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Le référendum, “nous allons le faire au cours de ces élections”


Tahiti, le 18 décembre 2022 – Alors que le député Moetai Brotherson clame depuis la campagne des législatives qu'un référendum sera organisé en cas de victoire du Tavini aux territoriales, le leader du parti indépendantiste, Oscar Temaru, a annoncé le contraire vendredi. Le tāvana de Faa'a considère en effet que les prochaines élections serviront de référendum pour la souveraineté du fenua.
 
Le président du Tavini et tāvana de Faa'a, Oscar Temaru, a dénoncé vendredi, lors d'une conférence de presse, les propos “calomnieux et diffamants” du ministre “du folklore et de l’environnement” Heremoana Maamaatuaiahutapu. Ce dernier avait déclaré le 13 décembre chez nos confrères de TNTV que le gouvernement Temaru de 2013 “a signé avec les Chinois pour l’exploitation de nos fonds marins”. Le leader indépendantiste a balayé d’une main “ces allégations gratuites et infondées”. Il assure avoir signé un “Gentleman Agreement” relatif au projet aquacole encadré par un Memorandum of Understanding (MOU). “Cela n'a rien à voir avec un accord de pêche ou quoi que ce soit pour venir explorer ou exploiter nos ressources”, se défend le président du parti bleu ciel. Il tacle le Tapura en affirmant que sa politique consiste à “mentir et diffamer” en référence aux déclarations du président Édouard Fritch au sein de l’hémicycle en 2018 “quand il dit que cela fait 30 ans que l'on vous ment concernant les essais nucléaires”. “Je ne suis pas étonné (…). Mentir, c'est ce qu'utilisent les gens faibles”, lâche Oscar Temaru.
 
Mais au-delà des joutes verbales entre le gouvernement Tapura et son principal opposant, le parti indépendantiste, le leader de ce dernier, Oscar Temaru, continue à surfer sur la vague bleue des législatives. Très confiant quant aux résultats des prochaines territoriales - “on gagnera encore avec une majorité beaucoup plus importante” -, il a déclaré que si le parti bleu venait à atteindre 80% des voix, “ce peuple est prêt à prendre son destin en main” et qu’il n’y aurait donc pas besoin d’organiser de référendum. Une fois de plus, le discours du chef de file du parti bleu clair diffère complètement de celui tenu par le député Moetai Brotherson, qui avait assuré le contraire pendant et après la campagne des législatives.
 
Aucune “ambiguïté” pour Oscar Temaru
 
Le leader indépendantiste a assuré que si le Tavini vient à gagner les territoriales, il fera comme en 2004 et partira à la rencontre de nos voisins du Pacifique ainsi qu’à l’ONU pour avoir le soutien de tous pour l’accession de la Polynésie à la souveraineté. “Nous allons faire notre travail sur le plan local et sur le plan international comme on l'a toujours fait.” Mais plus encore, pas question pour Oscar Temaru d’organiser un référendum si le Tavini arrive en tête aux prochaines élections. “Je pense avoir été très clair. Si nous gagnons les élections l'année prochaine avec une grande marge, est-ce qu'il y aura encore besoin de faire un référendum ?” Selon lui, le parti bleu ciel obtiendra un meilleur score qu’aux législatives et cela équivaudra à un référendum. “Le référendum, c'est quoi ? C’est demander à un peuple s'il veut prendre son destin en main, et nous allons le faire au cours de ces élections. Les gens qui viendront voter, pourquoi ils viennent voter ? Il y a eu les législatives.”
 
Pour justifier sa position, le président du Tavini prend le Kosovo comme exemple : “Il n'y a pas eu de référendum. Il y eu a une déclaration unilatérale, la France a été le premier pays à soutenir. C'était à l'époque de Kouchner.” Ou encore le cas du Vanuatu : “Il y a eu les élections générales en 1976. Olivier Stirn est allé sur place pour leur proposer le statut d'autonomie, ils ont refusé et sont allés à New York demander aux Nations Unies de fixer la date de l'accession de leur pays à l'indépendance. Elle l’a fixée à la date du 30 juillet 1980. Il n'y a pas eu de référendum.” Pour lui, il n’y a aucune ambiguïté, les électeurs qui voteront pour le parti bleu ciel, “cela veut dire ce que cela veut dire. Bravo mais l’indépendance c'est quoi ? C'est le bonheur suprême d'un peuple.”
 
Un “processus complexe”
 
Interrogé, le député Moetai Brotherson affirme que ce sujet fait partie “des points sur lesquels on n’est pas forcément d’accord”. Et rappelle que le référendum est un acte d’autodétermination inscrit dans le processus du droit international qui “ne saurait être confondu avec une élection locale”. Il assure également que si le Tavini gagne les territoriales, la France ne pourra plus invoquer le fait que “l’exécutif - aujourd’hui la majorité Tapura et le gouvernement Fritch - demande la désinscription” et devra être à la table des négociations pour la mise en place du processus d’autodétermination. Un processus “complexe”, selon lui, qui ne doit “pas être précipité” puisqu’il faudra réfléchir au corps électoral, à l’échéancier, à la période d’information ou encore à la formulation de la question à laquelle il faudra répondre par oui ou non. “Le meilleur résultat auquel on puisse aboutir si on gagne les élections en avril, c’est d’arriver avec au moins un acte d’autodétermination en fin de processus.”
 
Pour ce qui est du Vanuatu, Moetai Brotherson affirme qu’“il faut comparer ce qui est comparable” et qu’en lieu et place du référendum, une pétition “a été signée par 98% de la population vanuataise” et insiste sur le fait que le contexte n’est pas le même qu’au fenua. Il émet des réserves également quant au fait que tous les électeurs qui mettront le ticket bleu dans l’urne l’an prochain soient indépendantistes, sauf dans le cas, selon lui, où “la profession de foi et le programme du Tavini ne comportent qu’un seul point et marqué en gros en rouge et en clignotant et que ce point soit l’indépendance tout de suite et que les gens en connaissance de cause votent massivement pour le Tavini (…). Mais je ne pense pas que ce type de programme puisse convaincre les Polynésiens qui ont d’autres soucis en ce moment, notamment celui de nourrir leur famille.” Après l’exploration des ressources marines, le référendum est le deuxième point de désaccord entre les deux hommes, mais le député reste confiant et pense qu’au sein de la famille bleue, les notes de musique vont s’accorder d’elles-mêmes. “On a le même objectif, on n’a pas forcément la même vision du chemin à emprunter pour y arriver.”

Rédigé par Vaite Urarii Pambrun le Dimanche 18 Décembre 2022 à 16:07 | Lu 3058 fois