Marche interdite: la Brav-M de nouveau mise en cause pour des violences


Crédit Bertrand GUAY / AFP
Paris, France | AFP | lundi 10/07/2023 - L'interpellation musclée samedi de Youssouf Traoré, à l'issue du rassemblement interdit en mémoire de son frère Adama, et les violences sur une femme et des journalistes ont remis la lumière sur la Brav-M, une unité de police à moto déjà décriée pour son comportement lors du mouvement contre la réforme des retraites.

Le préfet de police Laurent Nuñez, qui avait défendu "l'utilité" de la Brav-M lors de la contestation sociale au printemps, a fait savoir dimanche qu'il "assumait pleinement" les interpellations de Youssouf Traoré et d'un autre membre du Comité Adama, identifié comme Samir.

"Les violences commises contre les forces de l'ordre, survenues en plus dans le contexte d'une manifestation interdite, (sont) intolérables", a poursuivi la préfecture de police.

Youssouf (Yssoufou sur son état civil) Traoré est accusé par la police d'avoir "porté un coup" à une commissaire au début du rassemblement, place de la République.

C'est lors de son interpellation musclée près de la gare de l'Est, au moment de la dispersion des participants dans le calme, qu'une femme et au moins trois journalistes ont été violentés et projetés au sol, selon les images diffusées sur les réseaux sociaux.

Leur dossard, de couleur orange, indique que les policiers mis en cause, casqués et cagoulés pour certains, appartiennent à la 31e compagnie d'intervention de la préfecture de police, en formation Brav-M (Brigade de répression de l'action violente motorisée).

"Jusqu'à ces dernières semaines, on n'avait pas eu tellement de problèmes avec cette compagnie", explique à l'AFP Clément Lanot, qui fait partie des journalistes molestés. En avril et début juillet, il s'était plaint que les policiers de cette unité dirigent leurs lampes vers les caméras pour empêcher les médias de filmer.

Le Schéma national du maintien de l'ordre (SNMO) autorise la presse à filmer la dispersion d'un attroupement s'ils ne "font pas obstacle à l'action des forces de l'ordre". "On était proche mais pas sur leur chemin", se défend Clément Lanot.

"Défauts structurels"

Les Brav-M ont été créées au printemps 2019 lors du mouvement des "gilets jaunes" après le saccage d'une partie des Champs-Élysées, notamment le pillage et l'incendie de la brasserie Le Fouquet's. 

"L'idée était de pouvoir intervenir vite, là où les grosses compagnies ne passent pas ou sont trop lourdes avec leurs kilos de matériel", expliquait en mars à l'AFP le commandant de police Patrick L., qui a participé à sa création. 

"Sur le papier, le concept est pertinent, mais il présente des défauts structurels, comme la vulnérabilité ou le manque de cohésion des unités, qui sont peut être compensés par davantage d'agressivité", analyse un policier de région parisienne.

Par ailleurs, si elles sont formées pour intervenir dans les cortèges ou sécuriser des événements, dit la préfecture de police, les Brav-M remplissent parfois des missions éloignées du maintien de l'ordre, ce qui peut brouiller leurs pratiques sur le terrain.

Une Brav-M était ainsi intervenue en février au Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis), au côté d'une compagnie de sécurisation et d'intervention (CSI), lors de la violente interpellation d'un mineur, accusé d'avoir pris à partie la police après une interpellation pour un refus d'obtempérer.

Le jeune homme de 17 ans avait reçu plusieurs coups de poings au visage, selon une vidéo diffusée par un témoin sur les réseaux sociaux. L'Inspection générale de la police nationale (IGPN) a été saisie de l'enquête.

Les compagnies d'intervention qui composent les Brav-M restent "parmi les unités les plus défendues par l'administration pour tout ce qui concerne les litiges survenus avec des personnes extérieures", estime le policier de région parisienne.

"Le comportement de quelques individus ne doit pas jeter l'opprobre sur toute une unité", avait estimé Laurent Nuñez après l'enregistrement des propos menaçants et humiliants tenus par des policiers de la Brav-M sur de jeunes manifestants en mars à Paris.

Le préfet de police a décidé de renvoyer trois d'entre eux en conseil de discipline et d'en sanctionner quatre autres d'un avertissement, la sanction la plus basse de la fonction publique.

Concernant les violences commises samedi sur les journalistes et la jeune femme, "une enquête administrative a été ouverte immédiatement, afin d'établir avec exactitude les circonstances des faits", a assuré la PP.

le Lundi 10 Juillet 2023 à 06:58 | Lu 316 fois