Après l'inscription du marae Taputapuātea au patrimoine mondial de l'UNESCO en juillet 2017, et la proposition d'inscription validée pour neuf sites des Marquises en avril 2018 (voir encadré), Heremoana Maamaatuaiahutapu, ministre de la Culture, accompagné d'une délégation polynésienne a défendu en novembre dernier la candidature du 'ori tahiti au patrimoine culturel immatériel de l'Unesco.
Le dossier, présenté au comité du patrimoine culturel ethnologique immatériel, était composé d'un film de dix minutes, de dix photographies et d'éléments attestant du soutien de la communauté à cet art traditionnel de nos îles. "Nous avions présenté avec notre ministre de la Culture un dossier bien ficelé et costaud qui nous a valu les félicitations de la commission. Sur la multitude des dossiers présentés, nous avons été retenus parmi les quatre dossiers finalistes", a souligné Fabien Dinard, directeur du Conservatoire artistique de la Polynésie française (CAPF), également membre de cette délégation.
Cependant en dépit de ces efforts et du travail fourni, le président de la République, qui décide in fine quel dossier la France présentera à l'Unesco, a indiqué le 1er février par voie de communiqué qu'il apportera son soutien à la candidature de la yole martiniquaise, une embarcation typique de l'île.
Déception et incompréhension
Au fenua le gouvernement d'Edouard Fritch s'est dit "attristé" par cette nouvelle. Avant d'exprimer, en bon joueur, "tout notre soutien en faveur de ce dossier porté par la population martiniquaise. Cette embarcation de pêche et de course traditionnelle ne manquera pas de passionner l’auditoire de l’Unesco." "Je ne connais pas les raisons exactes qui ont fait que le président Macron a choisi ce dossier par rapport au notre. On ne comprend pas cette décision et on est évidemment très déçu", a confié le directeur du CAPF.
Dans la grande famille du 'ori tahiti l'incompréhension et surtout la déception prédominaient également. "C'est vraiment dommage pour la reconnaissance de notre culture et de nos arts traditionnels. D'autant plus aujourd'hui où le 'ori tahiti est pratiqué dans le monde entier", s'est exprimée Poerani Germain, chef de la jeune troupe Ia Ora Te Hura.
"Ce n'était peut-être pas le bon moment pour présenter notre dossier. Mais c'est en tout cas une grande déception pour nous les défenseurs de la danse traditionnelle", a commenté Olivier Lenoir, chef du groupe Tahiti Ia Ruru Tu Noa. Avant d'insister, "cela ne veut pas dire pour autant qu'il faut que nous abandonnions la transmission de notre savoir. Il faut continuer le travail avec notre jeunesse et préserver notre culture."
Préserver le 'ori Tahiti… de Tahiti
Et c'est là le but premier de l'inscription du 'ori tahiti au patrimoine immatériel de l'Unesco. La préservation et la transmission dans les règles de cet art ancestral. "Aujourd'hui on sait que notre danse tahitienne se mondialise. On est évidemment fier et honoré qu'il soit pratiqué hors de nos frontières, mais le 'ori tahiti est quelque chose qui nous appartient. En l'inscrivant à l'Unesco on aura ainsi une reconnaissance de la communauté internationale", a expliqué Fabien Dinard.
Dans une résolution votée par les représentants de l'assemblée de la Polynésie française pour apporter leurs soutiens à cette candidature, Michel Buillard et Tepuaraurii Teriitahi, rapporteurs du texte, insistaient également sur la reconnaissance et la protection du 'ori tahiti. En prenant soin d'indiquer que ce label de l'Unesco, "permettrait en outre de valoriser les auteurs, les compositeurs, les chefs de troupe et les ra’atira, les ‘orero, les pupu himene, les musiciens et les costumiers (…) Ce label favorisera également le développement d’un tourisme de niche, aujourd’hui embryonnaire, autour notamment d’événements tels que le Hura Tapairu."
Ce n'est en tout cas que partie remise. Fabien Dinard a assuré que la candidature du 'ori tahiti sera de nouveau proposée au comité du patrimoine culturel ethnologique immatériel à Paris.
LA POLYNESIE FRANÇAISE AU PATRIMOINE MONDIAL DE L'UNESCO
Le gouvernement de la Polynésie française a ensuite proposé l'inscription de neuf sites des îles Marquises en avril 2018. Il s'agit de l’île de Hatutu et sa zone maritime à Hatuta’a, Hatiheu, Paeke et l’ensemble terrestre de Nuku Hiva. Les pics et pitons de Ua Pou, sa vallée de Haka’oohoka et sa baie de Hoho’i, Motu Oa, et Paepae Menaha, Me’ae de lipona et la vallée de Puamau à Hiva Oa. Et enfin Hanavave, les monts Tou-aouoho et Mounani, ainsi que les falaises d’Omoa à Fatu Hiva. Le comité national des biens français a validé cette candidature. Désormais le ministère de la culture de Polynésie français, accompagné d'expert, devra suivre processus d’inscription, sur une durée de deux à trois ans.