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Les petits pêcheurs refusent l'installation d'un "mouchard" embarqué


Les bonitiers et poti marara pourraient devoir installer un "mouchard" à bord, pour justifier de leur déplacements.
Les bonitiers et poti marara pourraient devoir installer un "mouchard" à bord, pour justifier de leur déplacements.
PAPEETE, 18 janvier 2018 - Le gouvernement a décidé de rendre obligatoire l’installation d’un système de suivi des déplacements à bord des poti marara et poti auhopu (bonitiers) sous convention. Le syndicat des pêcheurs menace d’organiser un blocage du port de Papeete.

Le motif exposé par le Pays est de permettre un meilleur contrôle des allées et venues des petits pêcheurs professionnels bénéficiant du régime d’aide sur les carburants. Car, précise le compte rendu du Conseil des ministres de mercredi, "les bénéficiaires ne sont tenus, à ce jour, qu’à une déclaration régulière de leur activité et de leurs captures. Or, force est de constater que la DRMM (Direction des ressources maritimes et minières, ndlr) est dans l’incapacité de valider la véracité de ces déclarations et que de nombreux abus, avec notamment l’utilisation frauduleuse de carburant détaxé à d’autres fins, sont régulièrement rapportés sans qu’il soit possible de confirmer et sanctionner ces infractions".

Aussi, le Conseil des ministres a-t-il décidé mercredi de rendre obligatoire l’équipement d’un système de déclaration automatique de leur position, pour les navires de pêche armés en 3ème et 4ème catégorie et titulaires d’une licence de pêche. Cette obligation existe déjà depuis 2012 pour les navires armés en 1ère et 2ème catégorie (thoniers et navires au long cours).

Bien qu'une enveloppe de 30 millions Fcfp ait été créée et inscrite au Contrat de projets pour l’acquisition et l’installation des balises par la DRMM, cette nouvelle obligation réglementaire doit encore est publiée au Journal officiel pour être rendue applicable.

Les pêcheurs "pas d’accord"

En attendant, pour les petits pêcheurs professionnels, cette perspective est dure à avaler. "Si le traceur fait également office de balise de détresse, ça pourrait passer parce que ça nous permettrait une économie", explique Jaros Otcenasek, le président du syndicat des pêcheurs professionnel polynésiens, qui revendique le soutient de "100 % des bonitiers et 95 % des poti marara" soit près de 500 professionnels. "Sinon, ce n’est rien d’autre que de l’espionnage et nous ne sommes pas d’accord". Le président du syndicat des pêcheurs dénonce également une "mesure hypocrite" de la part du Pays, s’il s’agit de mieux gérer la consommation de carburant aidé : "Que toutes les voitures de fonction de l’administration soient équipées de ces traceurs aussi !", lance-t-il : "Que croyez-vous qu’ils font le week-end ? Nous, on paye notre carburant ; eux ils roulent aux frais du contribuable". Il dénonce aussi l’attribution de "licences de pêche de convenance", "afin de permettre aux copains, aux coquins et aux requins de bénéficier du carburant aidé pour leurs activité de plaisance. Il faut le dire aussi ! On ne respectera pas cette obligation. Elle ne sert qu’à attaquer les petits qui travaillent honnêtement".

En cas d’officialisation de cette obligation d’installation d'un traceur à bord, e syndicat menace de bloquer l'entrée du port de Papeete. "Je n’aime pas ce mot « blocage » : on ira tous pêcher dans la passe de Papeete, c'est tout", ironise Jaros Otcenasek. "Pourquoi voulez-vous que nous allions loin alors qu’il y a du poisson là-bas aussi ?"

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Mercredi 18 Janvier 2017 à 16:05 | Lu 8452 fois