PHOTO : John Momis
Depuis, les résultats avaient été constamment retardés, en raison de « problèmes techniques » sur cette île dont le processus d’émancipation est souvent comparé à celui actuellement en cours en Nouvelle-Calédonie.
Selon les résultats rendus publics, M. Momis (qui devrait prêter serment en début de semaine prochaine) aurait recueilli plus de quarante mille suffrages, contre un peu plus de dix sept mille pour le Président sortant, James Tanis.
Selon les résultats officiels, les chiffres exacts sont de 43.047 voix pour M. Momis, soit 52,35 pour cent des suffrages exprimés sur cette île de quelque deux cent mille habitants.
James Tanis qui, au cours de sa campagne électorale, se prévalait ouvertement du soutien d’un groupe de rebelles qui interdisaient jusqu’à récemment l’accès à toute la partie Sud-est de l’île, en a recueilli 17.205.
Cette élection, deux semaines durant, n’a pas seulement concerné le poste de Président de Bougainville, mais aussi les membres de l’Assemblée autonome de l’île, dans les trente trois circonscriptions concernées, plus sept réservés aux anciens combattants.
Cette Assemblée entre désormais dans sa seconde mandature depuis l’avènement du statut d’autonomie de Bougainville.
Le Forum des Îles du Pacifique avait envoyé sur place une équipe d’observateurs et un important dispositif policier avait aussi été déployé aux abords des bureaux de vote.
Sept candidats, dont beaucoup d’anciens rebelles sécessionnistes, briguaient cette Présidence : outre James Tanis (Président sortant) et John Momis, il s’agissait de Reuben Siara, Martin Miriori, Robert Atsir, Sylvester Niu et d’une femme, Mme Magdalene Itona Toroansi.
Le Président sortant, James Tanis, lui-même originaire de la région de Panguna, avait été élu en cours de législature, début 2009, à la suite de la mort subite de son prédécesseur, Joseph Kabui, en juin 2008.
Les premières élections, sous le statut d’autonomie, avaient eu lieu en 2005.
Poursuivre le désarmement et relancer l’activité économique
Dès après son élection, M. Momis a affiché comme priorités absolue de son mandat la poursuite d’un long programme de désarmement des milices rebelles qui contrôlent encore peu ou prou les alentours du site de l’énorme mine de cuivre de Panguna, dont l’exploitation n’a jamais repris depuis le début d’une guerre de sécession, en mai 1989.
L’autre axe annoncé de son action concerne un programme de reconstruction économique censé mettre fin à la dépendance vis-à-vis de la Papouasie-Nouvelle-Guinée et qui devrait logiquement impliquer une réouverture de la mine de cuivre, pour laquelle plusieurs géants multinationaux (dont l’opérateur historique, l’Australienne Bougainville Copper Limited) sont candidats, sur fonds de hausse constante des cours mondiaux du cuivre.
Outre son passé dans la diplomatie, M. Momis, par ailleurs prêtre catholique de formation, a aussi contribué à la rédaction de la nouvelle Constitution de Bougainville, dans le cadre du processus de paix enclenché après le cessez-le-feu intervenu en 2001.
Le processus de stabilisation
Les accords de paix, signés en 2001 avec le gouvernement central de Papouasie-Nouvelle-Guinée, sous les auspices de la Nouvelle-Zélande et des Nations-Unies, mettaient fin à un conflit armé sécessionniste de dix ans, avec au centre des revendications les bénéfices de la mine de cuivre de Panguna, considérée comme l’une des plus grandes à ciel ouvert au monde.
Depuis, l’armée révolutionnaire de Bougainville a été largement démantelée, mais des groupes de résistance dont certains se réclament d’un leader charismatique dénommé Noah Musingku autoproclamé « Roi de Mekamui » (nom autochtone de Bougainville) contrôlent toujours une zone au centre-sud de l’île, tout près de la mine.
Cette zone est toujours considérée comme une zone d’exclusion (« no go zone »).
Aux termes de l’accord de 2001, Bougainville s’est vue doter de pouvoirs élargis et de compétences notamment en matière de police, avec un transfert prévu progressivement et un référendum d’autodétermination prévu, lui, pour intervenir entre « dix et quinze ans » après la date de signature des accords.
Ce processus est parfois comparé à celui en vigueur en Nouvelle-Calédonie dans le cadre des accords de Matignon (1988), puis de Nouméa (1998).
Ces cinq dernières années, dans la zone d’exclusion, les incidents et accrochages se sont multipliés.
Depuis 2005 aussi, un homme d'affaire au passé trouble, Noah Musingku, établi non loin de l'énorme gisement de cuivre de Panguna, avait tenté de recruter d'anciens soldats fidjiens pour « former » une milice locale.
Certains de ces anciens soldats, malgré les exhortations des gouvernements papou, fidjien et de Bougainville, ont longtemps refusé de quitter l'île.
Une « Armée Révolutionnaire de Bougainville », dont le chef, Francis Ona, est décédé en 2005, quelques jours avant la déclaration de l'autonomie de l'île, était présumée dissoute.
Toutefois, toute la zone entourant l'ancienne mine de cuivre, et la localité de Tonu, au Sud de l'île, est toujours considérée comme une "no go zone" (zone d'exclusion) par Port-Moresby.
Depuis la proclamation de l'autonomie, un petit "groupe de surveillance" (une quinzaine de soldats australiens et néo-zélandais) placé sous l'égide de l'ONU s'est retiré de l'île fin décembre 2005.
Quelques jours après l'entrée en vigueur du statut d'autonomie, en juin 2005, l'ancien chef rebelle Francis Ona, qui s'était toujours déclaré hostile au processus de paix, mourait subitement.
Énormes enjeux miniers : un scénario d’Avatar grandeur nature ?
Joseph Kabui, premier Président de l’histoire de cette île riche en cuivre, est subitement décédé le 8 juin dernier d'une attaque cardiaque à l'âge de 54 ans.
M. Kabui, ancien dirigeant d'un mouvement sécessionniste armé qui avait entraîné une guerre sécessionniste entre 1988 et 1997, était devenu le premier Président de l'histoire autonome de cette province papoue, qui dispose désormais, dans le cadre de ce nouveau statut, de son propre Parlement, de son gouvernement et de sa police.
Toutefois, l'épineux dossier des transferts de compétences en matière minière ne semble toujours pas résolu, sur fonds de flambée des cours mondiaux de cuivre.
Accord minier et vives tensions autour du cuivre de Panguna
La revendication des revenus de l’exploitation de la mine de Panguna (taris depuis mai 1989, en raison du conflit sécessionniste) était aussi, il y a vingt ans, au centre des troubles qui s'en sont suivis.
Depuis 2005, le gouvernement papou et le gouvernement autonome de Bougainville ont multiplié les annonces et contre-annonces de reprise de l'exploitation du site, chacun avec des partenaires industriels différents.
Début juin 2008, quelques jours seulement avant son décès, M. Kabui avait annoncé son soutien et son accord pour la reprise de l'exploitation par une société canadienne, Invincible Resources, dans le cadre de la formation d'un consortium (nommé Bougainville Resources Development Corporation, BRDC) dont la canadienne aurait détenu 70 pour cent des parts, le reste étant détenu localement.
Cette annonce avait très rapidement suscité une vive polémique.
Le gouvernement central papou, pour sa part, a mené, ces dernières années, des pourparlers avec plusieurs sociétés minières multinationales, dans un contexte mondial de flambée de cours du cuivre.
En mai 2008, l'exploitant historique du cuivre de Panguna, Bougainville Copper Limited (BCL, filiale du géant anglo-australien Rio Tinto, qui en détient 53,5 pour cent, 19 autres pour cent étant détenus par le gouvernement central de Papouasie-Nouvelle-Guinée), se déclarait confiante concernant une reprise de l’exploitation du site de Bougainville, avec le soutien des coutumiers locaux.
La première étape, annonçait alors la société, était de mener une étude de faisabilité concernant les frais nécessaires à la remise en condition du site et de ses installations.
Mercenaires et chef mystique se côtoient dans la jungle
La situation est compliquée par la présence, dans la partie Sud de l'île, de rebelles armés qui font toujours de cette région une "no-go zone", malgré les tentatives multiples d'infiltration de la police locale.
Ce mouvement armé baptisé « Mekamui » (nom coutumier de Bougainville) est dirigé par un individu, Noah Musingku, qui s’est autoproclamé « roi de Mekamui » et dirige ce qui pourrait être qualifié de mouvement culte tout en assurant de fait le contrôle de la mine.
M. Musingku, ces dernières années et notamment depuis la mort du chef charismatique Francis Ona, a tenté de recruter plusieurs anciens soldats fidjiens qu'il comptait charger de former sa petite armée.
La plupart de ces Fidjiens ont depuis été arrêtés et renvoyés dans leur pays d'origine.
Selon les résultats rendus publics, M. Momis (qui devrait prêter serment en début de semaine prochaine) aurait recueilli plus de quarante mille suffrages, contre un peu plus de dix sept mille pour le Président sortant, James Tanis.
Selon les résultats officiels, les chiffres exacts sont de 43.047 voix pour M. Momis, soit 52,35 pour cent des suffrages exprimés sur cette île de quelque deux cent mille habitants.
James Tanis qui, au cours de sa campagne électorale, se prévalait ouvertement du soutien d’un groupe de rebelles qui interdisaient jusqu’à récemment l’accès à toute la partie Sud-est de l’île, en a recueilli 17.205.
Cette élection, deux semaines durant, n’a pas seulement concerné le poste de Président de Bougainville, mais aussi les membres de l’Assemblée autonome de l’île, dans les trente trois circonscriptions concernées, plus sept réservés aux anciens combattants.
Cette Assemblée entre désormais dans sa seconde mandature depuis l’avènement du statut d’autonomie de Bougainville.
Le Forum des Îles du Pacifique avait envoyé sur place une équipe d’observateurs et un important dispositif policier avait aussi été déployé aux abords des bureaux de vote.
Sept candidats, dont beaucoup d’anciens rebelles sécessionnistes, briguaient cette Présidence : outre James Tanis (Président sortant) et John Momis, il s’agissait de Reuben Siara, Martin Miriori, Robert Atsir, Sylvester Niu et d’une femme, Mme Magdalene Itona Toroansi.
Le Président sortant, James Tanis, lui-même originaire de la région de Panguna, avait été élu en cours de législature, début 2009, à la suite de la mort subite de son prédécesseur, Joseph Kabui, en juin 2008.
Les premières élections, sous le statut d’autonomie, avaient eu lieu en 2005.
Poursuivre le désarmement et relancer l’activité économique
Dès après son élection, M. Momis a affiché comme priorités absolue de son mandat la poursuite d’un long programme de désarmement des milices rebelles qui contrôlent encore peu ou prou les alentours du site de l’énorme mine de cuivre de Panguna, dont l’exploitation n’a jamais repris depuis le début d’une guerre de sécession, en mai 1989.
L’autre axe annoncé de son action concerne un programme de reconstruction économique censé mettre fin à la dépendance vis-à-vis de la Papouasie-Nouvelle-Guinée et qui devrait logiquement impliquer une réouverture de la mine de cuivre, pour laquelle plusieurs géants multinationaux (dont l’opérateur historique, l’Australienne Bougainville Copper Limited) sont candidats, sur fonds de hausse constante des cours mondiaux du cuivre.
Outre son passé dans la diplomatie, M. Momis, par ailleurs prêtre catholique de formation, a aussi contribué à la rédaction de la nouvelle Constitution de Bougainville, dans le cadre du processus de paix enclenché après le cessez-le-feu intervenu en 2001.
Le processus de stabilisation
Les accords de paix, signés en 2001 avec le gouvernement central de Papouasie-Nouvelle-Guinée, sous les auspices de la Nouvelle-Zélande et des Nations-Unies, mettaient fin à un conflit armé sécessionniste de dix ans, avec au centre des revendications les bénéfices de la mine de cuivre de Panguna, considérée comme l’une des plus grandes à ciel ouvert au monde.
Depuis, l’armée révolutionnaire de Bougainville a été largement démantelée, mais des groupes de résistance dont certains se réclament d’un leader charismatique dénommé Noah Musingku autoproclamé « Roi de Mekamui » (nom autochtone de Bougainville) contrôlent toujours une zone au centre-sud de l’île, tout près de la mine.
Cette zone est toujours considérée comme une zone d’exclusion (« no go zone »).
Aux termes de l’accord de 2001, Bougainville s’est vue doter de pouvoirs élargis et de compétences notamment en matière de police, avec un transfert prévu progressivement et un référendum d’autodétermination prévu, lui, pour intervenir entre « dix et quinze ans » après la date de signature des accords.
Ce processus est parfois comparé à celui en vigueur en Nouvelle-Calédonie dans le cadre des accords de Matignon (1988), puis de Nouméa (1998).
Ces cinq dernières années, dans la zone d’exclusion, les incidents et accrochages se sont multipliés.
Depuis 2005 aussi, un homme d'affaire au passé trouble, Noah Musingku, établi non loin de l'énorme gisement de cuivre de Panguna, avait tenté de recruter d'anciens soldats fidjiens pour « former » une milice locale.
Certains de ces anciens soldats, malgré les exhortations des gouvernements papou, fidjien et de Bougainville, ont longtemps refusé de quitter l'île.
Une « Armée Révolutionnaire de Bougainville », dont le chef, Francis Ona, est décédé en 2005, quelques jours avant la déclaration de l'autonomie de l'île, était présumée dissoute.
Toutefois, toute la zone entourant l'ancienne mine de cuivre, et la localité de Tonu, au Sud de l'île, est toujours considérée comme une "no go zone" (zone d'exclusion) par Port-Moresby.
Depuis la proclamation de l'autonomie, un petit "groupe de surveillance" (une quinzaine de soldats australiens et néo-zélandais) placé sous l'égide de l'ONU s'est retiré de l'île fin décembre 2005.
Quelques jours après l'entrée en vigueur du statut d'autonomie, en juin 2005, l'ancien chef rebelle Francis Ona, qui s'était toujours déclaré hostile au processus de paix, mourait subitement.
Énormes enjeux miniers : un scénario d’Avatar grandeur nature ?
Joseph Kabui, premier Président de l’histoire de cette île riche en cuivre, est subitement décédé le 8 juin dernier d'une attaque cardiaque à l'âge de 54 ans.
M. Kabui, ancien dirigeant d'un mouvement sécessionniste armé qui avait entraîné une guerre sécessionniste entre 1988 et 1997, était devenu le premier Président de l'histoire autonome de cette province papoue, qui dispose désormais, dans le cadre de ce nouveau statut, de son propre Parlement, de son gouvernement et de sa police.
Toutefois, l'épineux dossier des transferts de compétences en matière minière ne semble toujours pas résolu, sur fonds de flambée des cours mondiaux de cuivre.
Accord minier et vives tensions autour du cuivre de Panguna
La revendication des revenus de l’exploitation de la mine de Panguna (taris depuis mai 1989, en raison du conflit sécessionniste) était aussi, il y a vingt ans, au centre des troubles qui s'en sont suivis.
Depuis 2005, le gouvernement papou et le gouvernement autonome de Bougainville ont multiplié les annonces et contre-annonces de reprise de l'exploitation du site, chacun avec des partenaires industriels différents.
Début juin 2008, quelques jours seulement avant son décès, M. Kabui avait annoncé son soutien et son accord pour la reprise de l'exploitation par une société canadienne, Invincible Resources, dans le cadre de la formation d'un consortium (nommé Bougainville Resources Development Corporation, BRDC) dont la canadienne aurait détenu 70 pour cent des parts, le reste étant détenu localement.
Cette annonce avait très rapidement suscité une vive polémique.
Le gouvernement central papou, pour sa part, a mené, ces dernières années, des pourparlers avec plusieurs sociétés minières multinationales, dans un contexte mondial de flambée de cours du cuivre.
En mai 2008, l'exploitant historique du cuivre de Panguna, Bougainville Copper Limited (BCL, filiale du géant anglo-australien Rio Tinto, qui en détient 53,5 pour cent, 19 autres pour cent étant détenus par le gouvernement central de Papouasie-Nouvelle-Guinée), se déclarait confiante concernant une reprise de l’exploitation du site de Bougainville, avec le soutien des coutumiers locaux.
La première étape, annonçait alors la société, était de mener une étude de faisabilité concernant les frais nécessaires à la remise en condition du site et de ses installations.
Mercenaires et chef mystique se côtoient dans la jungle
La situation est compliquée par la présence, dans la partie Sud de l'île, de rebelles armés qui font toujours de cette région une "no-go zone", malgré les tentatives multiples d'infiltration de la police locale.
Ce mouvement armé baptisé « Mekamui » (nom coutumier de Bougainville) est dirigé par un individu, Noah Musingku, qui s’est autoproclamé « roi de Mekamui » et dirige ce qui pourrait être qualifié de mouvement culte tout en assurant de fait le contrôle de la mine.
M. Musingku, ces dernières années et notamment depuis la mort du chef charismatique Francis Ona, a tenté de recruter plusieurs anciens soldats fidjiens qu'il comptait charger de former sa petite armée.
La plupart de ces Fidjiens ont depuis été arrêtés et renvoyés dans leur pays d'origine.