Tahiti, le 12 novembre 2019 - L'Université de la Polynésie française organise jusqu'à jeudi un colloque consacré aux "violences familiales et au changement social dans les sociétés insulaires du Pacifique." L'occasion de comparer la situation du fenua par rapport à ses voisins.
Des chercheurs tahitiens, hawaiiens, néo-zélandais et américains sont réunis sur le campus de l'Université de la Polynésie française (UPF) jusqu'à jeudi pour un colloque internationale consacré aux "violences familiales et au changement social dans les sociétés insulaires du Pacifique." Ils exposeront ainsi leurs travaux menés sur différents territoires du Pacifique tels que le Vanuatu, la Nouvelle-Zélande ou encore la Papouasie Nouvelle-Guinée.
"Les violences intrafamiliales ne se cantonnent pas à la Polynésie française. On est parti de l'idée qu'en comparant les différentes situations on arrivera à montrer des similitudes et des différences qui vont nous permettre de déterminer les facteurs qui provoquent et qui entretiennent la violence sur notre territoire", explique le sociologue Loïs Bastide, qui est avec son collègue Denis Regnier à l'initiative de ce colloque.
Les chiffres révélés lors du dernier Grenelle des violences conjugales organisé le mois dernier sont en effet alarmants. L'année dernière, trois femmes et un homme sont morts en Polynésie à cause de violences conjugales. Avec 917 victimes de violences conjugales en 2018, il y a toujours deux fois plus de violences dans les ménages Polynésiens qu'en métropole. Cette année, déjà deux femmes sont tombées sous les coups de leur tāne, et selon le procureur, les cas de violence sont encore en hausse.
Des chercheurs tahitiens, hawaiiens, néo-zélandais et américains sont réunis sur le campus de l'Université de la Polynésie française (UPF) jusqu'à jeudi pour un colloque internationale consacré aux "violences familiales et au changement social dans les sociétés insulaires du Pacifique." Ils exposeront ainsi leurs travaux menés sur différents territoires du Pacifique tels que le Vanuatu, la Nouvelle-Zélande ou encore la Papouasie Nouvelle-Guinée.
"Les violences intrafamiliales ne se cantonnent pas à la Polynésie française. On est parti de l'idée qu'en comparant les différentes situations on arrivera à montrer des similitudes et des différences qui vont nous permettre de déterminer les facteurs qui provoquent et qui entretiennent la violence sur notre territoire", explique le sociologue Loïs Bastide, qui est avec son collègue Denis Regnier à l'initiative de ce colloque.
Les chiffres révélés lors du dernier Grenelle des violences conjugales organisé le mois dernier sont en effet alarmants. L'année dernière, trois femmes et un homme sont morts en Polynésie à cause de violences conjugales. Avec 917 victimes de violences conjugales en 2018, il y a toujours deux fois plus de violences dans les ménages Polynésiens qu'en métropole. Cette année, déjà deux femmes sont tombées sous les coups de leur tāne, et selon le procureur, les cas de violence sont encore en hausse.
LA SCIENCE AU SERVICE DES POLITIQUES PUBLIQUES
Pour mieux comprendre et appréhender les phénomènes de violences au fenua, Loïs Bastide et Denis Regnier mènent depuis plus d'un an une étude sur le terrain. "C'est un sujet sensible sur lequel on ne peut pas mener d'observations", atteste le premier. "On mène donc des entretiens, même si les gens ont du mal à en parler. Pour trouver des personnes on a lancé des appels au public. Souvent elles sont déjà dans une démarche de remédiation et de volonté de sortie de cette violence. Sinon on est beaucoup passé par des associations du type Te Torea, ou par les refuges qui accueillent les femmes et les familles qui font face à ce type de difficultés."
Au-delà de l'intérêt scientifique, le but de cette étude est d'offrir aux pouvoirs publics des données plus précises dans le but de lutter contre ce véritable fléau.
"En termes de politique publique beaucoup de choses sont déjà faites sur le terrain. Il y a énormément d'acteurs qui sont déjà impliqués et qui mènent des actions. Mais l'une des principales difficultés que l'on a aujourd'hui c'est le manque de recherche sur cette thématique. Par conséquent ils travaillent sans avoir les éléments de compréhension qui leur permettraient d'être plus efficaces dans l'action publique. Très vraisemblablement les violences familiales sont encore des problèmes sous-évalués en termes de chiffre", affirme Loïs Bastide.
Au-delà de l'intérêt scientifique, le but de cette étude est d'offrir aux pouvoirs publics des données plus précises dans le but de lutter contre ce véritable fléau.
"En termes de politique publique beaucoup de choses sont déjà faites sur le terrain. Il y a énormément d'acteurs qui sont déjà impliqués et qui mènent des actions. Mais l'une des principales difficultés que l'on a aujourd'hui c'est le manque de recherche sur cette thématique. Par conséquent ils travaillent sans avoir les éléments de compréhension qui leur permettraient d'être plus efficaces dans l'action publique. Très vraisemblablement les violences familiales sont encore des problèmes sous-évalués en termes de chiffre", affirme Loïs Bastide.
INTERVIEW
Loïs Bastide, sociologue
"Les violences familiales sont encore des problèmes sous-évalués"
Pourquoi organiser un colloque sur les violences familiales en lien avec d'autres îles du Pacifique ?
Les violences intrafamiliales ne se cantonnent pas à la Polynésie française. On est parti de l'idée qu'en comparant les différentes situations on arrivera à montrer des similitudes et des différences qui vont nous permettre de déterminer les facteurs qui provoquent et qui entretiennent la violence sur notre territoire.
Vous disiez que vous étiez en train de mener une étude sur les violences intrafamiliales en Polynésie. Où en êtes-vous aujourd'hui et comment procédez-vous pour la mener ?
On mène cette étude avec mon collègue depuis le printemps 2018. Ce qui est assez innovant c'est que l'on regarde les violences familiales au sens large. D'habitude on s'intéresse plus aux violences dans les couples ou les violences faites aux enfants. On sait qu'au sein des familles il y a des dynamiques très compliquées avec très souvent des situations de violence qui se cumulent entre différentes personnes. C'est un sujet sensible sur lequel on ne peut pas mener d'observations. On mène donc des entretiens, même si les gens ont du mal à en parler. Pour trouver des personnes on a lancé des appels au public. Nous avons trouvé des personnes et souvent elles sont déjà dans une démarche de remédiation et de volonté de sortie de cette violence. Sinon on est beaucoup passé par des associations du type Te Torea, ou par les refuges qui accueillent les femmes et les familles qui font face à ce type de difficultés.
Par rapport aux autres îles du Pacifique, la Polynésie française est-elle plus touchée par les violences familiales ?
Par rapport à la Nouvelle-Calédonie les chiffres de la violence familiale en Polynésie française sont plus importants, mais ce n'est pas très significatif. Par contre les chiffres sont beaucoup plus élevés que dans les autres territoires d'Outre-Mer.
Cela fait plus d'un an que vous travaillez sur le sujet. Qu'avez-vous découvert de nouveau ?
L'idée était déjà d'écarter l'explication culturelle pour tous ces phénomènes de violence. Et puis il y a déjà plusieurs facteurs qui sont plus ou moins identifiés. Je pense notamment à la co-résidence des familles, où plusieurs couples habitent sous le même toit. On pense que c'est plus difficile de continuer à vivre de cette manière dans un contexte d'économie de marché. Et puis il y a beaucoup de conflits autour des terres qui provoquent des conflits au sein des familles.
Comment cette étude peut-elle être utile pour les pouvoirs publics ?
En termes de politique publique beaucoup de choses sont déjà faite sur les terrains. Il y a énormément d'acteurs qui sont déjà impliqués et qui mènent des actions. Mais l'une des principales difficultés que l'on a aujourd'hui c'est le manque de recherche sur cette thématique. Par conséquent ils travaillent sans avoir les éléments de compréhension qui leur permettraient d'être plus efficaces dans l'action publique. Très vraisemblablement les violences familiales sont encore des problèmes sous-évalués en termes de chiffres. D'où l'intérêt de cette étude.
"Les violences familiales sont encore des problèmes sous-évalués"
Pourquoi organiser un colloque sur les violences familiales en lien avec d'autres îles du Pacifique ?
Les violences intrafamiliales ne se cantonnent pas à la Polynésie française. On est parti de l'idée qu'en comparant les différentes situations on arrivera à montrer des similitudes et des différences qui vont nous permettre de déterminer les facteurs qui provoquent et qui entretiennent la violence sur notre territoire.
Vous disiez que vous étiez en train de mener une étude sur les violences intrafamiliales en Polynésie. Où en êtes-vous aujourd'hui et comment procédez-vous pour la mener ?
On mène cette étude avec mon collègue depuis le printemps 2018. Ce qui est assez innovant c'est que l'on regarde les violences familiales au sens large. D'habitude on s'intéresse plus aux violences dans les couples ou les violences faites aux enfants. On sait qu'au sein des familles il y a des dynamiques très compliquées avec très souvent des situations de violence qui se cumulent entre différentes personnes. C'est un sujet sensible sur lequel on ne peut pas mener d'observations. On mène donc des entretiens, même si les gens ont du mal à en parler. Pour trouver des personnes on a lancé des appels au public. Nous avons trouvé des personnes et souvent elles sont déjà dans une démarche de remédiation et de volonté de sortie de cette violence. Sinon on est beaucoup passé par des associations du type Te Torea, ou par les refuges qui accueillent les femmes et les familles qui font face à ce type de difficultés.
Par rapport aux autres îles du Pacifique, la Polynésie française est-elle plus touchée par les violences familiales ?
Par rapport à la Nouvelle-Calédonie les chiffres de la violence familiale en Polynésie française sont plus importants, mais ce n'est pas très significatif. Par contre les chiffres sont beaucoup plus élevés que dans les autres territoires d'Outre-Mer.
Cela fait plus d'un an que vous travaillez sur le sujet. Qu'avez-vous découvert de nouveau ?
L'idée était déjà d'écarter l'explication culturelle pour tous ces phénomènes de violence. Et puis il y a déjà plusieurs facteurs qui sont plus ou moins identifiés. Je pense notamment à la co-résidence des familles, où plusieurs couples habitent sous le même toit. On pense que c'est plus difficile de continuer à vivre de cette manière dans un contexte d'économie de marché. Et puis il y a beaucoup de conflits autour des terres qui provoquent des conflits au sein des familles.
Comment cette étude peut-elle être utile pour les pouvoirs publics ?
En termes de politique publique beaucoup de choses sont déjà faite sur les terrains. Il y a énormément d'acteurs qui sont déjà impliqués et qui mènent des actions. Mais l'une des principales difficultés que l'on a aujourd'hui c'est le manque de recherche sur cette thématique. Par conséquent ils travaillent sans avoir les éléments de compréhension qui leur permettraient d'être plus efficaces dans l'action publique. Très vraisemblablement les violences familiales sont encore des problèmes sous-évalués en termes de chiffres. D'où l'intérêt de cette étude.