Les deux jeunes ont rédigé la plainte contre l'ex-Premier ministre Edouard Philippe et le ministre de la Santé Olivier Véran en 48 heures (photo d'archives).
Paris, France | AFP | jeudi 17/09/2020 - Ils sont étudiants, médecins, proches de victimes du coronavirus: de "simples citoyens" se tournent vers la Cour de justice de la République (CJR) pour demander des comptes aux ministres pour leur gestion jugée "incohérente" de la crise sanitaire.
"On peut venir de nulle part et porter un message puissant envers les gouvernants", se félicite Stefano Di Panfilo, étudiant de 21 ans à Sciences Po Grenoble. Le 15 mars, il était assesseur pour le premier tour des municipales dans son village de Montgenèvre, dans les Hautes-Alpes, non loin de la frontière italienne.
"J'ai vu des assesseurs, des personnes âgées sans masque, puis une soixantaine de personnes arriver pour les résultats sans protection. C'était une salle fermée. Deux jours après, la France était confinée", raconte le jeune homme, qui était candidat sans étiquette aux élections. "Pourquoi le gouvernement s'est-il entêté à maintenir le premier tour des élections?", s'interroge encore l'étudiant.
Face à "l'incohérence des mesures" prises au sommet de l'Etat, il a réfléchi avec un ami à "une action d'envergure". Ils avaient en tête l'affaire du sang contaminé, pour laquelle trois ministres ont été jugés, en 1999, par la Cour de justice de la République (CJR), seule instance habilitée en France à juger des actes commis par des membres du gouvernement dans l'exercice de leurs fonctions.
Les deux jeunes ont rédigé la plainte contre l'ex-Premier ministre Edouard Philippe et le ministre de la Santé Olivier Véran en 48 heures. Stefano Di Panfilo a mobilisé ses souvenirs de stage dans un cabinet d'avocats. La CJR a enregistré le 23 mars cette plainte, suivie de nombreuses autres: depuis le début de l'épidémie qui a fait quelque 31.000 morts en France, la Cour a reçu quelque 90 plaintes contre des ministres. Jeudi, le collectif Victimes Coronavirus France, qui réunit 200 personnes, a visé Jean Castex.
La CJR a jusqu'ici jugé neuf plaintes recevables. Outre celle de Stefano Di Panfilo, il y a la plainte contre huit membres du gouvernement déposée par les deux enfants d'un homme décédé le 25 mars du coronavirus. Ils leur reprochent notamment "l'absence d'application des recommandations de l'OMS". Un couple de personnes âgées a lui déposé plainte fin mai après avoir "vécu dans la crainte sans protection et sans masques" alors que la femme était atteinte par le Covid-19.
"Qu'ils viennent s'expliquer"
Des médecins se sont aussi tournés vers la CJR. "Que les ministres reconnaissent qu'ils se sont trompés!", s'exclame Ludovic Toro, docteur généraliste et maire UDI de Coubron (Seine-Saint-Denis). "Fin février, pour les médecins généralistes, c'était déjà la galère. On voyait les gens arriver avec des symptômes et on n'avait pas de masque! (...) Des médecins sont décédés", dénonce-t-il.
"Ils disaient: + Les masques, ça ne sert à rien +! (...) Mensonge! Qu'ils arrêtent de nous prendre pour des enfants. La confiance, ça se gagne", s'emporte le médecin. Pour Ludovic Toro, s'en prendre au ministre de la Santé, "c'est un symbole". "Mais je ne cherche pas des condamnations. Ce que je veux, c'est une santé publique efficace", précise-t-il.
De nombreux prisonniers ont également entamé des recours pour dénoncer leurs conditions de détention, dans des cellules surpeuplées alors que l'épidémie se propageait dans le pays. Leurs plaintes n'ont pas été retenues, contrairement à celle de la CGT-pénitentiaire. Les surveillants "ont été mis en danger", dénonce le secrétaire général, Christopher Dorangeville. "Ce n'est que le 31 mars que nos collègues en contact avec les détenus ont été autorisés à porter un masque", explique-t-il.
Pourquoi avoir opté pour la CJR et non le Conseil d'Etat, comme l'ont fait d'autres syndicats ? "La CJR, c'est plus symbolique: on porte plainte contre le gouvernement. Car les noms des coupables, on les a!", lâche-t-il.
Les auditions des plaignants ont démarré début septembre. Stéfano Di Panfilo a été reçu par une juge d'instruction "très bienveillante", mais il n'oublie pas que la Cour est "assez contestée". La CJR, qualifiée de juridiction d'exception, a suscité de nombreuses critiques notamment pour la clémence de ses arrêts, délivrés par douze parlementaires et trois magistrats professionnels. Malgré cela, l'étudiant "espère un procès, pour que les ministres viennent s'expliquer".
"On peut venir de nulle part et porter un message puissant envers les gouvernants", se félicite Stefano Di Panfilo, étudiant de 21 ans à Sciences Po Grenoble. Le 15 mars, il était assesseur pour le premier tour des municipales dans son village de Montgenèvre, dans les Hautes-Alpes, non loin de la frontière italienne.
"J'ai vu des assesseurs, des personnes âgées sans masque, puis une soixantaine de personnes arriver pour les résultats sans protection. C'était une salle fermée. Deux jours après, la France était confinée", raconte le jeune homme, qui était candidat sans étiquette aux élections. "Pourquoi le gouvernement s'est-il entêté à maintenir le premier tour des élections?", s'interroge encore l'étudiant.
Face à "l'incohérence des mesures" prises au sommet de l'Etat, il a réfléchi avec un ami à "une action d'envergure". Ils avaient en tête l'affaire du sang contaminé, pour laquelle trois ministres ont été jugés, en 1999, par la Cour de justice de la République (CJR), seule instance habilitée en France à juger des actes commis par des membres du gouvernement dans l'exercice de leurs fonctions.
Les deux jeunes ont rédigé la plainte contre l'ex-Premier ministre Edouard Philippe et le ministre de la Santé Olivier Véran en 48 heures. Stefano Di Panfilo a mobilisé ses souvenirs de stage dans un cabinet d'avocats. La CJR a enregistré le 23 mars cette plainte, suivie de nombreuses autres: depuis le début de l'épidémie qui a fait quelque 31.000 morts en France, la Cour a reçu quelque 90 plaintes contre des ministres. Jeudi, le collectif Victimes Coronavirus France, qui réunit 200 personnes, a visé Jean Castex.
La CJR a jusqu'ici jugé neuf plaintes recevables. Outre celle de Stefano Di Panfilo, il y a la plainte contre huit membres du gouvernement déposée par les deux enfants d'un homme décédé le 25 mars du coronavirus. Ils leur reprochent notamment "l'absence d'application des recommandations de l'OMS". Un couple de personnes âgées a lui déposé plainte fin mai après avoir "vécu dans la crainte sans protection et sans masques" alors que la femme était atteinte par le Covid-19.
"Qu'ils viennent s'expliquer"
Des médecins se sont aussi tournés vers la CJR. "Que les ministres reconnaissent qu'ils se sont trompés!", s'exclame Ludovic Toro, docteur généraliste et maire UDI de Coubron (Seine-Saint-Denis). "Fin février, pour les médecins généralistes, c'était déjà la galère. On voyait les gens arriver avec des symptômes et on n'avait pas de masque! (...) Des médecins sont décédés", dénonce-t-il.
"Ils disaient: + Les masques, ça ne sert à rien +! (...) Mensonge! Qu'ils arrêtent de nous prendre pour des enfants. La confiance, ça se gagne", s'emporte le médecin. Pour Ludovic Toro, s'en prendre au ministre de la Santé, "c'est un symbole". "Mais je ne cherche pas des condamnations. Ce que je veux, c'est une santé publique efficace", précise-t-il.
De nombreux prisonniers ont également entamé des recours pour dénoncer leurs conditions de détention, dans des cellules surpeuplées alors que l'épidémie se propageait dans le pays. Leurs plaintes n'ont pas été retenues, contrairement à celle de la CGT-pénitentiaire. Les surveillants "ont été mis en danger", dénonce le secrétaire général, Christopher Dorangeville. "Ce n'est que le 31 mars que nos collègues en contact avec les détenus ont été autorisés à porter un masque", explique-t-il.
Pourquoi avoir opté pour la CJR et non le Conseil d'Etat, comme l'ont fait d'autres syndicats ? "La CJR, c'est plus symbolique: on porte plainte contre le gouvernement. Car les noms des coupables, on les a!", lâche-t-il.
Les auditions des plaignants ont démarré début septembre. Stéfano Di Panfilo a été reçu par une juge d'instruction "très bienveillante", mais il n'oublie pas que la Cour est "assez contestée". La CJR, qualifiée de juridiction d'exception, a suscité de nombreuses critiques notamment pour la clémence de ses arrêts, délivrés par douze parlementaires et trois magistrats professionnels. Malgré cela, l'étudiant "espère un procès, pour que les ministres viennent s'expliquer".