Makemo : une centaine de personnes présentes pour les 50 ans du premier tir des essais nucléaires


Les enfants de l’atoll se préparent à défiler avec les pancartes. Le point de rendez-vous était donné au phare de l'atoll
MAKEMO, le 04/07/2016 - La section de Makemo de l'association 193 s'est jointe au mouvement lancé par leurs homologues de Papeete. Une centaine de personnes se sont retrouvées devant le phare de l'atoll avant d'entamer une marche pacifique dans le village. D'anciens travailleurs de Mururoa et Fangatau étaient également de la partie.

Des personnes vêtues de rouge avec des brassards noirs, les habitants de Makemo ont bien entendu l'appel de l'association 193. Comme leurs homologues de Papeete, la section de Makemo a organisé une marche pacifique pour commémorer le cinquantenaire du premier tir des essais nucléaires, samedi dernier.

Le rendez-vous était fixé au phare de l'atoll, où une centaine de sympathisants ont pris place avant le début de la marche. Après le discours d'ouverture du président de la section 193 de Makemo, Rodolph Tahutini, le cortège s'est rendu à la mairie.

Parmi ces personnes se trouvaient aussi des anciens travailleurs de Mururoa et de Fangatau venus apporter leur soutien à cette action collective. Chacun à leur tour, est revenu sur cette période qui a bouleversé leur vie. "À l’époque, nous montions les éléments de la bombe nucléaire à Hao, avant de la transporter sur Mururoa. Nous portions des tenues de cosmonautes. On nous disait alors que le dosimètre était tolérable donc on ne s’inquiétait pas", se rappelle Tavaerai, 67 ans, agent de sécurité au centre technique de la Commission de l’Énergie Atomique et aux énergies alternatives, CEA, basé sur l’atoll de Hao, et de poursuivre. "À l’époque les malades étaient transportés à l’hôpital de Vaiami, mais on nous disait que ce n’était pas grave."

"Les essais auraient dû se faire à Makemo", explique Mitu Tangi, 69 ans. "Je suis parti, accompagné d’un Père voir les maires des atolls de Hikueru, et d’autres atolls des Tuamotu pour les convaincre de demander l'arrêt des essais, mais cela n'a pas été facile. À l’époque, on était une dizaine à manifester dans la rue, et on nous traitait de fous. Je suis content de voir aujourd’hui la mobilisation des anciens et de la jeunesse de Makemo."

Rodoph Tahutini, président de l’association 193 de la section de Makemo était témoin aussi des essais nucléaires, de 1990 à 1997. Engagé dans la Marine nationale Française sur le remorqueur ravitailleur Rari, pour sécuriser les lieux. Il a assisté durant son engagement à deux tirs. "Aujourd’hui il faut arrêter de se taire. Il faut que ce point de notre histoire soit enseigné à nos enfants. C’est un devoir de mémoire."

Dans son allocution, le maire de la commune de Makemo, Félix Tokoragi a rappelé l'intitulé de l'association. "Le chiffre 193 fait référence au nombre de tirs réalisés en Polynésie Française", en insistant sur le caractère apolitique de cet événement. "C’est un travail de tous, il n’y a pas de partis politiques dans cette affaire, on a traité de fous les premières personnes qui se sont élevées contre les essais et ses conséquences. Aujourd’hui la population se réunie pour commémorer cette action, il n’y a pas de haine contre la France, il y a juste une demande de reconnaissance. La Polynésie demande la reconnaissance d’un devoir de justice, c’est-à-dire que la France doit quelque chose à la Polynésie en réparation de ces essais. La santé de nos enfants pourrait être touchée. Il faut qu’il y ait un devoir d’enseignement, nous apprenons à nos enfants les différentes guerres mondiales mais rien n’est enseigné sur les essais qui ont eu lieu en Polynésie et plus particulièrement dans les Tuamotu. C’est un devoir de mémoire."

Pour cette commémoration, les membres de la fondation Thyssen-Bornemisza Art Contemporainn (TBA21) de Vienne, en Autriche étaient aussi de la partie. Ils sont en mission à Makemo pour travailler sur le sujet des essais nucléaires en Polynésie.

Une centaine de personnes ont répondu présente. Le cortège s'est rendu à la mairie de Makemo

Parmi les personnes présentes, on retrouve des anciens travailleurs. Mitu témoigne de son expérience

Rédigé par Corinne Tehetia le Lundi 4 Juillet 2016 à 10:09 | Lu 1982 fois