Moruroa : une opération "vérité" de la part des autorités


La contre amiral Anne Cullerre et le Haut-commissaire Jean-Pierre Laflaquière.
PAPEETE, vendredi 1er février 2013. A Moruroa : rien de nouveau. C’est ainsi que l’on pourrait résumer les 1h30 de conférence de presse au COM SUP (Commandement supérieur des forces armées) de la conférence de presse de ce vendredi matin. L’armée parle peu mais quand elle se met à table tout y passe, ou presque. Au programme : la surveillance géo-mécanique et radiologique des atolls de Moruroa et Fangataufa : deux sites militaires classés défense. Et la réhabilitation, en cours depuis 2009, de l’atoll de Hao qui abritait la base arrière du CEP (Centre d’expérimentation du Pacifique). «Il ne se passe rien actuellement à Moruroa en dehors de la surveillance classique du site. Pas de construction de blockhaus, pas d’extraction de terres rares», la contre amiral Anne Cullerre, la COM SUP est catégorique. Les annonces faites, il y a quelques jours par un parti politique local, ne sont que des rumeurs. Elles donnent toutefois l’occasion aux plus hautes autorités de l’Etat de faire un point de son activité sur place. Selon les forces armées, tout est sous contrôle. La contre amiral Anne Cullerre en donne pour preuves, les rapports annuels de la surveillance géo-mécanique ou des mesures de la radioactivité en Polynésie française, consultables en ligne sur le site Internet des forces armées en Polynésie française «rien n’est caché».


La radioactivité de Moruroa où sont en poste 35 militaires, est l’objet de relevés quotidiens –par aérosols atmosphériques et dosimètres d’ambiance pour ce qui est des mesures dans l’air. Enfin des campagnes annuelles de relevés sur terre et dans le lagon sont organisées : la prochaine aura lieu en mars 2013. Ces différentes mesures précisent qu’à Moruroa «il n’y a rien d’anormal». En fait, la radioactivité résiduelle des 152 essais nucléaires souterrains réalisés de 1976 à 1996 serait concentrée dans divers puits. Enfin, en raison de la quarantaine d’essais atmosphériques, certains motu en zone Nord de Moruroa, notamment la baie Colette sont des zones non autorisées en raison de «traces infimes de plutonium dans le corail», même si «dans l’absolu, le risque de contamination est mineur».

D'ailleurs, les militaires du DTP Rimap (Détachement Terre de Polynésie) qui vivent sur place «se baignent dans le lagon et ne portent pas de dosimètre». Mieux encore d’ici peu, de l’eau potable sera issue d’un système de dessalement de l’eau de mer du lagon, par osmose inverse, et sans filtre particulier pour les radionucléides. Quant aux travaux sur Moruroa, il y a régulièrement des opérations de maintenance notamment sur tout le système de surveillance géo-mécanique, mis en place dès le début des années 1980 afin de surveiller les mouvements de terrain. Mais les grandes manœuvres pour moderniser tout ce système sont programmées à partir de 2015. D’ici là, il y aura sans doute des travaux préliminaires de terrassement ou de réfection de routes, mais rien qui ne doive alerter la population de Polynésie. Selon les autorités, donc, "Tout est sous contrôle, tout est normal."


HAO : UN RISQUE SANITAIRE ALIMENTAIRE A PRECISER


L’atoll de Hao est l’objet depuis 2009 d’une vaste entreprise de réhabilitation des anciens sites militaires (base vie et logistique) de l’ex CEP. Les travaux devraient durer jusqu’en 2016 et sont réalisés dans le cadre d’un partenariat étroit entre l’Etat, le Pays et la commune. Actuellement 70% des 185 hectares à traiter ont été réhabilités. 52 parcelles déjà restituées à leurs propriétaires. «Il s’agit d’un chantier industriel» précisait Jean-Pierre Laflaquière, le Haut commissaire, avec l’intervention de militaires du génie pour les travaux les plus simples, et d’entreprises spécialisées lorsqu’il s’agit de désamiantage ou de dépollution d’hydrocarbures.

Sur les 185 hectares, 3% ont été identifiées comme polluées
par le PCB (polychlorobiphényles, plus connus sous le nom commercial de pyralènes), les hydrocarbures et les métaux. Au total il y aurait 146 000 m3 de terres polluées pour lesquelles reste à prévoir l’issue finale : un stockage, un traitement sur place, ou une évacuation. «Toutes les solutions sont ouvertes et les discussions sont en cours» explique le Haut commissaire annonçant qu’une réunion du Comité de pilotage devra se réunir prochainement «Il y a une approche de protection de l’environnement et de coût aussi» précise-t-il.

Par ailleurs, une étude d’impact sur les produits de l’alimentation produite sur place, dont les résultats ont été publiés en juin 2012 montre qu’il peut exister «un risque sanitaire en cas de très forte consommation de certaines parties de poissons et d’invertébrés (le foie notamment)». Une enquête alimentaire qui devra être affinée, le Pays ayant déjà formulé des demandes à ce sujet. Rappelons que l’atoll de Hao est la localisation prévue pour le projet de ferme aquacole de la Tahiti Nui Jingmin Ocean farm, la fameuse joint venture du Pays avec une société chinoise. Un projet qui sera soumis, probablement dès la semaine prochaine aux élus de l’assemblée de Polynésie française.
Les 12 sites de couleur rouge doivent être traités par des entreprises spécialisées (pour le désamiantage notamment). Les 10 sites en vert sont des chantiers classiques, pris en charge par les militaires du génie. Carte publiée dans le Te Reo N°1 (Novembre 2009), une lettre d’information qui a pour objet d’informer la population de l'atoll, les institutions et le grand public de l'état d'avancement des travaux de déconstruction.

Rédigé par Mireille Loubet le Vendredi 1 Février 2013 à 15:14 | Lu 2778 fois