Crédit photo: Michel Bègue
PAPEETE, le 4 juillet 2015 - Ailleurs, et notamment autour de l'Australie ou de l’île de la Réunion, les attaques de requins sont légion. En Polynésie elles sont rares, voire inexistantes. Nicolas Buray, spécialiste de l’animal, privilégie même le terme de "morsure". Pour lui, la situation serait avant tout une histoire d’espèces.
Deux nouvelles attaques de requins sont survenues dans les eaux australiennes jeudi dernier. Les 11 et 14 juin une attaque était observée dans une station balnéaire de Caroline du nord. Trois adolescents étaient retrouvés blessés en l’espace de quelques jours à quelques kilomètres de distance. Début mai, un homme d’une cinquantaine d’année mourrait des suites d’une attaque de squale près de l’îlot Kouaré en Nouvelle-Calédonie. Á la Réunion, les squales font parler d’eux tous les mois ou presque. Depuis 2011, ce département de l’Océan Indien a recensé 17 attaques de requins dont 7 mortelles. Les "pro" et les "anti" se font la guerre. Les uns réclament la tête des bêtes, d’autres les acceptent arguant que les mers ne sont pas la propriété de l’Homme.
En Polynésie en revanche, les attaques sont rares, voire inexistantes à en croire Nicolas Buray, spécialiste des requins, diplômé de l’École pratique des hautes études et créateur de l’observatoire des requins de Polynésie (ORP). "Je crois qu’il faut bien faire la différence entre morsure et attaque. Les morsures sont provoquées directement ou indirectement par l’homme, c’est par exemple un chasseur sous-marin qui garde son poisson près de lui ou un pêcheur qui vide son poisson les pieds dans l’eau. C’est ce qui arrive en Polynésie. Les attaques surviennent lorsque le requin a faim, qu’il considère l’homme comme sa proie, ou bien lorsqu’il défend son territoire." Il n’y a pas disons de "provocation" par l’homme. À l’Île de la Réunion, les requins attaquent. En Polynésie lorsque les requins font parler d'eux, ils "mordent".
ESPÈCES ET TERRITOIRE
L’Île de la Réunion et la Polynésie française sont quasiment sur la même latitude. En revanche, ils ne sont pas sur la même longitude. Pas moins de 15 000 kilomètres les séparent. Difficile donc de les comparer. Pour autant, certaines hypothèses permettraient d’expliquer les différences observées entre les deux territoires. "D’abord ce ne sont pas les mêmes espèces," avance Nicolas Buray. "À la Réunion, il y a des requins Bouledogues, les C. leucas. Cette espèce est coupable avec les grands blancs et, dans une moindre mesure, les requins tigres, de 3/4 des attaques mortelles dans le monde."
Le requin Bouledogue est une espèce qui vit dans des milieux variés. Surnommé aussi le requin du Gange ou le requin du Zambèze, il se sent à l’aise dans les eaux peu salées, voire douce, dans les eaux turbides, etc. Il a pris ses marques autour de l’Île de la Réunion où l’eau n’est pas très claire à cause des rejets des nombreuses ravines et donc où l’espace était relativement libre. En Polynésie, les eaux sont très claires, de nombreuses espèces de requins y sont installées. Mais cela ne suffit pas à expliquer les attaques.
D’autres hypothèses, propres au département français de l’Océan indien, sont avancées pour expliquer les attaques : la surpêche de la région qui pousserait les squales à chercher leur nourriture plus près des côtés, la pollution et l’urbanisation, la présence d’une réserve naturelle marine (créée en 2007) devenue un véritable garde-manger pour les requins. Des hypothèses auxquelles n’adhère pas Nicolas Burray. À ce propos, il rappelle "qu’en Polynésie les requins sont protégés depuis 2006, ce qui n’a pas eu d’influence sur le nombre d’attaques".
EAUX TROUBLES ET ÉTAT D’ESPRIT
La présence du requin Bouledogue est anecdotique en Polynésie française, le requin blanc ne s’aventure pas dans nos eaux. Le requin tigre en revanche s’y plaît. Du moins revient-il au fenua ces dernières années. "Le tigre migre sans que l’on sache vraiment où, ni quand. Ce qui est sûr c’est qu’il s’est fait rare de 2000 à 2010", explique Nicolas Buray. Pourquoi n’attaque-t-il pas ? Peut-être grâce à la visibilité des eaux polynésiennes. Lorsqu’il remonte en surface pour chasser, qu’il suit une proie, le requin a plus de risque de confondre un poisson et un surfeur par exemple quand les eaux sont troubles.
Enfin, dernier point, ce qui distingue l’Île de la Réunion et la Polynésie, c’est l’esprit. Avec tout le respect que l’on doit aux familles et aux proches des disparus, "les Réunionnais, à l’image des occidentaux, cherchent à tout prix et en n’importe quelle circonstance un responsable", avance Nicolas Buray. Pour lui, "chercher les coupables en cas d’attaque de requin, c’est comme chercher un responsable lorsqu’une avalanche cause la mort de skieurs hors piste !"
www.requinsdepolynesie.com
Deux nouvelles attaques de requins sont survenues dans les eaux australiennes jeudi dernier. Les 11 et 14 juin une attaque était observée dans une station balnéaire de Caroline du nord. Trois adolescents étaient retrouvés blessés en l’espace de quelques jours à quelques kilomètres de distance. Début mai, un homme d’une cinquantaine d’année mourrait des suites d’une attaque de squale près de l’îlot Kouaré en Nouvelle-Calédonie. Á la Réunion, les squales font parler d’eux tous les mois ou presque. Depuis 2011, ce département de l’Océan Indien a recensé 17 attaques de requins dont 7 mortelles. Les "pro" et les "anti" se font la guerre. Les uns réclament la tête des bêtes, d’autres les acceptent arguant que les mers ne sont pas la propriété de l’Homme.
En Polynésie en revanche, les attaques sont rares, voire inexistantes à en croire Nicolas Buray, spécialiste des requins, diplômé de l’École pratique des hautes études et créateur de l’observatoire des requins de Polynésie (ORP). "Je crois qu’il faut bien faire la différence entre morsure et attaque. Les morsures sont provoquées directement ou indirectement par l’homme, c’est par exemple un chasseur sous-marin qui garde son poisson près de lui ou un pêcheur qui vide son poisson les pieds dans l’eau. C’est ce qui arrive en Polynésie. Les attaques surviennent lorsque le requin a faim, qu’il considère l’homme comme sa proie, ou bien lorsqu’il défend son territoire." Il n’y a pas disons de "provocation" par l’homme. À l’Île de la Réunion, les requins attaquent. En Polynésie lorsque les requins font parler d'eux, ils "mordent".
ESPÈCES ET TERRITOIRE
L’Île de la Réunion et la Polynésie française sont quasiment sur la même latitude. En revanche, ils ne sont pas sur la même longitude. Pas moins de 15 000 kilomètres les séparent. Difficile donc de les comparer. Pour autant, certaines hypothèses permettraient d’expliquer les différences observées entre les deux territoires. "D’abord ce ne sont pas les mêmes espèces," avance Nicolas Buray. "À la Réunion, il y a des requins Bouledogues, les C. leucas. Cette espèce est coupable avec les grands blancs et, dans une moindre mesure, les requins tigres, de 3/4 des attaques mortelles dans le monde."
Le requin Bouledogue est une espèce qui vit dans des milieux variés. Surnommé aussi le requin du Gange ou le requin du Zambèze, il se sent à l’aise dans les eaux peu salées, voire douce, dans les eaux turbides, etc. Il a pris ses marques autour de l’Île de la Réunion où l’eau n’est pas très claire à cause des rejets des nombreuses ravines et donc où l’espace était relativement libre. En Polynésie, les eaux sont très claires, de nombreuses espèces de requins y sont installées. Mais cela ne suffit pas à expliquer les attaques.
D’autres hypothèses, propres au département français de l’Océan indien, sont avancées pour expliquer les attaques : la surpêche de la région qui pousserait les squales à chercher leur nourriture plus près des côtés, la pollution et l’urbanisation, la présence d’une réserve naturelle marine (créée en 2007) devenue un véritable garde-manger pour les requins. Des hypothèses auxquelles n’adhère pas Nicolas Burray. À ce propos, il rappelle "qu’en Polynésie les requins sont protégés depuis 2006, ce qui n’a pas eu d’influence sur le nombre d’attaques".
EAUX TROUBLES ET ÉTAT D’ESPRIT
La présence du requin Bouledogue est anecdotique en Polynésie française, le requin blanc ne s’aventure pas dans nos eaux. Le requin tigre en revanche s’y plaît. Du moins revient-il au fenua ces dernières années. "Le tigre migre sans que l’on sache vraiment où, ni quand. Ce qui est sûr c’est qu’il s’est fait rare de 2000 à 2010", explique Nicolas Buray. Pourquoi n’attaque-t-il pas ? Peut-être grâce à la visibilité des eaux polynésiennes. Lorsqu’il remonte en surface pour chasser, qu’il suit une proie, le requin a plus de risque de confondre un poisson et un surfeur par exemple quand les eaux sont troubles.
Enfin, dernier point, ce qui distingue l’Île de la Réunion et la Polynésie, c’est l’esprit. Avec tout le respect que l’on doit aux familles et aux proches des disparus, "les Réunionnais, à l’image des occidentaux, cherchent à tout prix et en n’importe quelle circonstance un responsable", avance Nicolas Buray. Pour lui, "chercher les coupables en cas d’attaque de requin, c’est comme chercher un responsable lorsqu’une avalanche cause la mort de skieurs hors piste !"
www.requinsdepolynesie.com
Repérer les "attaques" de requins
Sous l’eau les requins adoptent des postures significatives avant d’attaquer. Les plongeurs et chasseurs sous-marins qui en ont l’habitude le savent bien. Toutes les espèces vont baisser leurs nageoires pectorales. Le requin gris, quand il considère que l’homme a pénétré son territoire, va entreprendre une "nage d’exhibition" caractéristique : "il contorsionne son corps", précise Nicolas Buray qui ajoute que "chaque individu ensuite a un comportement et une façon de réagir bien à lui. À Rangiroa en mai, l’accident eu lieu avec un requin bien connu des pêcheurs".
Sous l’eau les requins adoptent des postures significatives avant d’attaquer. Les plongeurs et chasseurs sous-marins qui en ont l’habitude le savent bien. Toutes les espèces vont baisser leurs nageoires pectorales. Le requin gris, quand il considère que l’homme a pénétré son territoire, va entreprendre une "nage d’exhibition" caractéristique : "il contorsionne son corps", précise Nicolas Buray qui ajoute que "chaque individu ensuite a un comportement et une façon de réagir bien à lui. À Rangiroa en mai, l’accident eu lieu avec un requin bien connu des pêcheurs".
Historique des accidents en Polynésie
Le 25 mai un jeune pêcheur a été mordu au bras à Rangiroa par un requin gris alors qu’il pêchait dans la passe Avatoru.
Le 16 mars un enfant a été mordu par un requin pointe noire à Bora bora lors d’une excursion lagonaire. Il s’est mis à l’eau avec un morceau de poisson dans la main.
Le 9 mars un enfant de 18 mois a été mordu à la jambe par un requin Pointe noire sur l’atoll de Hikueru alors que sa mère vidait des poissons à ses côtés.
Le 11 septembre 2014, une touriste américaine a été mordue par un requin Pointe noire à Moorea alors qu’elle s’était mise à l’eau avec un morceau de poisson sur le banc de sable du lagon Tiahura.
Le 9 février 2013, un plongeur s’est fait mordre la main par un requin citron à Bora bora, un comportement inhabituel selon les spécialistes
Le 25 mai un jeune pêcheur a été mordu au bras à Rangiroa par un requin gris alors qu’il pêchait dans la passe Avatoru.
Le 16 mars un enfant a été mordu par un requin pointe noire à Bora bora lors d’une excursion lagonaire. Il s’est mis à l’eau avec un morceau de poisson dans la main.
Le 9 mars un enfant de 18 mois a été mordu à la jambe par un requin Pointe noire sur l’atoll de Hikueru alors que sa mère vidait des poissons à ses côtés.
Le 11 septembre 2014, une touriste américaine a été mordue par un requin Pointe noire à Moorea alors qu’elle s’était mise à l’eau avec un morceau de poisson sur le banc de sable du lagon Tiahura.
Le 9 février 2013, un plongeur s’est fait mordre la main par un requin citron à Bora bora, un comportement inhabituel selon les spécialistes
Nicolas Buray est spécialiste des requin. Diplômé de l’École pratique des hautes études, il est le créateur de l’observatoire des requins de Polynésie (ORP).