Marche pour le climat : "Je pense à ce que je vais laisser à mes enfants"


PAPEETE, le 16 mars 2019. Plus de 500 personnes ont participé ce samedi après-midi à la marche pour le climat pour dénoncer l’inaction des autorités politiques contre le changement climatique et interpeller la population sur la nécessité de changer nos modes de consommation.


« Il n’y a pas de planète B », « Réchauffons nos cœurs, pas notre lagon », « Changeons le système pas le climat », pouvait-on lire sur les pancartes samedi après-midi. Plus de 500 personnes ont répondu à l’appel du collectif citoyen pour la marche pour le climat. « Depuis que je suis maman, j’ai pris conscience de la nécessité de changer nos comportements pour qu’on préserve notre planète », explique Tiare, venue avec ses enfants. « Je pense à leur avenir, à ce que je vais leur laisser ».

Les manifestants sont partis de Tarahoi en direction du stade Willy Bambridge et ont rejoint ensuite de nombreux enfants, dont des scouts, aux jardins de Paofai. Cette marche s’est déroulée dans une ambiance bon enfant en scandant le slogan «  On est plus chauds que le climat ».

Environ 140 organisations, de Greenpeace France à la Fondation Nicolas Hulot, avaient appelé à descendre dans la rue pour le climat, estimant qu'il était "temps de changer de système industriel, politique et économique". Cet appel a été très suivi à travers la France, et donc aussi au fenua.
Les jeunes avaient ouvert le bal vendredi, répondant à l'appel de la jeune Suédoise Greta Thunberg. Ils étaient environ 200 dans les rues de Papeete.

Après la marche samedi, plusieurs citoyens ont pris la parole pour expliquer leur engagement. Nathalie Hoang, lycéenne de 17 ans, qui avait mené la marche des jeunes vendredi matin est d’ailleurs revenue sur la polémique sur les réseaux sociaux après que des pancartes ont été photographiées jetées au sol. « Vous qui osez nous critiquer, pensez-vous que vous en avez la légitimité ? », a-t-elle souligné. « Quoi que vous puissiez penser, nous avons agi pour assurer la survie et l’avenir de l’humanité. Pouvez-vous en dire autant ? (…) Je suis fière de cette jeunesse qui a su se mobiliser, s’unifier. C’est maintenant aux jeunes d’initier le mouvement, de porter les initiatives ou de les créer, de sensibiliser ».
Aucun représentant des autorités politiques n’ait venu à la rencontre des manifestants pour connaître leurs propositions.


Rehia Itchner et sa famille

« On peut créer des bols, des assiettes... avec des matières végétales »

« On est présent avec ma petite famille pour le climat et montrer qu’il y a des alternatives. Il y a des matières végétales avec lesquelles on peut créer des bols, des assiettes... C’est un savoir-faire qu’on a hérité de notre culture mais qui se perd. Avec un peu de bonne volonté on peut le faire. Sur notre stand, on distribue aussi des boutures, des graines… C’est un stand ‘servez-vous’ pour montrer qu’on est tous ensemble. Si les gens veulent bien, on est là pour les aider. C’est un mouvement solidaire. »

Astrid, de l’association L214 Ethique et animaux

« Le lien entre notre assiette et l’écologie »

« Je représente l’association L214 éthique et animaux. Je suis là pour faire le lien entre ce qui est dans notre assiette et l’écologie et la planète. Quand on mange de la viande et des produits d’origine animale. C’est extrêmement nocif pour l’environnement et on ne se rend pas forcément compte. Non seulement, il y a souvent le transport pour faire venir ces produits ici. Mais ces animaux il faut aussi les nourrir. Une vache par exemple mange énormément de céréales et boit énormément d’eau quand elle est en lactation. C’est extrêmement nocif pour l’environnement. Il faut aussi prendre en compte tous les pesticides utilisés pour faire pousser les céréales qui seront mangés par les animaux. Souvent, ce sont des résultats OGM. »

Odette Chevalier, du collectif anti-porcherie industrielle à Taravao

« On a que la terre comme milieu de vie »

« Je suis pour la protection de la nature et contre la pollution. Je suis pour les économies d’énergie. On a que la terre comme milieu de vie. Il faut la protéger. J’ai toujours été sensible à l’environnement. Je suis né à la campagne. On y respectait la nature. J’ai navigué sur un bateau pendant 15 ans. En mer, tu dois respecter la nature. Si tu ne la respectes pas, tu as des problèmes. »


"La planète brûle, nous ne pouvons pas rester dans l’immobilisme"

Environ 200 lycéens et collégiens ont marché pour la défense de l'environnement. Ils ont remis des "propositions" au ministère de l'Environnement. En tête de cortège, il y avait Nathalie Hoang, élève en terminale, 17 ans. Elle nous a expliqué pourquoi elle s'est mobilisée ce vendredi. Elle participe aussi à la marche pour le climat de ce samedi après-midi.


Comment vous avez pris la décision d'organiser cette marche des jeunes?
J’aspire à améliorer le monde depuis mes 3 ans et notamment affirmer mon devoir de citoyenne écologiquement responsable. Il m’est donc apparu évident de prendre position face à l'appel de la suédoise Greta Thunberg, une grève internationale pour le climat, le vendredi 15 mars 2019. Par ailleurs, pourquoi devrions-nous continuer à apprendre pour préparer un futur qui n’existera plus, si nous n’agissons pas maintenant?

Ainsi, en tant que citoyenne du monde, face à l’urgence climatique et planétaire, je considère qu’il est de ma responsabilité d’appeler à agir pour la préservation de notre avenir à travers cette grève. Nous sommes en Polynésie française. Nous devons encore plus être concernés par la transition écologique. En France, la démission de Nicolas Hulot et les explications qu’il en donne sont sans appel : le libéralisme est incompatible avec la prise en compte de l’urgence écologique. Répondre à l’urgence climatique c’est pourtant possible, nécessaire et urgent! Nonobstant, force est de constater que certaines actions citoyennes manquent cruellement d’un soutien politique fort, avec des actions de grande ampleur et de long terme.

Faire la grève aujourd’hui n’est pas un appel aux élèves et étudiants à se déscolariser. Mais démontrer que nous n'avons peut-être pas l'âge de voter. Cependant, on a bel et bien une opinion. Nous ne voulons pas d’un capitalisme vert! La planète brûle, nous ne voulons pas et ne pouvons pas rester dans l’immobilisme.

Dans votre vie quotidienne avez-vous déjà changé des comportements? Comment agissez-vous au quotidien pour l'environnement?
Les scientifiques ont constaté que recycler, éteindre les lumières etc, ne sont plus suffisants. Toutefois, il ne faut pas discréditer ces gestes éco-citoyens, s'ils sont accompagnés d'une réflexion. En effet, avoir un mode de vie en accord avec ses convictions est important. Or, se contenter du même mode de production en la rendant “ plus éco-compatible ” avec le système capitaliste ne va pas rendre les entreprises plus vertueuses.
En 2014, et ce pendant deux années, j’ai utilisé le moteur de recherche Ecosia. Depuis 2016, j’utilise Lilo, qui finance des projets sociaux et environnementaux. Dans cette perspective, j’ai proposé au gouvernement polynésien le projet « Stop Google ! ». Je souhaite mettre en place dans tous les établissements spécialement, une page qui s’ouvrirait automatiquement pour mettre en avant des moteurs de recherche « alternatifs », ayant des objectifs sociaux et/ou environnementaux. Remplacer Google par Lilo, Ecosia, etc.

Quel message souhaiteriez-vous adresser aux générations plus âgées que vous et aux politiques?
Nous devons prendre conscience et faire prendre conscience à chacune et chacun de l'importance de protéger l'environnement, car préserver l'environnement, c'est protéger l'humanité et permettre qu'elle survive. L'humain ne vit pas tout seul et isolé. Il vit dans un environnement dont il est totalement dépendant. Pour assurer la survie et donc l'avenir de l'humanité, il est indispensable de protéger l'environnement aujourd'hui. Le gouvernement nous fait croire qu’ils désirent améliorer notre société. Pourtant, ils refusent d’en modifier les structures sociales! Je vous propose de changer le système et non le climat. A taui te mau fanahao’raa eaha te ‘ahureva!
J’ai pour objectif que nous basculons vers un projet universaliste qui vise à changer les bases de la société. Une idéologie peut-être utopiste et je passe sûrement pour une candide. Nonobstant, elle reflète le plus beau rêve et but, qui puissent exister. Cesser de rêver, serait se condamner à l’immobilisme. Donc, ne craignons pas d’améliorer le monde de la plus belle manière qui soit! Chers citoyen, si vous vous demandez pour quelles raisons il est nécessaire de résister. Alors, demandez-vous tout simplement pourquoi vous vivez si ce n’est guère pour résister!




Rédigé par Mélanie Thomas le Samedi 16 Mars 2019 à 17:27 | Lu 3637 fois