PASCAL GUYOT / AFP
Nouméa, France | AFP | vendredi 09/12/2021 - Observateurs de l'ONU, délégués de la commission de contrôle et renforts de la gendarmerie: tout est en place pour le troisième référendum d'autodétermination prévu dimanche en Nouvelle-Calédonie, que les indépendantistes ont décidé de bouder, remettant les choix à venir à des discussions après la présidentielle.
Au total, 185.004 électeurs calédoniens, figurant sur une liste électorale spéciale, sont appelés pour la troisième et dernière fois à répondre à la question: "Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante?".
Les deux précédents référendum organisés dans le cadre de l'accord de Nouméa en 2018 et 2020 avaient été remportés par le camp loyaliste, mais avec un score en baisse passant de 56,7% à 53,3% de voix pour le non à l'indépendance.
Le territoire, qui avait réussi à échapper à l'épidémie de Covid-19 en fermant ses frontières début 2020, a été rattrapé par le virus en septembre, avec un bilan de 280 décès, touchant majoritairement les kanak.
Les indépendantistes ont demandé le report du scrutin en raison de l'impossibilité de "mener une campagne équitable" à cause de l'épidémie, ce qui a été refusé par le gouvernement, poussant le FLNKS à appeler ses militants à ne pas aller voter.
Le Sénat coutumier, institution qui incarne le pouvoir traditionnel kanak, a demandé jeudi "aux citoyens kanak et aux progressistes calédoniens d'observer une journée nationale de +deuil kanak+ le 12 décembre 2021 en ne se rendant pas aux bureaux de vote".
"Appel au calme"
Son président, Yvon Kona, a également lancé un "appel au calme, pour qu'il n'y ait pas de troubles: chacun est libre d'exercer son droit de vote, on n'empêchera personne de voter".
Il répond ainsi à un appel du président de la commission de contrôle Francis Lamy, qui a demandé à ce qu'il n'y ait pas "de manifestations extérieures qui peuvent s'apparenter à une pression sur l'électeur, soit par exemple pour le dissuader d'aller voter, soit pour voter dans un certain sens".
Les autorités ont déployé un important dispositif de sécurité, qui se veut "rassurant" et "dissuasif", de 2.000 gendarmes, policiers et militaires. A trois jours du scrutin, ils avaient déjà pris place ostensiblement sur les ronds points et au bord des routes du caillou.
De son côté, le camp non indépendantiste a tenté de convaincre ses électeurs de se présenter devant les urnes mais certains dirigeants craignent "une participation en chute libre".
"Il n'y a pas d'enjeu, le résultat ne fait pas l'ombre d'un doute", se désole Philippe Michel, directeur de la campagne du parti de centre droit, Calédonie Ensemble.
De son côté, la coalition loyaliste "Les voix du non" a lancé un appel au vote massif pour ne pas "se laisser voler le résultat", en rappelant "qu'une élection n'est jamais jouée d'avance".
"Projet de société"
"Le 13 décembre, une nouvelle page va s'ouvrir. Il sera temps de construire un véritable projet de société sur la base du choix des Calédoniens de rester dans la France", espère Christopher Gygés, chef d'orchestre de la campagne de ce mouvement.
"On a eu deux consensus transitoires: Matignon c'était un consensus de 10 ans, Nouméa c'était un consensus de 20 ans (...) mais maintenant il faut que ce soit un consensus définitif entre Calédoniens, entre indépendantistes et non-indépendantistes", a pour sa part demandé jeudi le député centriste et membre de Calédonie Ensemble Philippe Gomès.
Le ministre des Outre-mer Sébastien Lecornu va d'ailleurs arriver vendredi à Nouméa pour préparer cette période de discussion. Mais Le FLNKS et les Nationalistes ont déjà indiqué qu'ils "s'opposent à toutes discussions et à de quelconques rencontres avec le ministre des Outre-mer avant les élections présidentielles", jeudi dans un communiqué.
Le président Emmanuel Macron a cependant déclaré jeudi que "le jour d'après, quel que soit le choix, il y aura une vie ensemble" avec la France, notamment "compte tenu de la réalité géopolitique de la région".
"Le rôle du président de la République n'est pas d'être dans un camp", a-t-il affirmé, rappelant toutefois avoir dit lors d'une visite sur l'île, en 2018, que "la France serait moins belle sans la Nouvelle-Calédonie".
Au total, 185.004 électeurs calédoniens, figurant sur une liste électorale spéciale, sont appelés pour la troisième et dernière fois à répondre à la question: "Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante?".
Les deux précédents référendum organisés dans le cadre de l'accord de Nouméa en 2018 et 2020 avaient été remportés par le camp loyaliste, mais avec un score en baisse passant de 56,7% à 53,3% de voix pour le non à l'indépendance.
Le territoire, qui avait réussi à échapper à l'épidémie de Covid-19 en fermant ses frontières début 2020, a été rattrapé par le virus en septembre, avec un bilan de 280 décès, touchant majoritairement les kanak.
Les indépendantistes ont demandé le report du scrutin en raison de l'impossibilité de "mener une campagne équitable" à cause de l'épidémie, ce qui a été refusé par le gouvernement, poussant le FLNKS à appeler ses militants à ne pas aller voter.
Le Sénat coutumier, institution qui incarne le pouvoir traditionnel kanak, a demandé jeudi "aux citoyens kanak et aux progressistes calédoniens d'observer une journée nationale de +deuil kanak+ le 12 décembre 2021 en ne se rendant pas aux bureaux de vote".
"Appel au calme"
Son président, Yvon Kona, a également lancé un "appel au calme, pour qu'il n'y ait pas de troubles: chacun est libre d'exercer son droit de vote, on n'empêchera personne de voter".
Il répond ainsi à un appel du président de la commission de contrôle Francis Lamy, qui a demandé à ce qu'il n'y ait pas "de manifestations extérieures qui peuvent s'apparenter à une pression sur l'électeur, soit par exemple pour le dissuader d'aller voter, soit pour voter dans un certain sens".
Les autorités ont déployé un important dispositif de sécurité, qui se veut "rassurant" et "dissuasif", de 2.000 gendarmes, policiers et militaires. A trois jours du scrutin, ils avaient déjà pris place ostensiblement sur les ronds points et au bord des routes du caillou.
De son côté, le camp non indépendantiste a tenté de convaincre ses électeurs de se présenter devant les urnes mais certains dirigeants craignent "une participation en chute libre".
"Il n'y a pas d'enjeu, le résultat ne fait pas l'ombre d'un doute", se désole Philippe Michel, directeur de la campagne du parti de centre droit, Calédonie Ensemble.
De son côté, la coalition loyaliste "Les voix du non" a lancé un appel au vote massif pour ne pas "se laisser voler le résultat", en rappelant "qu'une élection n'est jamais jouée d'avance".
"Projet de société"
"Le 13 décembre, une nouvelle page va s'ouvrir. Il sera temps de construire un véritable projet de société sur la base du choix des Calédoniens de rester dans la France", espère Christopher Gygés, chef d'orchestre de la campagne de ce mouvement.
"On a eu deux consensus transitoires: Matignon c'était un consensus de 10 ans, Nouméa c'était un consensus de 20 ans (...) mais maintenant il faut que ce soit un consensus définitif entre Calédoniens, entre indépendantistes et non-indépendantistes", a pour sa part demandé jeudi le député centriste et membre de Calédonie Ensemble Philippe Gomès.
Le ministre des Outre-mer Sébastien Lecornu va d'ailleurs arriver vendredi à Nouméa pour préparer cette période de discussion. Mais Le FLNKS et les Nationalistes ont déjà indiqué qu'ils "s'opposent à toutes discussions et à de quelconques rencontres avec le ministre des Outre-mer avant les élections présidentielles", jeudi dans un communiqué.
Le président Emmanuel Macron a cependant déclaré jeudi que "le jour d'après, quel que soit le choix, il y aura une vie ensemble" avec la France, notamment "compte tenu de la réalité géopolitique de la région".
"Le rôle du président de la République n'est pas d'être dans un camp", a-t-il affirmé, rappelant toutefois avoir dit lors d'une visite sur l'île, en 2018, que "la France serait moins belle sans la Nouvelle-Calédonie".
Quand la Nouvelle-Calédonie est devenue française
Quand la France prend possession de la Nouvelle-Calédonie au milieu du 19e siècle, elle y voit un intérêt commercial et militaire, en même temps qu'un éloignement idéal pour fonder une colonie pénitentiaire.
Parmi les Européens, ce sont pourtant les Britanniques qui découvrirent en premier, en 1774, ce territoire du Pacifique, baptisé New-Caledonia par le navigateur James Cook parce qu'il lui rappelait l'Ecosse (Caledonia).
Les Kanaks, descendants d'un lointain peuple de navigateurs, les Austronésiens, peuplent les lieux depuis 1.100 av.J-C.
Dès 1844, les premiers militaires français débarquèrent sur la Grande Terre et les premiers massacres d'indigènes eurent lieu en 1847.
Des missionnaires protestants britanniques et catholiques français sont déjà sur place, des baleiniers également, et la population autochtone est évaluée entre 50.000 et 90.000 personnes quand les Français, emmenés par le contre-amiral Febvrier-Despointes, prennent possession de la Grande Terre le 24 septembre 1853, puis cinq jours plus tard de l'île des Pins.
Les îles Loyauté ne seront considérées comme des dépendances de la Nouvelle-Calédonie qu'en 1864.
La Nouvelle-Calédonie est d'abord rattachée administrativement à la Polynésie française (Tahiti). En 1853, un décret du gouverneur Guillain impose l'enseignement du français et dix ans plus tard le gouvernement colonial interdit l'enseignement de toute autre langue, davantage pour stopper l'influence de l'anglais que celle des langues mélanésiennes et du bichlamar qui n'étaient pas vraiment en situation de concurrencer le français.
Terre de déportation politique
Pour peupler la Nouvelle-Calédonie, le gouvernement Français fait venir deux types de colons, les "libres", volontaires, et les "pénaux", contraints à venir purger sur place leur peine d'emprisonnement et souvent à y rester à vie.
Les conséquences de la colonisation sur la population kanak sont terribles: l'Etat s'attribue la propriété des meilleures terres et repousse "les indigènes" dans des "réserves" d'ampleur très limitée. En 1878, une révolte kanak est sévèrement réprimée et 600 insurgés sont tués, 1.500 contraints à l'exil. En 1887, un "régime de l'indigénat" contrôle au plus près les kanak, qui ne peuvent pas circuler librement.
"L'espace foncier mélanésien de la Grande Terre est réduit à 13% de sa superficie initiale sous les coups de boutoir des opérations dites du +grand cantonnement+, conduites entre 1897 et 1903 sous l'autorité du gouverneur Feillet", écrit l'historienne calédonienne Christiane Terrier.
Jugées impropres à une agriculture de type européen, les îles Loyauté seront épargnées et déclarées "réserves intégrales".
Les terres calédoniennes se révèlent hostiles aux colons venus de La Réunion pour cultiver la canne à sucre ou de France pour planter du café. Leur vie est particulièrement difficile, leur production médiocre et difficile à exporter. Après 1900, la France abandonne ces opérations d'immigration.
Entretemps, en 1863, Napoléon III a décidé de créer sur l'archipel une grande colonie pénitentiaire. Des prisonniers politiques y seront déportés, en particulier des communards comme Louise Michel et Henri Rochefort.
Les "transportés" condamnés aux travaux forcés construiront les routes ou travailleront dans les mines, le sous-sol calédonien étant riche de nombreux minerais comme le nickel.
Parmi les Européens, ce sont pourtant les Britanniques qui découvrirent en premier, en 1774, ce territoire du Pacifique, baptisé New-Caledonia par le navigateur James Cook parce qu'il lui rappelait l'Ecosse (Caledonia).
Les Kanaks, descendants d'un lointain peuple de navigateurs, les Austronésiens, peuplent les lieux depuis 1.100 av.J-C.
Dès 1844, les premiers militaires français débarquèrent sur la Grande Terre et les premiers massacres d'indigènes eurent lieu en 1847.
Des missionnaires protestants britanniques et catholiques français sont déjà sur place, des baleiniers également, et la population autochtone est évaluée entre 50.000 et 90.000 personnes quand les Français, emmenés par le contre-amiral Febvrier-Despointes, prennent possession de la Grande Terre le 24 septembre 1853, puis cinq jours plus tard de l'île des Pins.
Les îles Loyauté ne seront considérées comme des dépendances de la Nouvelle-Calédonie qu'en 1864.
La Nouvelle-Calédonie est d'abord rattachée administrativement à la Polynésie française (Tahiti). En 1853, un décret du gouverneur Guillain impose l'enseignement du français et dix ans plus tard le gouvernement colonial interdit l'enseignement de toute autre langue, davantage pour stopper l'influence de l'anglais que celle des langues mélanésiennes et du bichlamar qui n'étaient pas vraiment en situation de concurrencer le français.
Terre de déportation politique
Pour peupler la Nouvelle-Calédonie, le gouvernement Français fait venir deux types de colons, les "libres", volontaires, et les "pénaux", contraints à venir purger sur place leur peine d'emprisonnement et souvent à y rester à vie.
Les conséquences de la colonisation sur la population kanak sont terribles: l'Etat s'attribue la propriété des meilleures terres et repousse "les indigènes" dans des "réserves" d'ampleur très limitée. En 1878, une révolte kanak est sévèrement réprimée et 600 insurgés sont tués, 1.500 contraints à l'exil. En 1887, un "régime de l'indigénat" contrôle au plus près les kanak, qui ne peuvent pas circuler librement.
"L'espace foncier mélanésien de la Grande Terre est réduit à 13% de sa superficie initiale sous les coups de boutoir des opérations dites du +grand cantonnement+, conduites entre 1897 et 1903 sous l'autorité du gouverneur Feillet", écrit l'historienne calédonienne Christiane Terrier.
Jugées impropres à une agriculture de type européen, les îles Loyauté seront épargnées et déclarées "réserves intégrales".
Les terres calédoniennes se révèlent hostiles aux colons venus de La Réunion pour cultiver la canne à sucre ou de France pour planter du café. Leur vie est particulièrement difficile, leur production médiocre et difficile à exporter. Après 1900, la France abandonne ces opérations d'immigration.
Entretemps, en 1863, Napoléon III a décidé de créer sur l'archipel une grande colonie pénitentiaire. Des prisonniers politiques y seront déportés, en particulier des communards comme Louise Michel et Henri Rochefort.
Les "transportés" condamnés aux travaux forcés construiront les routes ou travailleront dans les mines, le sous-sol calédonien étant riche de nombreux minerais comme le nickel.