Tahiti, le 18 septembre 2020 - Imaginez une petite île peuplée depuis des siècles par des Polynésiens heureux de leur sort. Des archéologues ont trouvé en 2001 des poteries en fouillant le sol de ce caillou planté à cent soixante kilomètres environ au sud de Tongatapu, poteries qui ont été datées du 4e ou du 5e siècle après Jésus-Christ. Autant dire qu’il y avait belle lurette que la colonisation de ce roc surgi de la mer avait été menée à bien lorsqu’en 1863, un voilier apparut sur l’horizon : son escale fut une tragédie pour la population de cette île, depuis complètement abandonnée... Le responsable, lui, est venu finir sa vie tranquillement à Tahiti, jamais inquiété !
Ata est une île minuscule dans la myriade de terres émergées du vaste Pacifique ; elle ne mesure que 1,5 km2 et est essentiellement constituée de reliefs abruptes et de falaises accores ; on compte trois sommets, l’un de cent-quatre-vingt mètres de haut et les deux autres de trois cent-sept et de trois cent-neuf mètres. Vertigineux pour tout dire, la population s’étant concentrée sur un plateau situé au centre de cette terre, entre soixante et cent mètres au-dessus du niveau de la mer. Il n’y avait qu’un petit village sur Ata, baptisé Kolomaile, au pied de la colline la plus à l’est. Mais malgré la petitesse de cet habitat, ce village était lui-même organisé en trois quartiers, Hihifo, Auloto et Pea.
Ata est une île minuscule dans la myriade de terres émergées du vaste Pacifique ; elle ne mesure que 1,5 km2 et est essentiellement constituée de reliefs abruptes et de falaises accores ; on compte trois sommets, l’un de cent-quatre-vingt mètres de haut et les deux autres de trois cent-sept et de trois cent-neuf mètres. Vertigineux pour tout dire, la population s’étant concentrée sur un plateau situé au centre de cette terre, entre soixante et cent mètres au-dessus du niveau de la mer. Il n’y avait qu’un petit village sur Ata, baptisé Kolomaile, au pied de la colline la plus à l’est. Mais malgré la petitesse de cet habitat, ce village était lui-même organisé en trois quartiers, Hihifo, Auloto et Pea.
Les étrangers bienvenus
Particularité du mode de vie des habitants, ils partageaient leur temps entre la mise en valeur des produits de leur terre (bananes, taro, arbre à pain...) et, plus acrobatique, la récolte de ce que la mer pouvait leur offrir, sachant que l’accès à la grève exigeait d’avoir le pied bien assuré, car tous les témoignages des navigateurs occidentaux le confirment, la descente sur la côte rocheuse était extrêmement risquée. Mais apparemment, cette sente périlleuse ne posait pas de problèmes aux indigènes, aussi à l’aise lorsqu’il fallait descendre que lorsqu’il fallait remonter lourdement chargés.
Ata était-elle un petit paradis ? Assurément non, mais du moins des équilibres avaient été trouvés au sein de cette population qui demeurait très ouverte aux visiteurs pour une raison toute simple : le peu de “marchandises” disponibles sur place sans compter les évidents risques de consanguinité, puisqu’ils n’étaient que trois cents environ sur leur rocher ; les visiteurs des autres îles des Tonga étaient donc les bienvenus tout comme ne pouvaient manquer de l’être les étrangers à la région, comprenez les Européens, en provenance d’Australie ou de Nouvelle-Zélande essentiellement.
On le sait, santaliers, baleiniers, missionnaires de tout poil sillonnaient le Pacifique depuis de nombreuses décennies, mais Ata avait réussi à échapper à une arrivée massive de commerçants ou de prêcheurs compte tenu de sa géographie –et de son éloignement des routes maritimes classiques. C’est pourquoi lorsque le Grecian apparut, les habitants d’Ata se firent-ils une joie de rendre visite à ce bateau... Mais de cette tragédie nous parlerons plus loin.
Ata était-elle un petit paradis ? Assurément non, mais du moins des équilibres avaient été trouvés au sein de cette population qui demeurait très ouverte aux visiteurs pour une raison toute simple : le peu de “marchandises” disponibles sur place sans compter les évidents risques de consanguinité, puisqu’ils n’étaient que trois cents environ sur leur rocher ; les visiteurs des autres îles des Tonga étaient donc les bienvenus tout comme ne pouvaient manquer de l’être les étrangers à la région, comprenez les Européens, en provenance d’Australie ou de Nouvelle-Zélande essentiellement.
On le sait, santaliers, baleiniers, missionnaires de tout poil sillonnaient le Pacifique depuis de nombreuses décennies, mais Ata avait réussi à échapper à une arrivée massive de commerçants ou de prêcheurs compte tenu de sa géographie –et de son éloignement des routes maritimes classiques. C’est pourquoi lorsque le Grecian apparut, les habitants d’Ata se firent-ils une joie de rendre visite à ce bateau... Mais de cette tragédie nous parlerons plus loin.
L’île d’Ata est cernée de toutes parts de falaises accores. Désertée après le rapt de McGraph, elle est aujourd’hui une réserve pour la faune et la flore (photo : Otago Daily Times).
Le fils rejoint le père au bagne
L’un des rares portraits connus de McGraph, médiocre capitaine baleinier : il fit naufrage avec deux navires différents en 1859 et en 1860, au large des îles Chatham (photo : Otago Daily Times).
Remontons le temps jusqu’au 23 octobre 1815 : un bébé voit le jour à Concord, dans la Nouvelle Galles du Sud, en Australie. Baptisé Thomas James (son baptême officiel se fit le 24 décembre 1815), il est le troisième enfant de Michael William McGraph, un bagnard déporté en Australie après une décision de justice. Il était arrivé sur le Boyd, un bateau à l’histoire mouvementée, qui fut attaqué en décembre 1809 par les Maoris à Whangaroa : le dénouement de cette agression fut des plus sanglants, puisque sur soixante et onze membres d’équipage, soixante-sept furent tués et dévorés par les guerriers maoris, seuls quatre passagers, une femme, un garçon et deux enfants en bas âge ayant été sauvés (et secourus plus tard). Dans l’euphorie de la prise de possession du navire, les Maoris l’amenèrent à la côte pour mieux le dépouiller mais par inadvertance, ils mirent le feu à la réserve de poudre qui fit exploser le bateau, tuant dix de ces Maoris. Justice immanente diront certains...
Michael William Graph, pour sa part, avait été débarqué sans encombre à Port Jackson (Sydney) le 14 août 1809.
Sur place, il avait noué une relation avec une dénommée Elisabeth Somerville, qui devint son épouse à l’âge de seize ans. Malheureusement pour le jeune Thomas James, né de cette union, son père avait de l’honnêteté une idée très relative. Pris dans une affaire de vol, il écopa d’une peine d’emprisonnement et d’exil en Tasmanie, le “bagne des bagnards” et son fils se retrouva, à six ans, placé dans un orphelinat, sa mère se remariant deux fois, visiblement sans prendre Thomas à sa charge.
Évidemment, à l’époque, les orphelinats ne vous apprenaient pas à servir le thé et Thomas James McGraph en sortit avec une éducation rudimentaire et des manières assez frustes. C’est ainsi qu’à seize ans, lui aussi se fit prendre dans le cambriolage d’un entrepôt, ce qui lui valut d’être à son tour déporté en Tasmanie, loin de son environnement.
On pourrait penser que cet arrachement lui aurait permis de comprendre, plus tard, ce que le trafic d’esclaves générait en terme de rupture, mais on le verra, il n’en fut rien, bien au contraire.
Michael William Graph, pour sa part, avait été débarqué sans encombre à Port Jackson (Sydney) le 14 août 1809.
Sur place, il avait noué une relation avec une dénommée Elisabeth Somerville, qui devint son épouse à l’âge de seize ans. Malheureusement pour le jeune Thomas James, né de cette union, son père avait de l’honnêteté une idée très relative. Pris dans une affaire de vol, il écopa d’une peine d’emprisonnement et d’exil en Tasmanie, le “bagne des bagnards” et son fils se retrouva, à six ans, placé dans un orphelinat, sa mère se remariant deux fois, visiblement sans prendre Thomas à sa charge.
Évidemment, à l’époque, les orphelinats ne vous apprenaient pas à servir le thé et Thomas James McGraph en sortit avec une éducation rudimentaire et des manières assez frustes. C’est ainsi qu’à seize ans, lui aussi se fit prendre dans le cambriolage d’un entrepôt, ce qui lui valut d’être à son tour déporté en Tasmanie, loin de son environnement.
On pourrait penser que cet arrachement lui aurait permis de comprendre, plus tard, ce que le trafic d’esclaves générait en terme de rupture, mais on le verra, il n’en fut rien, bien au contraire.
Les débuts du blackbirding
Qu’on l’appelle blackbirding ou trafic d’êtres humains, l’enrôlement de main-d’œuvre dans les îles du Pacifique Sud s’apparenta plus à de la traite négrière qu’à des embauches légales.
Dans la foulée, Thomas fut encore pris la main dans le sac pour un vol de mouton, ce qui alourdit sa peine. Ce qui ne l’empêcha pas, une fois dehors, de se marier le 10 décembre 1840 avec une dénommée Elisabeth Pearce, née Folley (21/9/1811-3/10/1891) dont les grands-parents maternels étaient des forçats, d’abord installés à Norfolk avant de migrer en Tasmanie. Si nos sources généalogiques sont exactes, le couple eut sept enfants malgré les rares passages de Thomas chez lui, puisqu’il mena une carrière de chasseur de baleines, donc plus souvent au large qu’à terre.
C’est à partir de cette activité de baleinier que McGraph apprit à connaître le Pacifique et à mesurer les difficultés de cette quête des cétacés, dans des bateaux peu confortables, pour des campagnes durant parfois un an, voire deux, le temps de remplir les barils d’huile de baleine ou de cachalot. Il en vécut d’abord en tant que matelot puis comme capitaine, mais il était à l’affût de toute opportunité lui permettant de gagner plus vite et plus facilement de l’argent. Une de ses anciennes photographies a été prise à San Francisco, preuve qu’il était un marin au long cours.
Petit retour en arrière : dès 1847, le 16 avril précisément, soixante-cinq Mélanésiens furent livrés à Boyd Town par le navire Velocity. Soixante-dix suivirent à Sydney en septembre 1847 et cinquante-sept autres en octobre de la même année. En 1848, compte tenu des violences manifestes à l’encontre de ces travailleurs et de leur enrôlement par la force, une discrète enquête mit un terme, momentanément, à cette activité dans la Nouvelle Gales du Sud.
Mais, ô surprise, en 1863, Robert Towns (futur fondateur de Townsville), santalier et baleinier devenu riche, acheta une propriété au sud de Brisbane pour produire du coton, en profitant de l’arrêt des exportations aux États-Unis du fait de la guerre de Sécession. Pour ses cent-soixante hectares, il avait besoin de main-d’œuvre et imagina aller se servir tout simplement en Mélanésie. En août 1863, le premier contingent de Mélanésiens, soixante-treize personnes, fut débarqué à Brisbane. Ce fut le début d’une intense activité de blackbirding qui aboutit à la déportation de dizaines de milliers d’indigènes (le chiffre de soixante-deux mille cinq cents est avancé pour la seule Australie), arrachés à leurs îles, leurs villages, leurs tribus, leurs familles.
C’est à partir de cette activité de baleinier que McGraph apprit à connaître le Pacifique et à mesurer les difficultés de cette quête des cétacés, dans des bateaux peu confortables, pour des campagnes durant parfois un an, voire deux, le temps de remplir les barils d’huile de baleine ou de cachalot. Il en vécut d’abord en tant que matelot puis comme capitaine, mais il était à l’affût de toute opportunité lui permettant de gagner plus vite et plus facilement de l’argent. Une de ses anciennes photographies a été prise à San Francisco, preuve qu’il était un marin au long cours.
Petit retour en arrière : dès 1847, le 16 avril précisément, soixante-cinq Mélanésiens furent livrés à Boyd Town par le navire Velocity. Soixante-dix suivirent à Sydney en septembre 1847 et cinquante-sept autres en octobre de la même année. En 1848, compte tenu des violences manifestes à l’encontre de ces travailleurs et de leur enrôlement par la force, une discrète enquête mit un terme, momentanément, à cette activité dans la Nouvelle Gales du Sud.
Mais, ô surprise, en 1863, Robert Towns (futur fondateur de Townsville), santalier et baleinier devenu riche, acheta une propriété au sud de Brisbane pour produire du coton, en profitant de l’arrêt des exportations aux États-Unis du fait de la guerre de Sécession. Pour ses cent-soixante hectares, il avait besoin de main-d’œuvre et imagina aller se servir tout simplement en Mélanésie. En août 1863, le premier contingent de Mélanésiens, soixante-treize personnes, fut débarqué à Brisbane. Ce fut le début d’une intense activité de blackbirding qui aboutit à la déportation de dizaines de milliers d’indigènes (le chiffre de soixante-deux mille cinq cents est avancé pour la seule Australie), arrachés à leurs îles, leurs villages, leurs tribus, leurs familles.
Les promesses du Pérou
Robert Towns (futur fondateur de Townsville), ancien santalier et baleinier, relança le trafic d’êtres humains en 1863 pour les besoins de sa plantation de coton. Le plus simple, pour lui, était de se servir en main-d’œuvre en Mélanésie.
McGraph aimait l’argent et s’est de suite révélé séduit par les perspectives que la traite d’indigènes, pas encore vraiment réglementée, pouvait offrir. Qui plus est, une année plus tôt, le gouvernement péruvien, bien naïvement, avait donné son feu vert au recrutement de travailleurs océaniens, à condition qu’ils soient volontaires, bien traités et dotés d’un contrat, d’un salaire décent et d’un passage retour. Évidemment, les bateaux péruviens prirent plus que quelques libertés avec ces règles du jeu ; ainsi en 1863 déportèrent-ils plus de mille quatre cents Pascuans. Mais ils ne s’arrêtèrent pas à l’île de Pâques et maraudèrent dans tout le Pacifique à la recherche de bras.
Pour McGrath, il était clair qu’entre les baleines et les esclaves, son choix était fait : ce serait le blackbirding, son expérience sur les mers de la région lui donnant l’avantage de savoir où aller. De fait, avec un équipage composé majoritairement de Néo-Zélandais, McGraph quitta la Tasmanie en affirmant à ses matelots qu’ils entamaient une campagne de chasse à la baleine.
Près des Tonga, le 17 mai 1863, il leur avoua qu’en réalité, ce qui l’intéressait, c’était de capturer un lot d’indigènes de la région pour les revendre sur les côtes de l’Amérique du Sud. Ces détails furent connus dès la fin novembre, dans les colonnes du journal The Melbourne Age, information relayée le 14 décembre 1863 par le journal Invergargill Times de Nouvelle-Zélande qui raconta lui aussi cette sinistre odyssée, récit que le quotidien tenait d’un marin, John Turner : avec sept autres camarades, refusant de se livrer à cette activité, même si, comme l’avait assuré McGraph, “elle était bien plus profitable”, il fut débarqué sur l’île de Niue le 20 mai 1863. Là, surprise, les habitants et le missionnaire W.G. Lawes exigèrent leur réembarquement. Dix jours plus tard, ils furent laissés à Tutuila, aux Samoa où un autre marin, John Bryan, les rejoignit plus tard et témoigna de ce qui s’était passé aux Tonga.
Pour McGrath, il était clair qu’entre les baleines et les esclaves, son choix était fait : ce serait le blackbirding, son expérience sur les mers de la région lui donnant l’avantage de savoir où aller. De fait, avec un équipage composé majoritairement de Néo-Zélandais, McGraph quitta la Tasmanie en affirmant à ses matelots qu’ils entamaient une campagne de chasse à la baleine.
Près des Tonga, le 17 mai 1863, il leur avoua qu’en réalité, ce qui l’intéressait, c’était de capturer un lot d’indigènes de la région pour les revendre sur les côtes de l’Amérique du Sud. Ces détails furent connus dès la fin novembre, dans les colonnes du journal The Melbourne Age, information relayée le 14 décembre 1863 par le journal Invergargill Times de Nouvelle-Zélande qui raconta lui aussi cette sinistre odyssée, récit que le quotidien tenait d’un marin, John Turner : avec sept autres camarades, refusant de se livrer à cette activité, même si, comme l’avait assuré McGraph, “elle était bien plus profitable”, il fut débarqué sur l’île de Niue le 20 mai 1863. Là, surprise, les habitants et le missionnaire W.G. Lawes exigèrent leur réembarquement. Dix jours plus tard, ils furent laissés à Tutuila, aux Samoa où un autre marin, John Bryan, les rejoignit plus tard et témoigna de ce qui s’était passé aux Tonga.
Un bateau étrangement transformé
Sur l’île d’Ata, les seuls mammifères encore présents sont des rongeurs, des rats de l’espèce polynésienne Rattus exulans, sans doute arrivés avec les premiers occupants tongiens.
En 1929, l’anthropologue Edward Gifford eut la chance de recueillir le témoignage de deux habitants d’Ata qui étaient de jeunes enfants au moment de la razzia. Plus récemment, c’est l’historien Scott Hamilton qui a mis en lumière l’épisode ayant endeuillé la petite île de Ata, dans son livre “The Stolen Island : Searching for ‘Ata”.
Une bonne partie de l’équipage du Grecian, bateau de 209 tonneaux et de 27 mètres de long, provenait des îles Chatham, sous administration néo-zélandaise. Sur les vingt-sept marins à bord, treize étaient des Maoris, deux des Portugais, les onze autres étant des Britanniques originaires d’Australie et de Nouvelle-Zélande.
Il convient de noter qu’en Nouvelle-Zélande, McGraph avait fait réaliser des travaux suspects sur son bateau ; il l’avait fait repeindre en noir et blanc, comme un navire de guerre (ce que le Grecian avait été dans le passé, armé alors de six canons) et enfin tout l’entrepont avait été spécialement aménagé pour transporter tout autre chose que des barils d’huile de baleine. Les autorités de Wellington, connaissant McGraph comme baleinier n’avaient pas jugé utile d’ouvrir une enquête sur les transformations étranges faites sur ce navire...
En faisant route en direction des Tonga, le capitaine savait pertinemment qu’il ne pouvait espérer “récolter” des travailleurs en se rendant à Tongatapu, la plus vaste et la plus peuplée des îles de ce royaume indépendant, d’autant qu’à Tongatapu résidait le roi en personne.
En revanche, McGraph connaissait l’existence, cent cinquante kilomètres au sud, de l’ile d’Ata, certes peu accessible du fait de son relief, mais dont la population devait être facile à berner. Parvenu devant Ata, le Grecian mouilla et fit comprendre aux habitants qui avaient observé le navire depuis les hautes falaises qu’ils pouvaient descendre ; ils auraient de la nourriture et des ustensiles variés en échange d’un peu de vivres frais.
Une bonne partie de l’équipage du Grecian, bateau de 209 tonneaux et de 27 mètres de long, provenait des îles Chatham, sous administration néo-zélandaise. Sur les vingt-sept marins à bord, treize étaient des Maoris, deux des Portugais, les onze autres étant des Britanniques originaires d’Australie et de Nouvelle-Zélande.
Il convient de noter qu’en Nouvelle-Zélande, McGraph avait fait réaliser des travaux suspects sur son bateau ; il l’avait fait repeindre en noir et blanc, comme un navire de guerre (ce que le Grecian avait été dans le passé, armé alors de six canons) et enfin tout l’entrepont avait été spécialement aménagé pour transporter tout autre chose que des barils d’huile de baleine. Les autorités de Wellington, connaissant McGraph comme baleinier n’avaient pas jugé utile d’ouvrir une enquête sur les transformations étranges faites sur ce navire...
En faisant route en direction des Tonga, le capitaine savait pertinemment qu’il ne pouvait espérer “récolter” des travailleurs en se rendant à Tongatapu, la plus vaste et la plus peuplée des îles de ce royaume indépendant, d’autant qu’à Tongatapu résidait le roi en personne.
En revanche, McGraph connaissait l’existence, cent cinquante kilomètres au sud, de l’ile d’Ata, certes peu accessible du fait de son relief, mais dont la population devait être facile à berner. Parvenu devant Ata, le Grecian mouilla et fit comprendre aux habitants qui avaient observé le navire depuis les hautes falaises qu’ils pouvaient descendre ; ils auraient de la nourriture et des ustensiles variés en échange d’un peu de vivres frais.
174 indigènes embarqués de force
Ata abrite une très importante colonie de puffins fouquets à queue cunéiforme, de leur nom scientifique Puffinus pacificus.
Il n’en fallait pas plus pour appâter un grand nombre d’habitants d’autant que les témoins sont formels : le chef Paul Vehi, sans doute acheté par McGraph, demanda lui-même à chaque famille de fournir un homme costaud afin d’apporter des vivres au bateau. Il n’y aurait pas de vente à terre, seulement dans l’entrepont : cent-quarante-quatre personnes, de tous âges, entreprirent de se rendre jusqu’au voilier en pirogue ou à la nage. Une fois à bord, on leur expliqua qu’avant tout troc, on allait leur servir un bon repas ; les malheureux furent invités à se rendre dans l’entrepont que McGraph avait aménagé en prison. A peine descendus, l’équipage referma les panneaux et écoutilles donnant accès au pont et le navire leva l’ancre, McGraph se frottant les mains ; l’affaire avait été rondement menée, il n’avait pas perdu de temps et il pouvait ainsi continuer sa chasse à l’homme.
Sur l’identité de ce Vehi qui aurait trahi les siens, il semblerait qu’il soit bien Tongien. Il aurait vécu deux ans à Sydney. Il connaissait donc bien les Européens et savait la valeur de l’argent. Il se prétendit maire élu d’Ata quand une enquête fut diligentée à propos de ce rapt massif.
A-t-il été lui aussi trompé ? A-t-il été l’artisan de cette opération ? Jamais on ne parvint à déterminer avec précision quel fut son rôle exact. Le Grecian se dirigea vers le groupe Lau, aux Fidji. Sur place, il fit chou blanc à Ono i Lau, les Fidjiens n’étant pas tombés de la dernière pluie ; ils venaient d’ailleurs de recevoir la visite de navires négriers péruviens qui, eux aussi, n’avaient pu procéder à aucun recrutement. Mc Graph décida de mettre le cap sur l’île de Niuafo’ou, la plus au nord des Tonga. Là, par la ruse, il parvint à s’emparer d’une trentaine de personnes. Il tenta ensuite sa chance à Uiha, mais les insulaires là encore ne se laissèrent pas berner (voir ci-dessous).
Sur l’identité de ce Vehi qui aurait trahi les siens, il semblerait qu’il soit bien Tongien. Il aurait vécu deux ans à Sydney. Il connaissait donc bien les Européens et savait la valeur de l’argent. Il se prétendit maire élu d’Ata quand une enquête fut diligentée à propos de ce rapt massif.
A-t-il été lui aussi trompé ? A-t-il été l’artisan de cette opération ? Jamais on ne parvint à déterminer avec précision quel fut son rôle exact. Le Grecian se dirigea vers le groupe Lau, aux Fidji. Sur place, il fit chou blanc à Ono i Lau, les Fidjiens n’étant pas tombés de la dernière pluie ; ils venaient d’ailleurs de recevoir la visite de navires négriers péruviens qui, eux aussi, n’avaient pu procéder à aucun recrutement. Mc Graph décida de mettre le cap sur l’île de Niuafo’ou, la plus au nord des Tonga. Là, par la ruse, il parvint à s’emparer d’une trentaine de personnes. Il tenta ensuite sa chance à Uiha, mais les insulaires là encore ne se laissèrent pas berner (voir ci-dessous).
Les Tongiens revendus aux Péruviens
Le 19 juillet, coup de chance pour McGraph : sa route croisa celle d’un navire péruvien, le General Prim, propriété d’Ugarte y Santiago. Il arrivait des îles de Frinately avec cent soixante-quatorze recrues, dont soixante-treize femmes. Frinately serait peut-être la prononciation espagnole de Friendly Islands, désignant les Tonga.
Pour McGraph, livrer sa cargaison à Callao, au Pérou, présentait bien des risques ; il fallait traverser les eaux françaises, hostiles à ce type de trafic et une fois au Pérou, il aurait à justifier de ce commerce, puisque le Grecean ne figurait évidemment pas parmi la liste des navires autorisés à effectuer ces recrutements. Bref, la rencontre avec le General Prim, probablement au large de Pukapuka (l’atoll des îles Cook, pas celui des Tuamotu), fut un énorme coup de chance pour McGraph comme pour le capitaine péruvien, le sieur Olano. Vite fait bien fait, les “passagers” du Grecean, furent transférés sur le General Prim, le bateau de McGraph pouvant tranquillement revenir sur ses pas.
Pour les malheureux habitants razziés d’Ata, le calvaire était loin d’être terminé. De retour à Callao, le General Prim ne put négocier sa “marchandise”, le trafic ayant été interdit en date du 28 avril. Entassés sur les quais dans un entrepôt malsain, peu et mal nourris, laissés sans soin, dans des conditions d’hygiène déplorables, beaucoup de Tongiens tombèrent malades et décédèrent. Finalement, le gouvernement à Lima décida de les renvoyer chez eux en se servant notamment des bateaux des négriers ! Les survivants furent transférés sur l’Adelante. Le navire leva ses ancres le 2 octobre 1863. Depuis le mois de juin 1863, les captifs n’avaient pour ainsi dire pas revu la lumière du jour...
Pour McGraph, livrer sa cargaison à Callao, au Pérou, présentait bien des risques ; il fallait traverser les eaux françaises, hostiles à ce type de trafic et une fois au Pérou, il aurait à justifier de ce commerce, puisque le Grecean ne figurait évidemment pas parmi la liste des navires autorisés à effectuer ces recrutements. Bref, la rencontre avec le General Prim, probablement au large de Pukapuka (l’atoll des îles Cook, pas celui des Tuamotu), fut un énorme coup de chance pour McGraph comme pour le capitaine péruvien, le sieur Olano. Vite fait bien fait, les “passagers” du Grecean, furent transférés sur le General Prim, le bateau de McGraph pouvant tranquillement revenir sur ses pas.
Pour les malheureux habitants razziés d’Ata, le calvaire était loin d’être terminé. De retour à Callao, le General Prim ne put négocier sa “marchandise”, le trafic ayant été interdit en date du 28 avril. Entassés sur les quais dans un entrepôt malsain, peu et mal nourris, laissés sans soin, dans des conditions d’hygiène déplorables, beaucoup de Tongiens tombèrent malades et décédèrent. Finalement, le gouvernement à Lima décida de les renvoyer chez eux en se servant notamment des bateaux des négriers ! Les survivants furent transférés sur l’Adelante. Le navire leva ses ancres le 2 octobre 1863. Depuis le mois de juin 1863, les captifs n’avaient pour ainsi dire pas revu la lumière du jour...
Aucun ne revit Ata...
A bord de l’Adelante, le capitaine Escurra (qui avait lui-même pratiqué le blackbirding peu de temps auparavant) comptait ses sous. Il avait reçu 30 dollars par tête et il voulait éviter la longue traversée du Pacifique. Se laissant porter par le courant de Humbolt, il mit le cap au nord et abandonna les Tongiens et ses autres passagers sur l’île Cocos, au large du Costa Rica. Escurra prétendit que les quatre-cent vingt-six passagers avaient contracté la variole et que pour sauver son équipage, il lui fallait s’en débarrasser.
A bord, on manquait presque de bras pour jeter à la mer les cadavres et finalement, de l’Adelante débarquèrent sur l’île Cocos deux cents personnes seulement qui furent abandonnées sur place, souffrant de la variole et de malnutrition. Ils furent découverts par le baleinier Active le 21 octobre 1863 ; en novembre, un navire de guerre péruvien partit de Tumbes pour les secourir ; il n’en retrouva que trente-huit encore vivants. Ils furent ramenés à Paita où l’on perdit leurs traces ; ils ont été petit à petit intégrés tant bien que mal à la population pauvre locale. Aucun des 144 habitants d’Ata ne revit jamais son île...
A bord, on manquait presque de bras pour jeter à la mer les cadavres et finalement, de l’Adelante débarquèrent sur l’île Cocos deux cents personnes seulement qui furent abandonnées sur place, souffrant de la variole et de malnutrition. Ils furent découverts par le baleinier Active le 21 octobre 1863 ; en novembre, un navire de guerre péruvien partit de Tumbes pour les secourir ; il n’en retrouva que trente-huit encore vivants. Ils furent ramenés à Paita où l’on perdit leurs traces ; ils ont été petit à petit intégrés tant bien que mal à la population pauvre locale. Aucun des 144 habitants d’Ata ne revit jamais son île...
McGraph tranquillement retiré à Tahiti...
La tombe de McGraph au premier niveau du cimetière de l’Uranie. L’herbe avait poussé sur la brisure de la dalle, rendant l’inscription du nom illisible. Mais il repose bien ici, jamais inquiété pour ses activités de blackbirding. En grattant la pierre tombale trouvée au cimetière de l’Uranie, à Papeete, l’identité du “pensionnaire” est apparue : Thomas James MacGrath, à savoir McGraph le négrier.
Les poches pleines, McGraph s’en revint en Australie. Mais pas de chance, il était en indélicatesse avec le fisc et grâce au témoignage de John Turner, qui avait quitté le navire après le rapt d’Ata, l’histoire du Grecian et de McGraph faisait en novembre 1863 la première page du Melbourne Age. Le blackbirder et son équipage jugèrent plus prudent de se faire oublier ; ils se réfugièrent à Rakiura sur l’île Stewart (extrême sud de la Nouvelle-Zélande), espérant ainsi échapper à toute éventuelle poursuite, puis à Bluff, toujours à l’extrême pointe sud de la Nouvelle-Zélande. Le 14 décembre 1863, le journal kiwi Invergargill Times en remettait une couche et finalement, McGraph fut assez vite repéré par les fonctionnaires britanniques à qui il avait des comptes (financiers) à rendre. Il fut arrêté à Bluff et jugé coupable de violation du code des douanes. Il fut également poursuivi par le propriétaire du Grecian qui considérait qu’à partir de 1861, date officielle du départ de son bateau pour une campagne de chasse à la baleine, McGraph n’avait pas respecté ses engagements.
Mais sur le fond de cette sinistre affaire, rien n’indique que la moindre poursuite a été diligentée contre McGraph pour traite d’êtres humains...
Pas vraiment en odeur de sainteté en Australie comme en Nouvelle-Zélande, McGraph reprit “le large” ; c’est si vrai qu’en 1881, le journal de la ville d’Hobart en Tasmanie révéla qu’un baleinier, John McGraph, avait fait route pour Tahiti afin d’y voir son père malade. Le malade en question était bien sûr Thomas McGraph. Quand exactement s’est-il installé à Tahiti ? Nous n’avons pas trouvé trace de son arrivée, mais en revanche, il est clair qu’il y passa de belles années puisque nous avons obtenu son acte de décès à la mairie de Papeete : peut-être pour éviter de se faire repérer par un résident britannique connaissant son passé, à moins que ce ne soit une erreur de l’officier d’état civil, son nom de famille a été semble-t-il légèrement modifié en Thomas James Mac Greath, officiellement décédé le 12 juin 1882 dans sa soixante-septième année, mis en terre sur le premier plateau du cimetière de l’Uranie le lendemain 13 juin.
Grâce à Maui, employé communal au cimetière, nous avons pu nous rendre sur sa tombe, coincée entre deux caveaux de familles bien connues à Tahiti. La pierre tombale a été brisée en deux, peut-être lors de la construction de l’un des deux caveaux jouxtant la petite tombe. Le nom de famille se situant sur la brisure de la dalle n’est pas facile à lire, mais en désherbant et brossant la pierre, nous avons pu mettre au jour ce nom, différent de l’acte de décès, puisque l’on peut lire “Thomas James Mac Grath”. Il y a également une erreur quant à sa naissance, puisque la date de 1816 est gravée sur la pierre alors que le négrier était né en octobre 1815. De même, il n’est pas mort le 13 mais le 12 juin.
Sur son acte de décès figurent les mentions “propriétaire et ancien capitaine au long cours”. Propriétaire de quoi, nous ne le savons pas et nous sommes preneur de toute information à ce sujet...
Quant aux descendants de McGraph, ils demeurent en Tasmanie, là où la femme du capitaine a continué à vivre après l’exil à Tahiti de son mari. Elle est décédée pour sa part en 1891.
Mais sur le fond de cette sinistre affaire, rien n’indique que la moindre poursuite a été diligentée contre McGraph pour traite d’êtres humains...
Pas vraiment en odeur de sainteté en Australie comme en Nouvelle-Zélande, McGraph reprit “le large” ; c’est si vrai qu’en 1881, le journal de la ville d’Hobart en Tasmanie révéla qu’un baleinier, John McGraph, avait fait route pour Tahiti afin d’y voir son père malade. Le malade en question était bien sûr Thomas McGraph. Quand exactement s’est-il installé à Tahiti ? Nous n’avons pas trouvé trace de son arrivée, mais en revanche, il est clair qu’il y passa de belles années puisque nous avons obtenu son acte de décès à la mairie de Papeete : peut-être pour éviter de se faire repérer par un résident britannique connaissant son passé, à moins que ce ne soit une erreur de l’officier d’état civil, son nom de famille a été semble-t-il légèrement modifié en Thomas James Mac Greath, officiellement décédé le 12 juin 1882 dans sa soixante-septième année, mis en terre sur le premier plateau du cimetière de l’Uranie le lendemain 13 juin.
Grâce à Maui, employé communal au cimetière, nous avons pu nous rendre sur sa tombe, coincée entre deux caveaux de familles bien connues à Tahiti. La pierre tombale a été brisée en deux, peut-être lors de la construction de l’un des deux caveaux jouxtant la petite tombe. Le nom de famille se situant sur la brisure de la dalle n’est pas facile à lire, mais en désherbant et brossant la pierre, nous avons pu mettre au jour ce nom, différent de l’acte de décès, puisque l’on peut lire “Thomas James Mac Grath”. Il y a également une erreur quant à sa naissance, puisque la date de 1816 est gravée sur la pierre alors que le négrier était né en octobre 1815. De même, il n’est pas mort le 13 mais le 12 juin.
Sur son acte de décès figurent les mentions “propriétaire et ancien capitaine au long cours”. Propriétaire de quoi, nous ne le savons pas et nous sommes preneur de toute information à ce sujet...
Quant aux descendants de McGraph, ils demeurent en Tasmanie, là où la femme du capitaine a continué à vivre après l’exil à Tahiti de son mari. Elle est décédée pour sa part en 1891.
Tupou 1er fait le ménage
Roi des Tonga, Tupou I fut scandalisé par le rapt de 144 habitants d’Ata. Afin de protéger les rescapés, il leur fit quitter l’île pour les installer dans une zone mieux surveillée.
Lorsque le roi des Tonga, George Tupou 1er, apprit la rafle d’Ata, il entra dans une vive colère contre les trafiquants d’êtres humains, regrettant que ceux-ci profitent de la naïveté de populations très isolées pour leur sombre business. Il envoya au plus vite trois goélettes vers l’île razziée et demanda à la population restante, complètement désemparée car privée de ses bras les plus solides, d’évacuer.
Les survivants furent réinstallés sur l’île d’Eua, proche de Tongatapu, où ils ne risquaient plus rien. Aujourd’hui, les descendants de ces survivants vivent toujours dans le petit village de Ha’atu’a, au sud-est de l’île. Une partie du village est appelée Kolomaile, du nom du village d’Ata où, jusqu’en 1863, vécurent ces Polynésiens. Ils ont souvent émis le vœu de revenir sur leur île d’origine, mais celle-ci, compte tenu de son relief et de ses falaises abruptes, n’offre aucune possibilité de port et encore moins d’aéroport.
Ata, de nos jours, est devenue une réserve d’oiseaux de mer. En effet, entre 1920 et 1941, la Whitney South Sea Expedition, en charge de collecter des spécimens d’oiseaux pour le compte de l’American Museum of Natural History, visita des centaines d’îles dans le vaste Pacifique dont Ata en 1925 pour y faire un premier recensement. Une nouvelle enquête sur ces oiseaux a été conduite plus récemment, en 1990. L’espèce dominante est celle du puffin fouquet, Puffinus pacificus à queue cunéiforme, formant sur place une colonie de plus de vingt mille oiseaux ; malheureusement, un prédateur s’attaque aux œufs, le rat polynésien, Rattus exulans. Quant à l’emplacement du village, il est aujourd’hui recouvert par une forêt.
Les survivants furent réinstallés sur l’île d’Eua, proche de Tongatapu, où ils ne risquaient plus rien. Aujourd’hui, les descendants de ces survivants vivent toujours dans le petit village de Ha’atu’a, au sud-est de l’île. Une partie du village est appelée Kolomaile, du nom du village d’Ata où, jusqu’en 1863, vécurent ces Polynésiens. Ils ont souvent émis le vœu de revenir sur leur île d’origine, mais celle-ci, compte tenu de son relief et de ses falaises abruptes, n’offre aucune possibilité de port et encore moins d’aéroport.
Ata, de nos jours, est devenue une réserve d’oiseaux de mer. En effet, entre 1920 et 1941, la Whitney South Sea Expedition, en charge de collecter des spécimens d’oiseaux pour le compte de l’American Museum of Natural History, visita des centaines d’îles dans le vaste Pacifique dont Ata en 1925 pour y faire un premier recensement. Une nouvelle enquête sur ces oiseaux a été conduite plus récemment, en 1990. L’espèce dominante est celle du puffin fouquet, Puffinus pacificus à queue cunéiforme, formant sur place une colonie de plus de vingt mille oiseaux ; malheureusement, un prédateur s’attaque aux œufs, le rat polynésien, Rattus exulans. Quant à l’emplacement du village, il est aujourd’hui recouvert par une forêt.
La fin du Margarita
Toutes les tentatives de blackbirding n’étaient pas couronnées de succès, tant s’en faut. C’est ainsi qu’aux Tonga toujours, le révérend A.H. Wood a laissé une chronique dans laquelle il explique que des esclavagistes avaient fait escale devant l’île de Uiha. Certains indigènes avaient été attirés puis emprisonnés à bord. Voyant cela, ceux qui étaient restés à terre frappèrent très fort sur une marmite pour prévenir l’équipage qu’ils souhaitaient que les marins reviennent à terre, ce qu’ils firent. Il s’agissait selon toute vraisemblance, de l’équipage du bateau péruvien Margarita.
Un comité d’accueil les reçut ; ils furent tous capturés au terme d’une embuscade et leurs prisonniers libérés. Les Tongiens pillèrent ensuite le navire et d’ailleurs, il reste à Uiha cinq petits canons qui proviendraient de ce voilier. Celui-ci aurait ensuite été coulé. De fait, parti le 26 janvier 1863 de Callao au Pérou, le Margarita ne donna plus jamais signe de vie, sa trace ayant été complètement perdue.
Un comité d’accueil les reçut ; ils furent tous capturés au terme d’une embuscade et leurs prisonniers libérés. Les Tongiens pillèrent ensuite le navire et d’ailleurs, il reste à Uiha cinq petits canons qui proviendraient de ce voilier. Celui-ci aurait ensuite été coulé. De fait, parti le 26 janvier 1863 de Callao au Pérou, le Margarita ne donna plus jamais signe de vie, sa trace ayant été complètement perdue.
A lire
The Stolen Island : Searching for ‘Ata, par Scott Hamilton (BWB Texts, novembre 2016).