Les agriculteurs installés sur les terrains agricoles du Pays sont inquiets


Mamie Juliette cultive des tiare tahiti, aujourd'hui elle se dit inquiète pour l'avenir de son exploitation
TEVA I UTA, le 10 avril 2016- Juliette et Siméon Faatoa cultivent des Tiare Tahiti sur un terrain appartenant au Pays, situé derrière le collège de Teva i Uta. Avec le projet de construction d'un hôtel à Atimaono, ils craignent de devoir laisser aussi leur champ, un jour. Depuis deux ans, ils vivent dans la crainte malgré le message rassurant du maire de Teva i Uta.
Le Pays est propriétaire de plusieurs hectares de terres réparties sur la Polynésie. Certaines parcelles agricoles sont louées. Le domaine qui se situe derrière le collège de Teva i Uta est actuellement géré par l'établissement de gestion et d'aménagement de Teva (Egat). Celui-ci se charge aussi du golf de Atimaono.

Sur une parcelle agricole, on trouve Juliette et Siméon Faatoa. Ils louent un hectare et demi pour leur plantation de Tiare Tahiti. Un domaine qu'ils occupent depuis 2005, mais depuis deux ans, rien ne va plus. Ils s'inquiètent pour leur avenir. "Nous avions entendu parler du projet de construction d'un hôtel chinois à Atimaono. Les squatters qui vivaient côté mer ont dû quitter les lieux. Ensuite, nous avons entendu que le projet pourrait s'étendre côté montagne également".


Juliette est sur le domaine du territoire depuis 2005. Elle a en sa possession, 1 500 pieds de Tiare Tahiti
Même s'ils n'ont eu aucune confirmation de la part du Pays, ils sont inquiets. Il faut dire que leur activité leur permet de nourrir leurs petits-enfants. "Mes filles sont revenues de Bordeaux avec leurs licences en poche et elles n'ont pas trouvé de travail. Elles sont venues avec moi dans le champ pour travailler et cela a duré deux ans. Heureusement, elles ont passé des concours et ont réussi à avoir un travail. Maintenant, il ne reste que mon fils et sa petite famille. Je souhaite qu'ils prennent la suite. Is sont motivés car ils connaissent le métier donc ils peuvent prendre la relève. Et avec tout ce qu'on entend c'est démoralisant."

Et les rumeurs qui circulent quant à la probable reprise par le Pays de son terrain sur lequel travaille le couple, met Juliette mal à l'aise. "On entend plusieurs choses, comme la route de ceinture qui sera déplacé et elle passera par derrière Morinda. Ce ne sont pas les personnalités qui nous ont dit tout cela, mais certaines personnes qui ont assisté à des réunions. Il y a aussi un autre projet d'hippodrome cette fois-ci qui devrait se faire à Atimaono. S'ils touchent au bord de mer eh bien, ils seront capables de venir aussi côté montagne".

Juliette craint de devoir se retrouver un jour à la rue. "Il y a certains entrepreneurs que nous connaissons qui sont devenus des sans-abris aujourd'hui, parce qu'ils n'ont plus d'emplois. Un de nos amis dort à Papeete dans un carton alors qu'il était entrepreneur. C'est un Tahitien, il est chez lui et il dort dans un carton, ça me fait mal au cœur. Et le Pays donne des terrains pour les investisseurs chinois qui veulent venir ici et après ils vont devenir propriétaires de toutes ces terres ? Tout cela m'inquiète", souligne-t-elle.


Pour garder la terre humide, Juliette met autour des algues, elle rajoute ensuite des feuilles mortes avec un peu d'eau. Le tout est ensuite recouvert de feuilles de palmier.
Chaque jour, Juliette et Siméon fournissent des Tiare Tahiti au laboratoire de cosmétologie de Papara. Il y a aussi les confessions religieuses, les groupes de danse et aussi les communes à contenter. "De septembre à février, il y a beaucoup de travail et on peut fournir, 150 à 200 paquets au laboratoire cosmétique par jour. Le travail ne s'arrête pas parce qu'il y a aussi la Toussaint. En revanche, à partir du mois de mars, les floraisons se font rares. Le réchauffement climatique a beaucoup impacté aussi sur les plantations."

Si Juliette et Siméon ne cultivent pas sur une de leurs terres, c'est parce que celles-ci sont toujours en indivision. "On court de gauche à droite pour les papiers. Nos parents sont morts et on ne voit pas le bout du tunnel. On aimerait bien que le territoire nous aide à nous en sortir au niveau de l'indivision. On ne veut pas de maisons sociales, on veut juste nos terres pour nourrir nos familles."

Selon Juliette, le maire de Teva i Uta et ministre des Affaires foncières, Tearii Alpha leur a assuré qu'ils pourront rester sur le domaine territorial et continuer leurs plantations. Mais cela ne suffit pas pour la réconforter.
Même son de cloche du côté de la direction de l'Egat : "C'est du n'importe quoi. Il n'a jamais été question de les expulser et si c'était le cas, on aurait déjà expulsé ceux qui ne sont pas à jour de leur paiement", confie Opahi Buillard, directeur par intérim.


Rédigé par CORINNE TEHETIA le Lundi 11 Avril 2016 à 16:21 | Lu 3724 fois