de vanille à Moorea, le jeune couple inaugure deux cuvées en hommage aux terroirs bordelais et polynésien : Te Ata et Te Hono.

 
Originaires de Afaahiti et Papeete, Fareata Lehartel, 27 ans, et Honoarii Nhun Fat, 28 ans, se sont rencontrés au lycée. Leurs études supérieures en droit et management les ont conduits à Montréal, puis à Bordeaux, où leur passion pour le vin a mûri au fil des rencontres. “Je tiens à préciser qu’on est bien partis à Bordeaux pour les études !”, s’amuse le jeune homme. “On a profité de notre temps libre pour visiter la région, dont les vignobles, et découvrir la gastronomie. Le Covid est arrivé, et après une remise en question, c’est là qu’est venue l’idée de monter une entreprise autour du vin et de la vanille, avec l’envie de rentrer au Fenua.”
 

Une idée partagée


Depuis 2021, sous l’enseigne Vinosus, ils importent différents vins, “des pépites” qu’ils sélectionnent eux-mêmes sur le terrain. Ils collaborent aujourd’hui avec plus d’une trentaine de producteurs à travers la France et l’Europe. L’or noir a toujours fait partie intégrante du projet grâce à Francis Tchin Noa, l’oncle de Honoarii Nhun Fat, cultivateur et préparateur de vanille à Moorea, qui souhaitait se tourner vers une commercialisation à l’international. “La vanille, c’est un produit de qualité qui fait référence à notre terroir et à notre culture, donc ça faisait sens d’allier l’importation de vin à l’exportation de vanille”, souligne Fareata Lehartel.
 
Dès le début de leur aventure entrepreneuriale, les deux amoureux ont rêvé de mettre la vanille en bouteille. Une démarche courante pour le rhum, mais plutôt inédite pour le vin. Cette idée “un peu folle” s’est concrétisée avec le soutien de Véronique et Jean-François Julien, ainsi que leur fille, Mathilde, vignerons en Aquitaine, comme nous l’a raconté Fareata Lehartel : “On a rencontré les propriétaires du Château La Fleur Morange, qui est un Saint-Émilion Grand Cru Classé. C’est un petit domaine familial tenu par les parents et leur fille, qui a le même âge que nous. On adore leurs vins, et quand on leur a fait la promotion de notre vanille autour d’un repas, le vigneron a lancé l’idée de faire un vin blanc à la vanille. Le fait que l’idée vienne aussi de lui, vu que le vin est un produit d’exception qu’on ne voulait pas dénaturer, ça nous a confortés dans notre projet. En sachant que certains vins ont naturellement des arômes de vanille, c’était cohérent !”
 

Le rire et le lien


Pendant près de trois ans, l’équipe franco-tahitienne a effectué des tests réguliers pour doser l’intensité des arômes. “On est presque parti de zéro. On a dû trouver les cépages, le dosage de la vanille, l’élevage et la vinification, avec le savoir-faire du domaine et une très bonne entente entre nous”, se remémore Honoarii Nhun Fat. Une collaboration qui a donné naissance à deux vins blancs secs, vinifiés et mis en bouteille à Bordeaux : Te Ata, pour “le rire”, ou encore “le nuage”, aux arômes de vanille “subtils et gourmands” obtenus par infusion de gousses entières ; et Te Hono, pour “le lien”, avec une gousse fendue libérant ses grains, qui lui confère un parfum de vanille “puissant et masculin”.
 
Ces deux vins aux saveurs surprenantes se dégustent bien frais – et avec modération –, le premier plutôt en apéritif ou pour accompagner des fruits de mer et du poisson, tandis que le second se marie bien avec de la volaille. “Les gens sont intrigués, que ce soit pour goûter ou pour offrir”, confirme le couple d’entrepreneurs. “On a même reçu des touristes français qui ont voulu repartir avec leur bouteille ! Pour le moment, on n’a que des retours positifs. Si on s’est lancé dans la commercialisation, c’est qu’on estime, avec le vigneron, qu’on a réussi à faire quelque chose de bien.”
 
Un travail dans le souci du détail, jusqu’à l’étiquette qui illustre le cheminement du projet, et la connexion entre le vignoble et la vanilleraie. “On a repris la corne d’abondance du logo du domaine dans une version polynésienne, réalisée par un ami graphiste sous forme de tatouage intégrant les symboles de la famille, du lien, de la force et du courage, avec la fleur de vanille et le raisin”, expliquent Fareata Lehartel et Honoarii Nhun Fat, qui prêtent aussi une partie de leurs prénoms à leurs cuvées ; un choix avec son lot d’évidences et d’hésitations, mais qui a fini par s’imposer naturellement tant ce projet leur tenait à cœur.
 

“À notre connaissance, c’est une première”


En innovant pour se démarquer, ces deux jeunes Polynésiens ont aussi voulu faire honneur à leur terroir : “De la véritable vanille fraîche de Tahiti dans un vin, à notre connaissance, c’est une première ! On voulait valoriser ce produit local emblématique à notre façon. Qui sait : pourquoi ne pas viser l’export, plus tard ?” Dans l’immédiat, les deux bouteilles sont commercialisées aux tarifs de 3 990 et 6 850 francs, directement auprès de Vinosus, et prochainement dans plusieurs enseignes de grande distribution. Des hôtels et restaurants auraient également manifesté leur intérêt pour cette nouveauté, qui tombe à pic pour les fêtes de fin d’année.  
 

Rédigé par Anne-Charlotte Lehartel le Mercredi 20 Novembre 2024 à 16:49 | Lu 10238 fois