Livre : les revers amers des "Cartes postales" de Chantal Spitz


Chantal Spitz présentait son dernier livre, mercredi après-midi chez son éditeur Au vent des Îles. Le recueil de nouvelles "Cartes postales" (85 pages) paru dans la collection littérature du Pacifique est en vente à 1500 Fcfp.
PAPEETE, le 5 novembre 2015. Quatre ans après la sortie de son dernier livre, l'auteur polynésienne publie un recueil de sept nouvelles chez l'éditeur Au Vent des Îles qui plongent le lecteur dans la découverte de l'envers du décor tahitien. Derrière les cartes postales : des espoirs déçus, des amours perdus et des gueules cassées. La vraie vie…

Sept courts récits ramassés sur une écriture épurée de tous artifices. Pas de chapitre, pas de virgule, pas de points et une mise en page des textes qui impose son rythme, son souffle quitte à dérouter le lecteur. Entrer dans ces "Cartes Postales" de Chantal T. Spitz c'est comme soulever un voile de mariée et découvrir derrière le tulle immaculé, le visage fatigué d'une vieille femme, ridée et usée par le poids des ans. Regarder les yeux dans les yeux ce que l'on veut nous taire, c'est sans doute le fil conducteur de Chantal T. Spitz au travers de ces sept courtes histoires. Des tranches de vie (et de mort aussi) qui ne peuvent pas laisser le lecteur indifférent.

On y croise les pauvres hères de tous les jours : une pute et son mac, une mère de famille trop fertile qui troque son dernier enfant contre un frigo américain, une femme trompée, une autre battue, un mari cogneur. Des gens que l'on croise tous les jours dans les rues de Papeete mais dont on ne veut rien savoir, dont on veut jusqu'à ignorer l'existence pour ne garder que les couleurs vives des cartes postales. "Moi c'est avec ces gens là que je vis au quotidien et je voulais parler d'eux. J'aime bien les gens un peu cabossés, ils sont plus intéressants que ceux qui ont tout et réussissent" explique Chantal Spitz. Elle a des mots vrais pour parler de l'adoption fa'amu: "Pourquoi toujours enrober ces adoptions de bons sentiments ? Il faut dire ce que c'est vraiment : une transaction".

Alors, oui, ces cartes postales sont d'une grande rudesse, allant même jusqu'au glauque, jusqu'au trash : on y pratique le sexe mais pas l'amour, on y vit au jour le jour. Certains lecteurs y retrouveront, revisité par l'auteur, un fait-divers sordide : le double meurtre à Papeete au début des années 2000 d'une masseuse (et plus si affinités) et son copain (son mac), assassinés par un client. Dans les mots de Chantal Spitz, ce double assassinat devient l'expression d'humiliations vexatoires chez un homme fou de désir. Le paradis tahitien transformé en enfer.

Fallait-il que l'auteur écrive toutes ces vilaines choses sur Tahiti ? Son texte va-t-il faire fuir les touristes ? Elle ne se pose même pas la question. "J'écris parce que j'ai juste besoin d'écrire. Egoïstement. Je ne pense pas au lecteur". Mais, si ces portraits de gueules cassées peuvent faire réfléchir les uns et les autres sur ce qui se passe vraiment dans ce décor de cartes postales, sur la grisaille des destins qui se démènent à l'arrière des couleurs vives du papier glacé, alors cette écriture épurée au scalpel n'aura été ni vaine, ni uniquement égoïste.

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Dédicaces

Chantal Spitz dédicace son livre "Cartes Postales" ce vendredi 6 novembre de 14 heures à 17 heures à la librairie Klima, place de la Cathédrale. Un rendez-vous privilégié avec l'auteur. Un autre rendez-vous est programmé durant le Salon du livre, le samedi 21 novembre de 9h45 à 10h15 pour une présentation du recueil de nouvelles animée par Titaua Porcher.

Rédigé par Mireille Loubet le Jeudi 5 Novembre 2015 à 17:11 | Lu 2791 fois