Nouveau préavis à la Banque de Tahiti de Uturoa


Tahiti, le 26 octobre 2020 – Un nouveau préavis de grève a été déposé vendredi dernier par A Ti'a i Mua auprès de la direction de l'agence de la Banque de Tahiti de Uturoa. En effet, si le directeur d'agence accusé de harcèlement par une employée a bien été déplacé à Tahiti par sa direction, les syndicats demandent une confirmation écrite de la mutation officielle du directeur.
 
La grogne sociale refait surface à l'agence de la Banque de Tahiti de Uturoa. Vendredi dernier, la confédération A Ti'a i Mua a déposé un second préavis de grève auprès de la direction de l'agence, deux jours après avoir signé un protocole d'accord pour son premier préavis. Raison de ce retournement de situation, la confédération et l'employée qui accusait son directeur de harcèlement estiment ne pas avoir obtenu totalement gain de cause. En effet, selon le syndicat, la direction de la Banque de Tahiti a reconnu "les faits pouvant caractériser le harcèlement moral" dont a été victime Gloria Holman par le directeur d'agence de Uturoa, Josélito Win Chin. Quant à son remplacement à Uturoa, toujours selon les syndicats, le directeur des ressources humaines l'a confirmé "par oral" mais sans aucune trace écrite.
 
Le délégué syndical Cyril Boiron explique que Josélito Win Chin a été déplacé à Papeete "mais on n'a pas d'élément écrit qui nous prouve qu'il ne reviendra plus à Raiatea". Le syndicat tient donc à ce que cette mention soit inscrite dans le second protocole d'accord. "Et apparemment, le DRH ne veut pas faire cet écrit", explique le syndicaliste qui espère que cette nouvelle situation ne mènera pas à une grève. "Je ne peux pas imaginer que le directeur n'ait pas au minimum une sanction grave, voire même un licenciement. C'est aussi pour les autres agents qui risquent de l'avoir comme chef ou directeur d'agence. Quelles seront leurs réactions? Peut-être que la direction est dans cette procédure actuellement".
 
Contactée, la direction de la Banque de Tahiti n'a pas souhaité répondre à nos questions sur ce dossier, indiquant seulement "qu'au regard du signalement de faits susceptibles de constituer une situation de harcèlement moral, la Banque de Tahiti a initié la procédure prévue en une telle hypothèse conformément au droit du travail et à l'obligation de sécurité dont elle est débitrice à l'égard de ses collaborateurs et de ses collaboratrices". La banque dit avoir "pris les mesures appropriées afin de garantir la sécurité au travail de ses collaborateurs et collaboratrices de l'agence concernée" et vouloir "réserver ses observations" dans le cadre des négociations pour ce second préavis sans entendre "se justifier auprès d’une organisation syndicale par voie de presse interposée".
 
Rappelons que le 15 octobre dernier, la confédération avait médiatisé son dépôt de préavis de grève lors d'une conférence de presse menée par le secrétaire général de A Ti'a i Mua. Mercredi dernier, les membres du syndicat et le DRH s'étaient rencontrés et ce dernier avait demandé du temps pour "mener à terme leur enquête et prendre des décisions fermes". Un protocole de fin de conflit avait été signé. Avant ce second préavis deux jours plus tard.

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​Gloria Holman, employée de l'agence de Uturoa : "Soulagée que ce soit reconnu"

Vous êtes soulagée par la réaction de votre direction ?

"Pendant plusieurs années j'ai essayé de dénoncer ce harcèlement. Aujourd'hui, que cela soit reconnu par la direction est un vrai soulagement. (…) J'ai l'esprit serein. C'est à dire que je n'ai plus cette peur, car depuis un moment je ne sortais plus de chez moi, de peur de le croiser. J'ai beaucoup de travail à faire sur moi-même. Je suis suivie par un psychiatre et je suis aussi un traitement. Depuis qu'on m'a informée que mon directeur va être ramené sur Papeete, je me sens revivre. Je me sens en sécurité et plus sereine à retourner au travail."
 
Pourquoi avoir attendu autant pour mettre en lumière ce harcèlement ?

"C'était la peur et il fallait aussi avoir des preuves. C'est très difficile de prouver le harcèlement. Mais c'est surtout la peur de se battre une société comme la Banque de Tahiti. J'ai fait un premier signalement en 2015 alors que cela date depuis 2005. Je m'étais retournée vers plusieurs personnes et la réponse était toujours la même : "il faut faire avec ou il faut patienter". Les années ont passé et rien n'a changé. En 2015, j'ai fait le premier signalement. Mais j'ai été déçue, car la réponse de notre ancienne DRH était que je m'adapte à mon directeur et que ce n'était pas à lui de changer. J'ai baissé les bras et j'ai continué à subir jusqu'à cette année. J'avais aussi le soutien de ma mère, elle a toujours été à mes côtés pour m'épauler. Elle est décédée l'an dernier et je me suis retrouvée seule face à ce problème et je ne pouvais plus continuer ainsi. Je me suis retournée vers des amis proches et ils m'ont proposé d'aller à Tahaa pour un poste inférieur au mien. J'ai refusé et là je me suis dit qu'il faut que cela s'arrête. Et là j'ai pris contact avec Cyril Boiron qui m'a défendue."
 
Vous avez un message aux victimes de harcèlement qui n'osent pas dénoncer ?
 
"N'hésitez pas il faut dénoncer le harcèlement. Les paroles, les mots qui sont prononcés lors d'un harcèlement moral touchent l'âme et bouleversent ta vie. Même aujourd'hui en sachant qu'il est parti, ce n'est pas pour autant que je suis guérie. Au contraire je suis encore en train de me battre pour guérir car les mots qui ont été dits pendant toutes ces années sont toujours là. Alors j'encourage toutes les victimes de harcèlement à dénoncer et à ne pas se laisser faire. Cela fait du bien de se battre, je ne suis pas un cas isolé et il y en a partout. Dénoncer le harcèlement va nous permettre d'aller au travail sereinement sans avoir mal au ventre."
 

Rédigé par Vaite Urarii Pambrun le Lundi 26 Octobre 2020 à 21:57 | Lu 4637 fois