Cet escargot blanc plus petit qu'une pièce de 10 Fcfp a résisté à l'invasion d'un terrible prédateur. Son secret est l'objet d'une enquête scientifique très high tech... (Un Partula hyalina dans la vallée Matatia. Photo : Trevor Coote)
PAPEETE, le 29 juillet 2016 - Il y a 60 ans, la Polynésie était un paradis pour gastéropodes. Nos îles comptaient un très grand nombre d'escargots endémiques... Mais la plupart ont été exterminés en quelques années après l'arrivée d'espèces invasives, et les survivants sont mal en point. Avec une exception, un petit escargot blanc qui semble avoir trouvé la parade pour survivre : se mettre au soleil.
Chez les humains, beaucoup sont prêts à se battre pour une place au soleil. Chez les escargots par contre, c'est l'inverse : les places de choix sont à l'ombre et bien humides. Sauf qu'un monstre cannibale rode dans les coins sombres des forêts tahitiennes… Sa belle coquille rose cache un véritable tueur à sang froid, nommé Euglandina rosea.
Chez les humains, beaucoup sont prêts à se battre pour une place au soleil. Chez les escargots par contre, c'est l'inverse : les places de choix sont à l'ombre et bien humides. Sauf qu'un monstre cannibale rode dans les coins sombres des forêts tahitiennes… Sa belle coquille rose cache un véritable tueur à sang froid, nommé Euglandina rosea.
Un Euglandina rosea dans la vallée Haapoponi (photo : Trevor Coote)
Cet escargot carnivore venant de Floride a été introduit au fenua dans les années 60, contre l'avis des experts, pour chasser l'escargot géant africain. Cet escargot géant, celui que l'on voit désormais le plus communément dans les jardins, a été importé en 1967 par un entrepreneur pas très visionnaire. Face à l'échec de leur commercialisation, il les avait relâchés dans la nature… Et l'escargot géant africain avait rapidement commencé à dévaster les cultures, d'où l'introduction du prédateur américain. Il va sans dire que le plan "escargot de Floride" a, lui aussi, été un échec désastreux.
LE MASSACRE DES ESCARGOTS POLYNÉSIENS
Car au lieu de s'attaquer à une proie deux fois plus grosse que lui, Euglandina rosea a fait un festin des tout petits escargots endémiques, principalement les différentes espèces de Partula nommés globalement "areho" en tahitien. Une équipe de trois généticiens qui étudiait les huit espèces endémiques de Moorea les a toutes vus disparaitre (dans la nature) en seulement un an. Heureusement, ils ont eu le temps de sauver 5 espèces en les envoyant dans des zoos à travers le monde.
A Raiatea les escargots ont été décimés et sur les 33 espèces que comptait l'île on n'en observe plus que 3 aujourd'hui. Les gastéropodes de Huahine en ont moins bavé, puisqu'une seule espèce endémique a disparu. Il en reste deux… Enfin, à Tahiti, sur les 8 espèces pré-invasion, 4 survivent dans la nature mais sont très rares. Trois autres sont encore en vie dans des zoos.
LES RÉFUGIÉS SOLAIRES DE TAHITI
Une des espèces tahitiennes a pourtant beaucoup mieux résisté que les autres : Partula hyalina, à la belle carapace toute blanche. Avant l'invasion de Rosea, les hyalina ne représentaient que 5% des escargots endémiques de Tahiti. Ils sont maintenant les areho les plus facilement observés à Tahiti, d'autant qu'ils habitent dans les débuts de vallées.
Les scientifiques ne savent pas pourquoi Partula hyalina s'en sort mieux que ses congénères face à l'invasion, d'autant que l'espèce semblait jusqu'alors plus faible que ses concurrentes. Mais ils ont une hypothèse : ce sont des réfugiés solaires.
Cette "Solar refugee hypothesis" a été avancée par les équipes du professeur Diarmaid Ò Foighil, de l'université du Michigan. Elle part du constat que Partula hyalina habite des endroits plus ensoleillés et plus secs que ceux habituellement préférés des escargots. Une niche environnementale plus rude que celle occupée par ses confrères, mais qui pourrait aussi la mettre à l'abri du terrible prédateur rose qui a causé l'extinction de masse des gastéropodes polynésiens…
LE MASSACRE DES ESCARGOTS POLYNÉSIENS
Car au lieu de s'attaquer à une proie deux fois plus grosse que lui, Euglandina rosea a fait un festin des tout petits escargots endémiques, principalement les différentes espèces de Partula nommés globalement "areho" en tahitien. Une équipe de trois généticiens qui étudiait les huit espèces endémiques de Moorea les a toutes vus disparaitre (dans la nature) en seulement un an. Heureusement, ils ont eu le temps de sauver 5 espèces en les envoyant dans des zoos à travers le monde.
A Raiatea les escargots ont été décimés et sur les 33 espèces que comptait l'île on n'en observe plus que 3 aujourd'hui. Les gastéropodes de Huahine en ont moins bavé, puisqu'une seule espèce endémique a disparu. Il en reste deux… Enfin, à Tahiti, sur les 8 espèces pré-invasion, 4 survivent dans la nature mais sont très rares. Trois autres sont encore en vie dans des zoos.
LES RÉFUGIÉS SOLAIRES DE TAHITI
Une des espèces tahitiennes a pourtant beaucoup mieux résisté que les autres : Partula hyalina, à la belle carapace toute blanche. Avant l'invasion de Rosea, les hyalina ne représentaient que 5% des escargots endémiques de Tahiti. Ils sont maintenant les areho les plus facilement observés à Tahiti, d'autant qu'ils habitent dans les débuts de vallées.
Les scientifiques ne savent pas pourquoi Partula hyalina s'en sort mieux que ses congénères face à l'invasion, d'autant que l'espèce semblait jusqu'alors plus faible que ses concurrentes. Mais ils ont une hypothèse : ce sont des réfugiés solaires.
Cette "Solar refugee hypothesis" a été avancée par les équipes du professeur Diarmaid Ò Foighil, de l'université du Michigan. Elle part du constat que Partula hyalina habite des endroits plus ensoleillés et plus secs que ceux habituellement préférés des escargots. Une niche environnementale plus rude que celle occupée par ses confrères, mais qui pourrait aussi la mettre à l'abri du terrible prédateur rose qui a causé l'extinction de masse des gastéropodes polynésiens…
Trevor Coote est le scientifique qui se charge d'étudier les escargots endémiques polynésiens. Il va bientôt recevoir la doctorante de l'université du Michigan Cindy Bick.
Comme tous bons scientifiques, ils doivent tester leur hypothèse. C'est pour cette raison qu'une doctorante de l'université du Michigan, Cindy Bick, va venir à Tahiti dans un mois pour poser des capteurs miniatures sur les carapaces de 45 gastéropodes. Ces détecteurs ultra high-tech enregistreront l'intensité de l'exposition lumineuse et la durée d'exposition de trois espèces d'escargots : les Euglandina rosea (carnivores), les Partula hyalina (nos réfugiés solaires) et les Partula clara (une espèce endémique qui était traditionnellement utilisée pour faire des colliers, mais qui est aujourd'hui mal en point).
LES PARTULA SE CACHENT
Le coordinateur local de l'opération est le docteur Trevor Coote, un généticien anglais venu en Polynésie en 1995 pour faire sa thèse. "À l'époque j'avais trouvé une situation catastrophique" explique-t-il. C'est ce qui l'a poussé à revenir régulièrement en Polynésie et à mener les opérations de préservation de nos escargots endémiques.
Aujourd'hui, il est mandaté par la Diren et le Zoo de Londres pour mener la recherche sur les escargots polynésiens, les efforts de protection des dernières espèces endémiques et la réintroduction des espèces qui ont été sauvées de l'extinction grâce à différents zoo.
LES PARTULA SE CACHENT
Le coordinateur local de l'opération est le docteur Trevor Coote, un généticien anglais venu en Polynésie en 1995 pour faire sa thèse. "À l'époque j'avais trouvé une situation catastrophique" explique-t-il. C'est ce qui l'a poussé à revenir régulièrement en Polynésie et à mener les opérations de préservation de nos escargots endémiques.
Aujourd'hui, il est mandaté par la Diren et le Zoo de Londres pour mener la recherche sur les escargots polynésiens, les efforts de protection des dernières espèces endémiques et la réintroduction des espèces qui ont été sauvées de l'extinction grâce à différents zoo.
Ces mini-détecteurs de lumière, en photo à côté d'une carapace de Partula hyalina, vont permettre à Cindy Bick de tester son hypothèse de réfugiés solaires (photo : Dr Diarmaid Ó Foighil)
Il explique que l'expérience que veut mener Cindy Bick a tout son soutien, mais est pour l'instant bloquée par un problème très pratique : "En ce moment c'est très difficile de trouver des Partula. Hier j'étais à Tiarei, et la vallée est complètement détruite à cause des intempéries de décembre. La falaise s'est effondrée dans la vallée, je n'avais jamais vu ça. C'est comme ça dans toutes les vallées, depuis les orages de Noël, je n'arrive plus à trouver les Partula comme avant. C'est possible qu'ils aient été dispersés, emportés par le vent, ou soient montés dans les arbres… Depuis 13 ans, j'ai exploré 84 vallées, et c'est la première fois qu'ils sont aussi difficiles à trouver !"
Heureusement pour nos petits areho, le scientifique explique que s'il était arrivé malheur à ses mollusques, il aurait retrouvé leurs (minuscules) carapaces vides. Donc pour l'instant, il soupçonne que les Partula se cachent… Mais s'ils aiment le soleil autant qu'on le pense, nul doute que Hyalina pointera rapidement le bout de ses tentacules.
Heureusement pour nos petits areho, le scientifique explique que s'il était arrivé malheur à ses mollusques, il aurait retrouvé leurs (minuscules) carapaces vides. Donc pour l'instant, il soupçonne que les Partula se cachent… Mais s'ils aiment le soleil autant qu'on le pense, nul doute que Hyalina pointera rapidement le bout de ses tentacules.