Maeva Kelly cultive son avenir


Maeva Kelly a trouvé le secteur d’activité dans lequel elle aimerait évoluer professionnellement (Crédit : Anne-Charlotte Lehartel).
Tahiti, le 25 juin 2024 – Courageuse et volontaire, Maeva Kelly, âgée de 19 ans, fait partie de la vingtaine de bénéficiaires de l’Institut médico-professionnel (IMPro) de Taravao. Son handicap ne l’empêche pas d’avoir des projets professionnels : actuellement en stage dans une grande exploitation agricole à Afaahiti, elle espère pouvoir en faire son métier. 
 
Malgré la pluie, Maeva Kelly a accepté d’accomplir la tâche qui lui a été confiée ce jour-là : mettre en terre des jeunes plants de pota. Pour sa troisième et dernière semaine de stage sur l’exploitation de Nelson Wan Kam, au plateau de Afaahiti, la jeune femme de 19 ans est visiblement dans son élément. “J’ai fait plusieurs stages : dans une garderie, dans un magasin et ici, dans un fa’a’apu. Je plante et je fais la cueillette, jusqu’au nettoyage et à la vente. J’ai aussi travaillé dans les tiare taina. Ce stage me plaît beaucoup ! J’ai appris de nouvelles choses. Je me sens à l’aise dans la nature. J’aime travailler seule, mais si j’ai besoin d’aide ou de conseils, je demande. J’aimerais bien en faire mon métier”, nous a-t-elle confié avec timidité, mais assurance.
 
Maeva Kelly fait partie de la vingtaine de jeunes âgés de 14 à 20 ans intégrés à la filière professionnelle (IMPro) de l’Institut d’insertion médicoéducatif (IIME) Tamaru Arii de Taravao. Neuf d’entre eux sont actuellement en stage grâce à des entreprises partenaires qui accueillent et forment jusqu’à deux jeunes à la fois sur quatre demi-journées par semaine.
 

Passer le cap de l’embauche


L’étape suivante, pour Maeva Kelly et ses camarades, c’est de décrocher un contrat à plus long terme. “À 20 ans, ils quittent l’IIME, donc notre objectif, idéalement, c’est de faire en sorte qu’ils soient insérés professionnellement dans le domaine de leur choix”, souligne Hinamoerani Handerson, chargée d’insertion à l’IIME de Taravao. “On pense au dispositif SITH pris en charge par le Service de l’emploi sur six mois renouvelables. Mais quand il s’agit d’embaucher, toutes les entreprises ne jouent pas le jeu. Certaines préfèrent payer une amende plutôt que d’embaucher des travailleurs handicapés”, constate la référente.
 
Le suivi s’étend au-delà des murs de l’institut, comme nous l’a expliqué Philéa Putoa, responsable du service de suite et de liaison sociale. “C’est un service qui a été rouvert très récemment. Je m’occupe des jeunes de 20 ans sortis de l’IIME, en lien avec les responsables éducatifs, les parents et les jeunes eux-mêmes, pour la cohérence du projet professionnel. Je vois comment ils peuvent être accompagnés avec les associations, les différentes instances et les aides qui existent pour réaliser leur projet.” Un accompagnement qui s’étend, par exemple, de la reconnaissance en tant que travailleur handicapé aux enjeux en termes de mobilité. Philéa Putoa n’avance pas de chiffres, mais dresse un constat : “Pour les personnes dites normales, c’est déjà difficile de trouver un travail, donc pour une personne en situation de handicap, c’est encore plus compliqué.”
 

Hinamoerani Handerson, chargée d’insertion : “Acquérir de l’expérience”

“L’IIME de Taravao est le seul site à avoir un IMPro. On essaie de leur faire faire un maximum de stages dans les domaines qu’ils maîtrisent ou vers lesquels ils veulent s’orienter. Nous avons une vingtaine d’entreprises partenaires dans le commerce, l’agriculture, le tourisme, l’impression textile, la transformation agro-alimentaire, etc. On aimerait aussi pouvoir leur proposer le secteur du bâtiment ou de la sécurité, car certains jeunes sont demandeurs, mais nous ne travaillons pas encore ces domaines à l’IIME. L’objectif, c’est de mettre en pratique ce qu’ils ont appris avec les éducateurs. Ils apprennent de nouvelles choses et acquièrent de l’expérience, qu’ils peuvent ajouter sur leur CV avec les institutrices.”

Pierre Maehaga, responsable d’exploitation : “Donner une chance à ces jeunes”

“On lui confie des tâches qui ne sont pas trop dures pour elle, en tant que stagiaire. Ça lui permet de découvrir le métier à grande échelle. On lui a appris à préparer la terre, à planter des légumes, à entretenir le fa’a’apu de taina, etc. Je suis content d’avoir ces stagiaires. C’est une façon de donner une chance à ces jeunes. Handicap ou pas, peu importe, on accepte les jeunes qui veulent apprendre à travailler. Maeva est courageuse et appliquée. L’agriculture, ce n’est pas un métier facile, mais elle n’a pas lâché.”

Rédigé par Anne-Charlotte Lehartel le Mardi 25 Juin 2024 à 16:19 | Lu 3029 fois