Malgré la virulence de la pandémie, les masques toujours facultatifs dans la rue au Royaume-Uni


Londres, Royaume-Uni | AFP | mardi 12/01/2021 - Entre les étals du Borough Market, au coeur de Londres, les clients comparent les meules de comté un masque sur le nez. Une scène presque insolite au Royaume-Uni, où le masque reste facultatif dans l'espace public malgré la virulence de la pandémie.

Dans le pays comptant le plus grand nombre de morts du Covid-19 en Europe (82.000) et confronté à un variant considéré comme étant jusqu'à 70% plus contagieux, peu de gens portent un masque dans la rue. Certains rechignent même à le sortir dans les transports en commun ou les magasins, où il a été pourtant rendu obligatoire après de longues hésitations après la première vague.

Le Borough Market, un marché en plein air prisé des touristes et des Londoniens, impose lui le port du masque depuis lundi.

C'est le premier lieu public à le rendre légalement obligatoire, grâce aux règlements spécifiques du marché qui datent d'avant l'ère victorienne. Vendeurs comme clients doivent se couvrir le visage sous peine d'une amende de 50 livres (56 euros).

"Nous tenons à nous assurer que notre marché reste ouvert en toute sécurité", explique à l'AFP Kate Howell, directrice du développement du marché, qui déplore les "messages peu clairs de la part du gouvernement".

Les clients, peu nombreux en ces temps de confinement à déambuler parmi les étals proposant de la viande de chevreuil, des fruits de mer ou des viennoiseries, se plient volontiers à la règle.

Même s'il doute de l'efficacité du masque, Patrick, la cinquantaine, joue le jeu: "C'est très important que notre marché survive car on y trouve des produits que l'on ne peut pas acheter en supermarché", dit-il, après avoir acheté du Langres dans une fromagerie. 

Rassurer les clients 

Graham Teale, propriétaire de The Turkish Deli, porte le masque depuis février et espère que sa généralisation rassurera les amateurs d'olives et de houmous qui fréquentent son commerce logé sous la voie ferrée.

"A l'approche de Noël, il y avait pas mal de groupes de gens qui mangeaient et buvaient de l'alcool dans la rue. beaucoup de nos clients ne se sentaient pas à l'aise et ne voulaient pas venir", raconte-t-il.

Le gouvernement n'est pour l'instant pas favorable à la généralisation du masque à l'extérieur, déjà appliquée en Espagne, Italie et dans de nombreuses villes en France.

Chris Whitty, médecin chef pour l'Angleterre a cependant reconnu lsur la BBC qu'il y avait un "risque" de transmission du virus lorsque les gens font la queue à l'extérieur ou se massent autour d'un étal de marché. "Dans cette situation, il y aurait une certaine logique à penser à mettre un masque".

Mais la consigne reste surtout de limiter les interactions et d'appliquer plus strictement les règles déjà en vigueur après avoir donné la priorité à la pédagogie.

Plusieurs chaînes de supermarchés ont ainsi prévenu qu'elles allaient désormais refuser l'entrée aux clients non masqués.

"Une petite minorité de gens ne respectent pas les règles et cela coûte des vies", a déploré Kit Malthouse, le secrétaire d'Etat chargé de la Sécurité publique, prévenant qu'un durcissement des restrictions était envisagé.

Les scientifiques sont divisés sur l'utilité du masque dans l'espace public.

"Le risque de transmission de l'extérieur est nettement inférieur à celui de l'intérieur", estime Paul Hunter, professeur de médecine à la Norwich School of Medicine. Les masques "ne remplacent pas une bonne distance" entre les individus, et "sont inefficaces s'ils sont mouillés", notamment par la pluie, souligne-t-il.

Julian Tang, virologue à l'université de Leicester, considère pour sa part que les masques ont un rôle à jouer, en particulier en hiver quand l'"air plus froid avec moins de lumière du soleil aide ce coronavirus à survivre en aérosols", ces nuages de particules virales.

Il compare ces aérosols à la fumée d'une cigarette: "si vous faites la queue pour le bus et que quelqu'un fume, même si vous vous tenez à plus de deux mètres, si vous êtes en aval de cette fumée, vous pouvez toujours la sentir", souligne le professeur, recommandant ainsi le port du masque dans les files d'attente.

le Mercredi 13 Janvier 2021 à 06:30 | Lu 510 fois