Macron ratisse à droite en voulant sanctionner les familles, la gauche dénonce


Crédit Denis Charlet / AFP
Paris, France | AFP | mardi 04/07/2023 - Face aux émeutes qui ont embrasé la France, Emmanuel Macron envisage de "sanctionner financièrement" les familles, "une sorte de tarif minimum dès la première connerie" commise par leur enfant, reprenant ainsi une proposition récurrente à droite et qui indigne à gauche.

"Il faudrait qu'à la première infraction, on arrive à sanctionner financièrement et facilement les familles, une sorte de tarif minimum dès la première connerie", a glissé le chef de l'Etat à des policiers auxquels il a rendu visite dans la nuit de lundi à mardi.

Déjà vendredi, en plein cœur des nuits de violences en réaction à la mort mardi à Nanterre de Nahel 17 ans, tué par un policier, il en avait appelé à "la responsabilité des parents" pour "garder au domicile" les mineurs, qui composent une bonne partie des émeutiers.

"La République n'a pas vocation à se substituer à eux", avait-il insisté. Lundi soir, alors que les violences marquaient une accalmie, il a souhaité agir "au cas par cas" et "pas forcément" en passant par des suspensions d'allocations familiales.

La suspension des allocations familiales pour les parents de mineurs absentéistes scolaires, votée en 2010 sous Nicolas Sarkozy, à l'initiative de l'actuel président de LR Eric Ciotti, avait été abrogée sous François Hollande. 

Mardi, le député des Alpes-Maritimes a appelé à remettre au goût du jour sa loi, en annonçant qu'il la redéposerait sur le bureau de l'Assemblée nationale. "Chiche", a-t-il lancé au gouvernement, l'exhortant à faire examiner son texte avant le 14 juillet.

En visite au commissariat de Nanterre, le président du Rassemblement national Jordan Bardella a embrayé en demandant la suspension des prestations sociales "aux parents de mineurs récidivistes".

Quelques collectivités, dont la ville de Valence dirigée par Nicolas Daragon (LR), ont adopté des sanctions financières contre les familles de mineurs faisant l'objet d'un "rappel à l'ordre ou d'une condamnation pour trouble à l'ordre public", les privant d'aides sociales.

Dans une circulaire adressée vendredi aux parquets, le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti rappelle que "chaque fois que des parents seront en capacité d'exercer leur autorité parentale et qu'ils ne le feront pas, il y a une responsabilité pénale (qu'il) souhaite mettre en œuvre". Les peines encourues: deux ans de prison, 30.000 euros d'amende.

"idées simplistes"

"Une sanction immédiate chaque fois qu'il y a un dérapage ? La réponse est oui", a abondé sur LCI le président du Modem François Bayrou, proche d'Emmanuel Macron, pour qui "évidemment, lorsqu'il s'agit de jeunes enfants, la sanction s'adresse aux familles". 

Mais il s'est inquiété d'une réponse unique consistant à "priver (les mères) d'une partie des revenus minimum". 

"Des jeunes qui sortent du droit chemin il y en a dans tous les milieux", a insisté mardi la députée socialiste Christine Pires Beaune. "Le gouvernement pointe du doigt d'autres responsables mais ne s'interroge pas sur ses propres responsabilités", a aussi estimé le communiste Pierre Dharréville.

La députée écologiste de Nanterre, Sabrina Sebaihi, a dénoncé un "discours uniquement répressif et sécuritaire du gouvernement". 

"Nous faisons très attention à ces idées simplistes" sur une sanction des parents, a déclaré le président des députés Liot (groupe indépendant) Bertrand Pancher. Il a appelé comme d'autres à remettre sur le métier le plan Borloo sur les banlieues, enterré par Emmanuel Macron en 2018.

Interrogé sur France 2, Ali Rabeh (Génération.s), le maire de Trappes (Yvelines), a reproché à M. Macron un discours "cynique". Il a rappelé que la population des quartiers était très largement composée de "familles monoparentales: une maman qui travaille en horaires décalés chez Carrefour et qui n'est pas là au moment où son enfant sort du collège et traîne dans la rue, elle est toute seule à bosser pour essayer de remplir le frigo". 

Les policiers rencontrés par M. Macron lundi n'ont pas non plus encouragé cette idée d'en appeler aux parents. "Mais les gamins, ils écoutent qui alors ?", a-t-il demandé dans l'échange relaté dans le Journal Le Parisien. "Les dealers, Monsieur le président, c'est d'ailleurs eux qui commencent à leur demander de se calmer depuis deux jours, parce que tout ce bazar, c'est en train de donner du tort à leur business". 

le Mardi 4 Juillet 2023 à 05:20 | Lu 497 fois