SEBASTIEN BOZON / AFP
Paris, France | AFP | jeudi 03/10/2024 - Des annonces de Michel Barnier qui prennent de court l'Elysée, un incident de séance à l'Assemblée nationale... Le sensible dossier calédonien suscite des tiraillements au sein de l'exécutif et des parlementaires de l'ex-majorité, à 16.000 km d'un archipel ravagé.
"Le gouvernement donne l'impression de ne pas être prêt, de ne pas avoir saisi l'ampleur de la situation en Nouvelle-Calédonie", s'agace auprès de l'AFP le député Renaissance Nicolas Metzdorf, élu calédonien.
Alors que l'archipel reste sous haute tension après avoir connu à partir de mai ses pires émeutes depuis 40 ans, faisant treize morts dont deux gendarmes, ce parlementaire loyaliste ne cache pas sa colère par rapport aux développements des derniers jours.
Mardi dans sa déclaration de politique générale, le Premier ministre Michel Barnier avait en effet réservé une grande place au dossier calédonien, procédant à deux annonces majeures: l'abandon de la réforme constitutionnelle très contestée permettant l'élargissement du corps électoral des élections provinciales, gelé depuis 2007, et le report d'un an de ces élections, à fin 2025.
Une volonté assumée d'apaisement, alors que cette réforme institutionnelle est vécue comme un coup de force par le camp indépendantiste, qui craint de voir le peuple autochtone kanak marginalisé.
- "Provocation" -
Mais pour M. Barnier, c'est aussi une manière de reprendre la main: il s'impliquera "personnellement" dans ce dossier, a-t-il dit, espérant récupérer des prérogatives qui sont traditionnellement celles de Matignon depuis les années 1980, mais étaient retombées dans l'escarcelle du ministère de l'Intérieur depuis le départ d'Edouard Philippe.
Problème: le président Emmanuel Macron, lui-même venu à Nouméa au mois de mai en pleine période de violences, ne s'attendait pas à toutes ces annonces du locataire de Matignon.
Dans le camp macroniste, on déplore en effet un "durcissement" entre la version du discours dont avait eu connaissance le chef de l'Etat et celle prononcée à l'Assemblée nationale par Michel Barnier.
"Le président (Macron) avait dit qu'il ne serait pas fait mention du dégel (du corps électoral)... Mais le Premier ministre a parlé du dégel et pas de la reconstruction économique", regrette une source parlementaire de l'ex-majorité.
"Annoncer qu'on ne présentera pas (la réforme au Congrès), c'est donner raison aux casseurs", s'exaspère l'ex-ministre Sonia Backès, cheffe de file des loyalistes.
Dans l'entourage de M. Barnier, on assure au contraire que la décision avait été prise "en accord avec le président de la République".
Les tensions ont même franchi un nouveau palier mercredi à l'Assemblée nationale lors de la séance des questions au gouvernement: Michel Barnier a répondu lui-même au député indépendantiste Emmanuel Tjibaou, après avoir laissé son ministre des Outre-mer, François-Noël Buffet, répondre à Nicolas Metzdorf.
"Un manque de respect", "une provocation", critique-t-on dans les rangs du groupe Ensemble pour la République, dont plusieurs parlementaires ont quitté l'hémicycle à l'initiative de Gérald Darmanin après l'incident de séance.
- Mission Larcher-Braun-Pivet -
M. Barnier a ensuite rectifié le tir lors d'un discours devant le Sénat, laissant cette fois de côté la question sensible du corps électoral et insistant sur "l'urgence économique et sociale". Tout en promettant "de nouvelles mesures de soutien".
Une prise de parole appréciée par Philippe Gomès, chef du groupe Calédonie ensemble (loyalistes modérés) et membre d'une délégation calédonienne composée de loyalistes et d'indépendantistes, actuellement en déplacement à Paris. "Le Premier ministre, il ne s'agit pas de le massacrer ou de l'insulter: on a un Premier ministre qui souhaite nous aider", dit-il à l'AFP.
"Je crois que Nicolas Metzdorf essaie de mettre de l'huile sur le feu", s'indigne cet élu, qui a jugé "complémentaires" les prises de positions successives de Michel Barnier sur le dossier.
Derrière ces dissensions, la répartition des rôles entre l'Elysée et Matignon semble encore assez floue, même si l'entourage de M. Barnier assure que des "échanges réguliers" ont lieu entre les deux figures de l'exécutif, "compte tenu de la sensibilité du sujet".
Si l'hypothèse de la nomination prochaine d'un délégué interministériel est évoquée avec insistance, Michel Barnier a opté pour une "mission de concertation et de dialogue" conduite par les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat, Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher. Ces derniers se rendront en Nouvelle-Calédonie "prochainement".
"Le gouvernement donne l'impression de ne pas être prêt, de ne pas avoir saisi l'ampleur de la situation en Nouvelle-Calédonie", s'agace auprès de l'AFP le député Renaissance Nicolas Metzdorf, élu calédonien.
Alors que l'archipel reste sous haute tension après avoir connu à partir de mai ses pires émeutes depuis 40 ans, faisant treize morts dont deux gendarmes, ce parlementaire loyaliste ne cache pas sa colère par rapport aux développements des derniers jours.
Mardi dans sa déclaration de politique générale, le Premier ministre Michel Barnier avait en effet réservé une grande place au dossier calédonien, procédant à deux annonces majeures: l'abandon de la réforme constitutionnelle très contestée permettant l'élargissement du corps électoral des élections provinciales, gelé depuis 2007, et le report d'un an de ces élections, à fin 2025.
Une volonté assumée d'apaisement, alors que cette réforme institutionnelle est vécue comme un coup de force par le camp indépendantiste, qui craint de voir le peuple autochtone kanak marginalisé.
- "Provocation" -
Mais pour M. Barnier, c'est aussi une manière de reprendre la main: il s'impliquera "personnellement" dans ce dossier, a-t-il dit, espérant récupérer des prérogatives qui sont traditionnellement celles de Matignon depuis les années 1980, mais étaient retombées dans l'escarcelle du ministère de l'Intérieur depuis le départ d'Edouard Philippe.
Problème: le président Emmanuel Macron, lui-même venu à Nouméa au mois de mai en pleine période de violences, ne s'attendait pas à toutes ces annonces du locataire de Matignon.
Dans le camp macroniste, on déplore en effet un "durcissement" entre la version du discours dont avait eu connaissance le chef de l'Etat et celle prononcée à l'Assemblée nationale par Michel Barnier.
"Le président (Macron) avait dit qu'il ne serait pas fait mention du dégel (du corps électoral)... Mais le Premier ministre a parlé du dégel et pas de la reconstruction économique", regrette une source parlementaire de l'ex-majorité.
"Annoncer qu'on ne présentera pas (la réforme au Congrès), c'est donner raison aux casseurs", s'exaspère l'ex-ministre Sonia Backès, cheffe de file des loyalistes.
Dans l'entourage de M. Barnier, on assure au contraire que la décision avait été prise "en accord avec le président de la République".
Les tensions ont même franchi un nouveau palier mercredi à l'Assemblée nationale lors de la séance des questions au gouvernement: Michel Barnier a répondu lui-même au député indépendantiste Emmanuel Tjibaou, après avoir laissé son ministre des Outre-mer, François-Noël Buffet, répondre à Nicolas Metzdorf.
"Un manque de respect", "une provocation", critique-t-on dans les rangs du groupe Ensemble pour la République, dont plusieurs parlementaires ont quitté l'hémicycle à l'initiative de Gérald Darmanin après l'incident de séance.
- Mission Larcher-Braun-Pivet -
M. Barnier a ensuite rectifié le tir lors d'un discours devant le Sénat, laissant cette fois de côté la question sensible du corps électoral et insistant sur "l'urgence économique et sociale". Tout en promettant "de nouvelles mesures de soutien".
Une prise de parole appréciée par Philippe Gomès, chef du groupe Calédonie ensemble (loyalistes modérés) et membre d'une délégation calédonienne composée de loyalistes et d'indépendantistes, actuellement en déplacement à Paris. "Le Premier ministre, il ne s'agit pas de le massacrer ou de l'insulter: on a un Premier ministre qui souhaite nous aider", dit-il à l'AFP.
"Je crois que Nicolas Metzdorf essaie de mettre de l'huile sur le feu", s'indigne cet élu, qui a jugé "complémentaires" les prises de positions successives de Michel Barnier sur le dossier.
Derrière ces dissensions, la répartition des rôles entre l'Elysée et Matignon semble encore assez floue, même si l'entourage de M. Barnier assure que des "échanges réguliers" ont lieu entre les deux figures de l'exécutif, "compte tenu de la sensibilité du sujet".
Si l'hypothèse de la nomination prochaine d'un délégué interministériel est évoquée avec insistance, Michel Barnier a opté pour une "mission de concertation et de dialogue" conduite par les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat, Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher. Ces derniers se rendront en Nouvelle-Calédonie "prochainement".