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Les dispositifs de défiscalisation toujours menacés


«Cette réforme prévoit le maintien de droit d’une défiscalisation mieux encadrée : pour les PME dont le chiffre d’affaires est inférieur à 20 millions d’euros ; dans le secteur du logement social ; dans les collectivités qui jouissent d’une autonomie fiscale ». Victorin Lurel, ministre des outre-mer à l’Assemblée nationale à la fin du mois d’octobre 2013.
«Cette réforme prévoit le maintien de droit d’une défiscalisation mieux encadrée : pour les PME dont le chiffre d’affaires est inférieur à 20 millions d’euros ; dans le secteur du logement social ; dans les collectivités qui jouissent d’une autonomie fiscale ». Victorin Lurel, ministre des outre-mer à l’Assemblée nationale à la fin du mois d’octobre 2013.
PAPEETE, lundi 17 février 2014. La Cour des comptes ne s’est pas privée, la semaine dernière, lors de la publication de son rapport annuel 2014, de s’en prendre, au système de la défiscalisation des investissements qui perdure en outremer. Depuis quelques années, les attaques sur ce dispositif sont nombreuses. La défiscalisation coûte cher et rogne grassement sur des recettes fiscales dont l’Etat aurait bien besoin. En 2012, la Cour des comptes notait à propos des programmes de défiscalisation dits Girardin que «la dépense fiscale ne bénéficie pas à l’outre-mer. Destinée à rendre attractive la réduction d’impôt, cette part profite aux seuls contribuables bénéficiaires de l’avantage fiscal». Dans son rapport 2014, ciblé sur le tourisme, la Cour des comptes indique que ces dispositifs «ont également contribué à la création d’hôtels souvent construits pour la défiscalisation et déconnectés des besoins réels des territoires ». Conséquence logique, la Cour des comptes préconise tout simplement de « supprimer les défiscalisations Girardin en faveur des investissements productifs et de les remplacer par d’autres modes d’intervention, moins coûteux pour le budget de l’État, et plus efficaces».


Face à ces profondes critiques, les patrons ultramarins, eux, n’ont eu de cesse de défendre le dispositif. La Fedom (Fédération des entreprises outremer) sera justement reçue au ministère des outre-mer la semaine prochaine. En novembre 2013, lors des discussions à l’Assemblée nationale pour la Loi de finances 2014, la défiscalisation échappait grâce à la mobilisation de la Fedom, une fois encore, au couperet final. Mais le système était, une fois de plus, réformé avec l’introduction d’un crédit d’impôt «attractif, soit un avantage à l’exploitant supérieur à la défiscalisation» classique indiquait le ministreVictorin Lurel lors d’un débat, fin octobre. Une disposition, plus avantageuse pour l’exploitant, qui ne s’appliquera pas en Polynésie française où la fiscalité est très différente de celle des DOM et, où la validité de ce crédit d’impôt aurait été nulle. Un régime spécifique reste donc en place pour les collectivités qui jouissent d’une autonomie fiscale. Jusqu’à quand ? C’est bien la question. Le système du crédit d’impôt sera expérimenté en 2014 et 2015 et soumis à une évaluation en 2016, mais il présente déjà un avantage non négligeable du point de vue de l’Etat : «sur des dépenses fiscales de plus de un milliard d’euros, entre 250 et 300 millions d’euros sont perdus. Or si nous pouvons garantir la même attractivité sans ces pertes, tout le monde en bénéficierait » concluait Victorin Lurel. Tout le monde, sauf les territoires autonomes.

En Polynésie la «défisc» manque de repères

Problème souligné par ses opposants : il est quasi impossible de mesurer l’impact de la défiscalisation sur le développement économique d’un territoire. Un argument qui est particulièrement vrai en Polynésie française. Les patrons eux-mêmes admettent leur ignorance du nombre de dossiers de défiscalisation déposés, acceptés ainsi que le montant total annuel de ces investissements défiscalisés injectés dans l’économie locale. «Chaque entreprise monte son dossier en utilisant le canal de sociétés spécialisées mais il n’y a pas de guichet unique, donc nous ne connaissons pas les chiffres exacts » admet Luc Tapeta le président du Medef en Polynésie qui estime que ce travail pourrait toutefois être effectué prochainement via la commission économique du syndicat des patrons. Pour défendre la défiscalisation, avoir des arguments chiffrés serait effectivement plus productif.

En attendant, les seuls chiffres disponibles à ce sujet sont ceux publiés via le Haut commissariat et qui commencent à dater. En 2009, le montant des investissements acceptés via le Bureau des agréments de la Direction des finances publiques s’élevait à 11,7 milliards de Fcfp. Par ailleurs, en 2010, les services du Haut commissariat avaient instruit 44 dossiers relatifs à des projets d’investissement totalisant 26,4 milliards de Fcfp. Les principaux secteurs d’activité concernés étaient les énergies, les télécommunications, la construction de logements, le tourisme nautique et l’hôtellerie.

Rédigé par Mireille Loubet le Lundi 17 Février 2014 à 18:51 | Lu 1432 fois