Oscar Temaru réclame une "visiting mission" de l'ONU


Tahiti, le 11 octobre 2022 – Ce mardi, au siège du parti indépendantiste à Faa’a, le président du Tavini huiraatira, Oscar Temaru, a fait le bilan de sa visite à l’Onu et a réitéré sa demande d’une "visiting mission" de l'ONU au fenua. Le député, Moetai Brotherson, ainsi que le maire de Paea, Antony Géros, se sont également manifestés au sujet de la rencontre avec l’ambassadeur de France à l'ONU, Nicolas de Rivière.

Oscar Temaru, président du Tavini : "Rappeler la France à ses responsabilités"

"Pour rappeler le contexte, nous ne sommes pas les auteurs de la Charte des Nations Unies. Ce n’est pas le Tavini huiraatira qui est à l’origine de la Résolution 1514, c’est la France et toutes les autres puissances colonisatrices qui avaient décidé de la mettre en place en 1960. De nombreux pays ne pouvaient pas, mais voulaient accéder à l’indépendance. En 1963, la France a décidé de ne plus nous donner d’informations du tout. Alors que trois ans plus tard elle réalise des essais nucléaires en Polynésie, sans rendre de comptes à qui que ce soit. Alors, ce que demande la résolution de 2013, ce sont des informations sur les essais nucléaires ou, sur le plan économique et social de notre pays. On ne peut parler d’histoire commune parce que cela nous a été imposé, et c’est ça la colonisation. (…) Nous nous sommes donc rendus à New York pour rappeler encore une fois à la France ses responsabilités vis-à-vis de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française. Depuis 2013, nous sommes demandeur d’une 'Visiting mission' de la part de l'ONU, mais nous n’avons pas eu de réponses. Nous regrettons cette politique de la chaise vide que pratique l’Etat français. Aussi bien les autonomistes que les indépendantistes demandent à ce que cette mission soit réalisée. Mais je pense que c’est trop risqué pour la France d’accepter."
 

Moetai Brotherson, député : "Nous offrons un 'win-win' à la France"

"Un courrier est actuellement en cours de rédaction, à l’attention de la ministre des Affaires Étrangères. Nous ne manquerons pas de rappeler l’incohérence et l’ineptie de la position de l’Etat français aux Nations Unies, lors de la prochaine réunion de la commission des affaires étrangères sachant que deux de nos députés en sont membres. Il s’agit de les mettre devant un état de fait, qui est dommageable pour l’image de la France. Le principe n’est pas de donner une image déplorable de la France à l'ONU. Bien au contraire, j’aimerai que la France montre l’exemple d’une décolonisation réussie. C’est une opportunité que nous leur offrons, un ‘win-win’. (…) L’objet de cette rencontre (avec l’ambassadeur de France à l'ONU, Nicolas de Rivière, NDLR) était de rectifier les choses. Dans le discours qu’il nous a tenu, on se rend finalement compte qu’il a une vision déformée en ce qui concerne le ressenti des Nations Unies vis-à-vis de la France sur le sujet de la Polynésie et de la Nouvelle-Calédonie. L’exposé qu’il nous a fait est celui d’une France appréciée de tous, louée pour sa capacité à coopérer et transparente sur tous les dossiers de décolonisation. Or nous n’avons pas le même constat, nous avons droit à des discours différents sur la Nouvelle-Calédonie et sur la Polynésie française. (…) La France ne peut pas venir à l’Onu donner des leçons de démocratie à la terre entière, et ne pas elle-même respecter les principes de bases des Nations Unies. Cette politique de la chaise vide est une insulte diplomatique envers tous ces pays des Nations Unies."
 

Anthony Geros, vice-président du Tavini : "Ouvrir le dialogue de la décolonisation"

"Qui nous a inscrits sur la liste des pays à décoloniser sans nous prévenir ? C’est la France, parce qu’elle a reconnu en 1946 que l’on ne l’était pas. Du coup, nous sommes étonnées de voir qu’au moment où nous nous sommes manifestés pour notre réinscription, nous étions déjà inscrits. Dès lors que nous sommes inscrits, la puissance administrante a deux devoirs. Le premier, ouvrir le dialogue de la décolonisation pour permettre au pays de l’accompagner jusqu’à ce qu’elle ait la capacité de s’administrer librement un jour. Le deuxième est relié à l’article 73 de la Charte des Nations Unies, et consiste à rendre compte tous les ans des avancées du dialogue de la décolonisation dans tous les domaines : éducation, économie, politique, institutions… Depuis 1946, rien n’a été fait et même depuis notre réinscription en 2013. Quelque part nous pouvons comprendre la réticence de la France en ce qui concerne la démarche d’une 'Visiting mission' en Polynésie. Ils risqueraient de découvrir que le Pays n’est effectivement pas tout à fait autonome, au sens de la définition onusienne."
 

Rédigé par Meleana CHE FAT le Mardi 11 Octobre 2022 à 19:53 | Lu 1530 fois