Obésité: trop risqué, le ballon Allurion est retiré du marché


Crédit GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP
Paris, France | AFP | mardi 06/08/2024 - Il promet de faire perdre facilement du poids mais peut causer de graves complications. Le ballon gastrique de la start-up Allurion, dont plusieurs milliers d'exemplaires sont implantés chaque année, vient d'être retiré du marché par les autorités sanitaires françaises.

"Allurion doit retirer sans délai ses ballons gastriques du marché français afin de protéger la santé et la sécurité des patients", a déclaré mardi l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) dans un communiqué accompagné d'une décision administrative de retrait.

Contacté par l'AFP, Allurion n'a pas donné de réponse dans l'immédiat.

Son produit phare est un ballon gastrique, dispositif qui vise à aider les personnes obèses ou en surpoids à perdre du poids. Le principe est proche d'un anneau, en réduisant la place disponible pour de la nourriture dans l'estomac, à la différence qu'un ballon nécessite peu ou pas de chirurgie.

Dans le cas du ballon développé par Allurion, une start-up fondée aux Etats-Unis mais très active en France, il faut avaler le dispositif sous forme de capsule. Il reste ensuite actif quatre mois, avant de se résorber.

Mais son usage est controversé. Son efficacité, d'abord: les ballons gastriques permettent de perdre un peu de poids dans l'immédiat, mais on ignore largement si ces effets perdurent.

En France, où ce ballon est proposé depuis 2016, les autorités de santé l'autorisent mais ne le recommandent pas, au vu des doutes sur son intérêt à long terme même si Allurion assure que son efficacité dure au moins un an.

En cause aussi, son coût élevé, qui peut atteindre plusieurs milliers d'euros. Le ballon n'est donc pas remboursé par la Sécurité sociale, ce qui n'empêche pas plusieurs dizaines de cliniques privées de proposer son implantation.

Combien de personnes sont concernées ? L'ANSM s'abstient, pour des raisons juridiques, de donner les chiffres précis de vente d'Allurion, mais précise à l'AFP que son dispositif constitue la grande majorité des ballons gastriques vendus en France.

Sachant que quelque 5.000 ballons au total sont implantés par an, on peut estimer que plusieurs milliers de patients utilisent chaque année le produit d'Allurion.

- Perforations de l'estomac -

Or, parallèlement aux doutes sur son efficacité, le ballon de la start-up présente des risques. Depuis son apparition, les autorités sanitaires ont recensé une vingtaine de cas de complications graves.

Occlusion intestinale, perforation de l'estomac... Les cas s'accélèrent, puisque la plupart sont signalés depuis l'année dernière.

Certes, ces risques sont connus et signalés pour tous les ballons gastriques. Mais Allurion se distingue par deux éléments qui justifient, selon l'ANSM, son retrait.

L'agence, qui avait déjà émis une mise en garde à la mi-juillet, reproche un manque de suivi total après l'implantation du ballon, ainsi qu'une publicité agressive et déséquilibrée.

"Une fois que le ballon est posé, les patients vivent avec pendant quatre mois, sans qu'il y ait de suivi prévu par le fabricant", regrette auprès de l'AFP Thierry Thomas, l'un des responsables des questions de dispositifs médicaux au sein de l'ANSM.

Quant à la publicité, "ils communiquent énormément et ne présentent qu'un aspect des choses: les avantages de ce dispositif médical mais aucun inconvénient", ajoute-t-il.

Cette stratégie commerciale passe par les cliniques proposant le ballon, dont elles assurent elles-mêmes la promotion, et par de multiples articles publi-rédactionnels dans la presse.

Plusieurs questions se posent désormais. La suspension n'étant pas irréversible, Allurion prendra-t-il les mesures suffisantes pour remettre son ballon sur le marché ? Et quelles seront les conséquences judiciaires alors que des patients envisagent déjà des actions en justice ?

"Les premiers dossiers sont arrivés il y a un an et demi: souvent, c'est le ballon qui explose", rapporte auprès de l'AFP l'avocate Géraldine Adrai-Lachkar, qui se dit satisfaite de la décision de l'ANSM tout en la jugeant "un peu tardive".

"Ca m'étonnerait qu'il y ait juste une vingtaine de cas, je pense qu'il y en a plus", avance-t-elle.

Rédigé par RB le Mardi 6 Aout 2024 à 06:42 | Lu 993 fois