Tahiti, le 18 novembre 2020 - Preuve d’un « relâchement des comportements », la recrudescence des infections sexuellement transmissibles (IST) conforte l’association Agir contre le sida dans ses efforts de sensibilisation sur le terrain. A commencer par le projet Patchwork des noms, gigantesque « tifaifai » en hommage aux victimes, relayé pour la première fois en Polynésie.
Sifilis, hépatite b, Gonococcie ou Chlamydia. La recrudescence des IST (infection sexuellement transmissibles) depuis quelques années, trahi un certain « relâchement des comportements » qui expose dangereusement au virus de l'immunodéficience humaine (VIH). « Il ne faut pas attendre une recrudescence du VIH, qui semble moins contagieux que les autres IST et qui arrive un peu en décalage, pour réagir » résume Lam Nguyen médecin référent pour Agir contre le sida. L’association le sait, anticipant sur la journée mondiale contre le sida le 2 décembre afin d’interpeller sur la nécessité d’inverser la tendance « avant qu’il ne soit trop tard ». « Il faut continuer le travail sur le terrain, ne pas baisser la garde » intervient la présidente d’honneur, Maire Bopp Dupont.
Les jeunes sont particulièrement touchés, avec un taux d’incidence chez 15 – 24 ans de 12,5 pour 100 000 habitants. Les données du centre des maladies infectieuses et tropicales au CHPF montrent notamment qu’en 2018, « 76,5% des sujets jeunes n’utilise pas ou peu les préservatifs lors des rapports sexuels. » Par ailleurs, leur accès à la technologie numérique semble avoir une incidence. « Les rencontres sont plus abondantes, plus rapides, les nouvelles générations ont plus de facilité à avoir de nouveaux partenaires, alors qu’avant on n’avait pas d’interface qui permettait les contacts humains un peu plus à la chaîne » analyse le médecin.
Cas de syphilis congénitales chez les enfants
Le nombre de cas de syphilis sont particulièrement frappant, atteignant de plus en plus maintenant aussi les femmes enceintes. Mais ce n’est pas tout. « On a commencé à voir des syphilis congénitales chez les enfants alors qu’on n’en a pas vu depuis presque 25 ans, mais également chez les donneurs de sang » alerte le médecin. « Si la prévalence du VIH dans la population est faible, ça va prendre du temps pour démarrer, développe le médecin. Ainsi de 1985 à aujourd’hui, 420 cas d’infection à VIH ont été déclarés, dont 105 au stade Sida.
Preuve que la Polynésie n’est pas épargnée par la maladie, 92 personnes sont décédées, dont trois récemment : une jeune femme de 32 ans en 2019 et deux décès en 2020 dont un jeune homme de 23 ans, qui laisse une femme et deux enfants derrière lui. « Chaque décès est un échec parce que nous avons un système de santé performant, qui donne accès au traitement, on ne devrait plus mourir aujourd’hui du sida en Polynésie » assène le médecin. « Mais encore une fois, on ne sait que ce qu’on détecte, qu’elle est la partie immergée de l’iceberg ? »
L’exclusion, le rejet, la peur
Au-delà des statistiques « impersonnelles », il attire l’attention sur les « drames humains », saluant la présidente d’honneur pour avoir trouvé le « courage » de surmonter la maladie. « Je sais ce que d’être à l’article de la mort, de revenir, de reconstruire, de se battre » souligne l’intéressée, elle-même séropositive depuis plus de 20 ans. L’exclusion, le rejet, la peur : au-delà de la maladie, « ce sont ces réalités-là qui affaiblissent ». Consciente que le VIH suscite moins d’empathie que le cancer, et donc moins de visibilité, elle déplore les « préjugés » qui pèsent encore sur les patients atteints du Sida, malgré l’accès au traitement. « Quand la personne a décidé de s’en aller, elle se laisse mourir et c’est parfois lié à cette peur d’être rejetée. »
Alors que le Covid monopolise toutes les attentions et toutes les ressources, Agir contre le sida a décidé de relayer sur le fenua le projet « Patchwork des noms » : gigantesque « tifaifai » conçu comme un mémorial. « Le Covid prend beaucoup de place, la compétition est rude » glisse la présidente d’honneur. Karel Luciani, président de l’association mise justement sur le « retentissement localement » du « symbole de la culture polynésienne » qu’incarne le tifaifai. Rebaptisé « Tifai nō tē haamanao » en tahitien, le projet a vocation à capter l’attention des polynésiens sur l’épidémie, « perpétuer la mémoire de ceux qui sont morts du sida », « combattre l’exclusion et la discrimination des personnes en permettant aux proches le souhaitant d’affirmer la cause véritable du décès des leurs, et d’œuvrer dans une plus grande visibilité pour une prise de conscience. » L'association présentera ses premiers modèles le 1er décembre et invite tout un chacun à faire son propre patchwork. « Si vous pouvez nous envoyer ne serait-ce qu'une photo du travail, ce serait déjà une énorme contribution » ajoute la présidente.
Le tout premier exemplaire est exposé sur le fare de l’assemblée de Polynésie française. Ceux qui le souhaitent peuvent y laisser un mot. « C’est un bel hommage que l’association veut rendre aux victimes, commente Maire Bopp Dupont. Mais c’est aussi une façon de dire aux malades qu’on ne les oublie pas. »
Sifilis, hépatite b, Gonococcie ou Chlamydia. La recrudescence des IST (infection sexuellement transmissibles) depuis quelques années, trahi un certain « relâchement des comportements » qui expose dangereusement au virus de l'immunodéficience humaine (VIH). « Il ne faut pas attendre une recrudescence du VIH, qui semble moins contagieux que les autres IST et qui arrive un peu en décalage, pour réagir » résume Lam Nguyen médecin référent pour Agir contre le sida. L’association le sait, anticipant sur la journée mondiale contre le sida le 2 décembre afin d’interpeller sur la nécessité d’inverser la tendance « avant qu’il ne soit trop tard ». « Il faut continuer le travail sur le terrain, ne pas baisser la garde » intervient la présidente d’honneur, Maire Bopp Dupont.
Les jeunes sont particulièrement touchés, avec un taux d’incidence chez 15 – 24 ans de 12,5 pour 100 000 habitants. Les données du centre des maladies infectieuses et tropicales au CHPF montrent notamment qu’en 2018, « 76,5% des sujets jeunes n’utilise pas ou peu les préservatifs lors des rapports sexuels. » Par ailleurs, leur accès à la technologie numérique semble avoir une incidence. « Les rencontres sont plus abondantes, plus rapides, les nouvelles générations ont plus de facilité à avoir de nouveaux partenaires, alors qu’avant on n’avait pas d’interface qui permettait les contacts humains un peu plus à la chaîne » analyse le médecin.
Cas de syphilis congénitales chez les enfants
Le nombre de cas de syphilis sont particulièrement frappant, atteignant de plus en plus maintenant aussi les femmes enceintes. Mais ce n’est pas tout. « On a commencé à voir des syphilis congénitales chez les enfants alors qu’on n’en a pas vu depuis presque 25 ans, mais également chez les donneurs de sang » alerte le médecin. « Si la prévalence du VIH dans la population est faible, ça va prendre du temps pour démarrer, développe le médecin. Ainsi de 1985 à aujourd’hui, 420 cas d’infection à VIH ont été déclarés, dont 105 au stade Sida.
Preuve que la Polynésie n’est pas épargnée par la maladie, 92 personnes sont décédées, dont trois récemment : une jeune femme de 32 ans en 2019 et deux décès en 2020 dont un jeune homme de 23 ans, qui laisse une femme et deux enfants derrière lui. « Chaque décès est un échec parce que nous avons un système de santé performant, qui donne accès au traitement, on ne devrait plus mourir aujourd’hui du sida en Polynésie » assène le médecin. « Mais encore une fois, on ne sait que ce qu’on détecte, qu’elle est la partie immergée de l’iceberg ? »
L’exclusion, le rejet, la peur
Au-delà des statistiques « impersonnelles », il attire l’attention sur les « drames humains », saluant la présidente d’honneur pour avoir trouvé le « courage » de surmonter la maladie. « Je sais ce que d’être à l’article de la mort, de revenir, de reconstruire, de se battre » souligne l’intéressée, elle-même séropositive depuis plus de 20 ans. L’exclusion, le rejet, la peur : au-delà de la maladie, « ce sont ces réalités-là qui affaiblissent ». Consciente que le VIH suscite moins d’empathie que le cancer, et donc moins de visibilité, elle déplore les « préjugés » qui pèsent encore sur les patients atteints du Sida, malgré l’accès au traitement. « Quand la personne a décidé de s’en aller, elle se laisse mourir et c’est parfois lié à cette peur d’être rejetée. »
Alors que le Covid monopolise toutes les attentions et toutes les ressources, Agir contre le sida a décidé de relayer sur le fenua le projet « Patchwork des noms » : gigantesque « tifaifai » conçu comme un mémorial. « Le Covid prend beaucoup de place, la compétition est rude » glisse la présidente d’honneur. Karel Luciani, président de l’association mise justement sur le « retentissement localement » du « symbole de la culture polynésienne » qu’incarne le tifaifai. Rebaptisé « Tifai nō tē haamanao » en tahitien, le projet a vocation à capter l’attention des polynésiens sur l’épidémie, « perpétuer la mémoire de ceux qui sont morts du sida », « combattre l’exclusion et la discrimination des personnes en permettant aux proches le souhaitant d’affirmer la cause véritable du décès des leurs, et d’œuvrer dans une plus grande visibilité pour une prise de conscience. » L'association présentera ses premiers modèles le 1er décembre et invite tout un chacun à faire son propre patchwork. « Si vous pouvez nous envoyer ne serait-ce qu'une photo du travail, ce serait déjà une énorme contribution » ajoute la présidente.
Le tout premier exemplaire est exposé sur le fare de l’assemblée de Polynésie française. Ceux qui le souhaitent peuvent y laisser un mot. « C’est un bel hommage que l’association veut rendre aux victimes, commente Maire Bopp Dupont. Mais c’est aussi une façon de dire aux malades qu’on ne les oublie pas. »
Symbole de la riposte contre le sida
Le projet Patchwork des noms a démarré à San Francisco, aux États-Unis. Souvent abrégée en « Patchwork des noms », ce projet prend la forme d’un gigantesque « tifaifai » à l’instar d’un mémorial. Cousus en mémoire des victimes du sida par leurs amis, proches et autres membres de la famille depuis 1987, ces patchworks représentent aujourd’hui près de 85 000 noms à travers le monde, soit plusieurs tonnes de tissus. C’est « la plus grande pièce d’art communautaire jamais crée » selon l’AIDS Memorial Quilt. Depuis, le « Tifaifai » géant est devenu l’un des symboles emblématiques de la riposte contre le sida.
L’objectif du projet en Polynésie n’est « pas seulement commémoratif » souligne l'association, il doit aussi servir à « galvaniser et relancer les efforts de toute la communauté engagée dans la lutte contre le sida en vue de tendre vers l’objectif ambitieux » fixé par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) à l'échelle mondiale. C'est-à-dire « zéro infection à VIH, zéro discrimination, zéro décès liés au Sida. »
L’objectif du projet en Polynésie n’est « pas seulement commémoratif » souligne l'association, il doit aussi servir à « galvaniser et relancer les efforts de toute la communauté engagée dans la lutte contre le sida en vue de tendre vers l’objectif ambitieux » fixé par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) à l'échelle mondiale. C'est-à-dire « zéro infection à VIH, zéro discrimination, zéro décès liés au Sida. »