Miri 7 : Barbion réclame plus d'1,2 milliard à 30 habitants


Nouveau bras de fer entre des habitants de Miri et le promoteur des SNC Delano, Thierry Barbion. crédit photo archives Tahiti Infos
Tahiti, le 11 septembre 2023 - Une trentaine d'habitants de Miri et l'association Miriti'ai contestent, dans le cadre d'un “recours gracieux” adressé au président du Pays, la légalité d'un arrêté autorisant l'aménagement de 70 lots à Miri 7 par les SNC Delano représentées par Victor Barbion. Ces sociétés ont aussitôt pris les devants en saisissant le tribunal civil de première instance pour réclamer plus d'1,2 milliard de francs à ces habitants au titre des “pertes liées aux ventes qui ne pourront pas se faire” le temps que les délais de recours soient purgés.
 
Nouveau bras de fer entre des habitants de Miri et le promoteur des SNC Delano, Thierry Barbion, dont son fils, Victor, a repris la gérance. Le 9 mai 2023, l'arrêté du 2 mai 2023 autorisant l'aménagement d'un lotissement de 70 lots destinés à l'habitation dénommé “Miri 7” était publié au Journal officiel de la Polynésie française (JOPF).
 
Un projet datant de plusieurs années mais dont l'arrêté d'extension est intervenu au lendemain des élections territoriales, mais avant que le nouveau gouvernement Brotherson ne soit installé. Hasard du calendrier ? Certains en doutent. Il n'en demeure pas moins que le délai de recours pour contester ce permis de lotir étant de deux mois, il expirait donc le 9 juillet 2023.
 
“Ayant reçu les pièces du permis ce jeudi 6 juillet 2023, je n'ai matériellement pas eu le temps de développer les moyens de contestation de ce permis”, explique Thibault Millet, conseil de plusieurs habitants de Miri ainsi que de l'association Miritia'i, dans un “recours gracieux” adressé au président du Pays le 6 juillet. Se faisant, et sachant que le président dispose de deux mois pour répondre, ce laps de temps permettait au conseil des habitants contestataires de ce permis de lotir, de fourbir leurs armes afin de porter l'affaire devant le tribunal administratif. Ils ont deux mois pour le faire.
 
“Mauvaise foi” et “procédure abusive”

Mais ils n'en auront pas eu le temps. En effet, ni une ni deux, l'avocat des SNC Delano représentées par Victor Barbion, maître Arcus Usang, a préféré leur couper l'herbe sous le pied en déposant une requête au tribunal civil de première instance de Papeete le 25 août dernier, sans attendre la réponse du président du Pays. Il y dénonce “la mauvaise foi” des défendeurs dont il estime la procédure “abusive” et auxquels il réclame la somme d'1,208 milliard de francs “en réparation du préjudice lié à la perte d'exploitation des lotisseurs”, augmentée de la somme de 4,124 millions de francs par mois (soit 49,490 millions par an) de “préjudice financier à arrêter le jour de la décision à intervenir”.
 
Dans son recours gracieux, Me Millet liste certains “griefs et réserves qui justifient déjà en soi le retrait de ce permis de lotir que nous jugeons illégal”, comme notamment le fait que les travaux de terrassement de ces lots aient été réalisés “en majeure partie” avant même que l'étude d'impact sur l'environnement n'ait été opérée. Elle n'est donc “par définition, pas préalable” et constitue ainsi une “tentative de régularisation ‘a posteriori’ des travaux déjà réalisés illégalement et agglomérés à une demande de travaux nouveaux dans le cadre d'une demande de permis de lotir”.
 
Une étude d'impact “superficielle” et “insuffisante”
 
Une étude d'impact qu'il juge par ailleurs “très superficielle” et “insuffisante sur de nombreux points”. Non seulement elle “contrevient” à certaines dispositions du code de l'environnement, mais elle “n'envisage pas les conséquences de l'adjonction de 73 lots sur le lotissement existant”. Car qui dit logements supplémentaires, dit charges supplémentaires. Et les réseaux routiers actuels ainsi que les réseaux d'eau potable et d'eaux usées ne peuvent pas supporter “en l'état” de nouveaux logements.
 
De son côté, Me Arcus Usang qualifie ce recours “sans fondement et abusif” et c'est en ce sens qu'il demande une indemnisation pour le préjudice subi. Dans sa requête, il explique que cette fameuse autorisation datant du 2 mai dernier “concerne une emprise foncière qui a déjà fait l'objet d'un permis de lotir”, puisque l'ensemble des parcelles du permis de lotir de Miri 7 sont issues des parcelles cadastrées de Miri 6 et Miri 4. Estimant que le recours gracieux de Me Millet n'est qu'“un inventaire à la Prévert” et présageant qu'il “sera sans doute suivi d'un recours devant le tribunal administratif”, Me Usang a donc pris les devants en demandant “la condamnation ‘in solidum’” des 30 habitants et de l'association Mirita'i.
 
Une procédure d'intimidation ?
 
Une procédure pour le moins inédite qui n'a pour seul objectif, selon l'un des membres de l'association joint par Tahiti Infos, “d'intimider les habitants de Miri” afin qu'ils ne déposent pas de recours alors qu'ils disposent encore d'un délai de deux mois pour le faire. “Et ça marche”, regrette-t-il. Il précise qu'ils ne sont “pas contre cette extension qui est inéluctable”, mais qu'ils souhaitent simplement que chacun paie sa juste part, expliquant qu'en 2022 et 2023, ils ont déjà supporté “des dizaines de millions de réparations sur des réseaux qui ne (les) concernent pas”. 
 
La présidente de l'association Miriti'ai ainsi que les 30 habitants contestataires sont donc convoqués devant le tribunal administratif le 27 septembre prochain. De son côté, le président Moetai Brotherson, qui rentrera de Paris en fin de semaine, dispose encore de quelques jours pour répondre.  
 

Rédigé par Stéphanie Delorme le Lundi 11 Septembre 2023 à 16:24 | Lu 9247 fois