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Mais que deviennent nos déchets ?


Les opérateurs sont placés de part et d’autre du tapis roulant, chacun à la charge de récupérer une catégorie de déchets.
Les opérateurs sont placés de part et d’autre du tapis roulant, chacun à la charge de récupérer une catégorie de déchets.
Papeete, le 6 mars 2018 - Le syndicat Fenua Ma est chargé de la gestion du traitement et du recyclage des déchets de 12 communes de Tahiti (à l’exception de Faa’a) et de Moorea. Chaque jour, des camions bennes déversent sur les différents sites de Fenua Ma des tonnes de déchets. Mais que deviennent donc ces ordures que nous jetons inlassablement dans nos poubelles ? Si certaines finissent leur vie enfouies sous terre à Tahiti, d'autres partent à l'étranger à la recherche d'une seconde jeunesse.

"En moyenne, à Tahiti, chaque personne produit un kilo de déchets par jour, cela fait donc 365 kilos/par an et par habitant. Bien sûr, ce chiffre va varier. Dans les communes urbaines comme Papeete, il faut tabler plutôt sur une moyenne annuelle de 450 kilos par habitant, alors que dans les communes rurales, la moyenne tourne plutôt aux alentours de 280 kilos par an. En métropole, les moyennes sont plus élevées et seraient aux environs de 500 à 550 kilos par habitant et par an", précise Benoît Layrle, directeur de Fenua Ma.

Et si on peut se féliciter de jeter moins de déchets en Polynésie que dans l'Hexagone, les contraintes géographiques font que l'on doit en Polynésie, encore plus qu'ailleurs, traiter nos déchets avec la plus grande attention. C'est au syndicat Fenua Ma que revient la délicate charge de la gestion et du recyclage des déchets de Moorea et des communes de Tahiti, sauf Faa'a qui n'a pas adhéré à la structure. Les entreprises viennent également déposer leurs déchets dans les installations du syndicat.

BAC VERT, BAC GRIS, UN CHOIX CRUCIAL

Benoît Layrle est le directeur de Fenua Ma.
Benoît Layrle est le directeur de Fenua Ma.
Loin d'être anodin, un simple petit geste de la main vers le bac vert ou vers le bac gris et l'avenir de votre déchet va être totalement différent. Si vous l'avez jeté dans le bac gris, il va finir ses jours compacté, écrasé dans l'un des casiers du Centre d'Enfouissement Technique de Paihoro (CET) près de la baie de Phaëton (lire encadré). Il viendra s'ajouter au quelque 160 tonnes quotidiennes de déchets issus des bacs gris collectés par les communes ou des déchets industriels déposés par les entreprises.
Si vous avez choisi de donner à votre déchet une "seconde chance dans la vie", il sera alors envoyé au centre de recyclage et de transfert de Motu Uta (CRT) (lire encadré page suivante) où il sera trié pour être expédié ensuite à l'étranger où il sera recyclé.

Et côté recyclage, il semble selon le directeur de Fenua Ma que nous soyons plutôt consciencieux.
"Au fil des années, le taux d'erreur a baissé, il est seulement de 13,8 % actuellement. Les déchets mis par erreur dans le bac vert sont récupérés à la fin du tapis roulant puis évacués vers le CET de Paihoro. Il faut toutefois rester vigilant et j'appelle vraiment les populations à ne pas jeter certains produits comme les fusées de détresse, cela peut être très dangereux pour nos équipes. J'invite également les gens à ne plus trier les briques alimentaires, c'est une fausse bonne idée, elles sont très complexes à recycler", explique Benoît Layrle, qui reconnaît toutefois que les nombreuses campagnes de sensibilisation au tri sélectif ont commencé à porter leurs fruits.

LES PRODUITS SONT ENVOYES EN NOUVELLE-ZELANDE OU EN ASIE

C'est promis dorénavant, on ne nous y reprendra pas et on fera bien attention à ne plus jeter dans le bac vert une boite en carton de pizza avec quelques morceaux de mozzarella encore collés dessus, car elle ne peut plus être recyclée et va salir les autres produits. La règle d'or pour le bac vert est, comme nous le rappelle le directeur du syndicat "de mettre des déchets propres et secs".
Une fois triés, les produits sont envoyés en Nouvelle-Zélande ou en Asie selon leur nature. La famille des cartons-papiers représente environ 80 % des produits recyclés, les bouteilles en plastique 10 %, les boites de conserve 9% et les cannettes en aluminium représentent 1%. Ils seront ensuite transformés en livre, en boites d'œufs, en toboggan en plastique ou encore les cannettes en aluminium termineront en trottinette !

D'autres déchets comme les produits toxiques sont également exportés, car ils sont interdits sur le territoire. Contrairement aux autres déchets, le coût financier de ce type de produit est pris en charge non pas par les communes, mais par le Pays pour un montant oscillant entre 200 à 300 millions par an.
: Chaque catégorie de déchets est compactée en balles de 300 à 600 kg.
: Chaque catégorie de déchets est compactée en balles de 300 à 600 kg.

LES PILES SONT ENVOYEES EN FRANCE

Les piles récoltées dans les 172 bornes installées dans les commerces, les administrations, etc. sont ensuite expédiées en métropole. " La France arrive à recycler entre 60 % à 70 % des piles, alors que la Nouvelle-Zélande les enfouit sous terre. Nous avons donc privilégié ce choix plus écologique", explique Benoît Layrle.

Quant aux autres déchets toxiques, comme les batteries ou l'huile de vidange, Fenua Ma a installé différents bacs dans les stations-services, une fois récoltés, ils sont ensuite expédiés en Nouvelle-Zélande pour y être recyclés.

Au total, pour l'année 2017, Fenua Ma a traité 66 668 tonnes de déchets toutes catégories confondues. Avant la crise économique, un pic avait été atteint avec plus de 85 000 tonnes en 2007. "La crise a fait baisser le tonnage de déchets. Depuis, les chiffres sont stables autour de 65 à 66 000 tonnes par an. Les entreprises ont pris conscience qu'une meilleure gestion de leurs déchets leur faisait faire des économies", conclut le directeur de Fenua Ma.

Mais n'oublions pas que le meilleur déchet est celui que l'on ne produit pas !

Les déchets sont acheminés par bateau de Moorea

À Moorea, une station de transfert située à Temae a également été créée pour permettre le conditionnement et le transport des déchets ménagers et industriels vers les unités de traitement situées à Tahiti. Elle comporte une zone de transfert et une zone de déchetterie. Les déchets sont ensuite transportés par bateau.

Le Centre d’Enfouissement technique traite entre 50 000 et 60 0000 tonnes de déchets chaque année

Mis en service en mai 2000, le CET de Paihoro est conçu pour accueillir dix casiers étanches de catégorie 2. Sa durée de vie devrait s’étendre jusqu’à 2025. Le CET traite entre 50 000 et 60 0000 tonnes de déchets chaque année, soit une moyenne de 160 tonnes par jour. Les déchets sont déversés dans un casier étanche puis compactés à l’aide d’un engin spécialisé, de manière à réduire leur volume et pour minimiser les odeurs et la prolifération de rongeurs et d’insectes. Chaque casier est ensuite fermé de manière hermétiquement et doit être surveillé pendant 15 ans. Depuis 2008, une torchère a été installée pour brûler le biogaz produit par la fermentation des déchets et réduire les odeurs. Des études sont en cours pour la valorisation de ce biogaz.

Chaque camion est pesé.
Chaque camion est pesé.
Le Centre de recyclage et de transfert de Motu Uta

Le Centre de recyclage et de transfert (CRT) a été mis en service en mars 2000. Depuis sa création, plus de 70 000 tonnes de déchets collectés dans les bacs verts ont transité par ce centre moderne, avant d’être exportés vers l’Asie et la Nouvelle-Zélande pour recyclage.
Les déchets comme les papiers, canettes, bouteilles plastiques, cartons sont traités, compactés en balles de 250 à 600 kg. En 2017, 4 728 tonnes de déchets issus du bac vert ont été traités et envoyées vers les filières de recyclage.
Le centre de Motu Uta reçoit également les bacs gris des communes de Pirae, Arue, Papeete et Mahina puis ils sont ensuite expédiés au Centre d’Enfouissement technique (CET) pour y être enfouis.

La station de la Punaruu

La station de la Punaruu accueille tous les déchets des communes de Punaauia et de Paea, soit près de 10 000 tonnes par an. Elle a été mise en place afin de limiter les déplacements des camions des communes vers le Centre d’enfouissement technique (CET ) de Paihoro ou le Centre de recyclage et de transfert (CRT) de Motu Uta.

Qui paye ? Combien ça coûte ?

Les communes ont compétence en matière de collecte et de gestion des ordures ménagères. C'est donc à elles de prendre en charge le coût financier des déchets. Concrètement, les camions de chaque commune vont être systématiquement pesés lors de leur entrée et sortie dans les sites. Un bon de pesée indiquant le nombre de kilos déposés est établi. Fenua Ma va ensuite facturer à la commune la somme des bons dûs.
Le système fonctionne pour les communes sur une clé de répartition qui amène le bac gris à 17 500 francs, les déchets inertes à 10 000 francs (ferraille, gravat…) et les bacs verts et le verre à 7 500 francs la tonne.
Fenua Ma va facturer également les entreprises qui amènent leurs déchets dans les installations du syndicat :
• une tonne de bac vert au prix de 7500 francs
• une tonne de bac gris au prix de 16500 francs
• une tonne de mono-matériau (exemple seulement du carton) au prix de 5000 francs.
Ce système va donc récompenser les entreprises qui trient bien leurs déchets.

Le Pays prend financièrement en charge les produits toxiques.

Petits conseils pratiques

Que faire de sa vieille télé ou de son vieil ordi ?
Ce sont des déchets, dits d'équipements électriques et électroniques, ils représentent un danger pour la population, il ne faut donc pas les laisser trainer au milieu des poubelles classiques.
Vous pouvez les déposer sans rendez-vous le mercredi de 13h30 à 15h30 au siège de Fenua Ma ou sur rendez-vous à un autre moment.
Il vous en coûtera 160 francs/kg pour un ordinateur ou une télévision et seulement 90 francs/kg pour ce type de produit mais sans écran.
Tél : 40 54 34 50
Immeuble Paofai en face de la Maison de la culture.

Que faire de ses encombrants ?
Chaque commune est compétente. Le plus simple est d'appeler les services techniques de la mairie de votre commune qui vous donneront le planning des collectes des encombrants.
A Moorea, il existe une déchetterie, située à Temae et exploitée depuis 2007. Les habitants de l'île sœur peuvent y déposer leurs déchets encombrants ou recyclables. Deux gardiens se tiennent à leur disposition pour les orienter. Ils peuvent y jeter : les encombrants inertes (ferraille, plastique, polystyrène et pneu), les recyclables (papiers, cartons, boîtes de conserve, canettes en aluminium, bouteille en plastique) et le verre.
Il n'existe pas de déchetterie à Tahiti sur les 12 communes du syndicat. Fenua Ma réfléchit à installer une déchetterie pour 20 000 habitants et tous les 15 minutes de roulage à Tahiti. Deux modèles de déchetteries pourraient être envisagées, une déchetterie "classique" du même style que celle de Moorea, ou une mini déchetterie de plain-pied avec une dalle clôturée et des heures d'ouverture limitées avec du personnel de la communes pour réduire les coûts.
La difficulté d'installer des déchetteries réside dans le fait que les communes rurales et éloignées ont un poste de dépense moindre pour les encombrants. Cela constituerait pour elles un surcoût. Il faut donc trouver une clé de répartition.

le Mardi 6 Mars 2018 à 08:43 | Lu 4480 fois