Le projet du Village tahitien revu à la baisse


Tahiti, le 2 septembre 2022 – Un nouvel appel à projets va être lancé pour le Village tahitien mardi prochain. Les aménagements touristiques proposés sont réduits, avec près de 20 hectares de terrain en moins. L’impact environnemental doit également être diminué tandis que la population locale sera davantage impliquée. Le Pays souhaite maintenant que les lots soient attribués en début d’année prochaine, au cœur de la campagne électorale pour les territoriales.
 
Nouvel épisode dans la saga à rebondissements du Village tahitien, ex-Tahiti Mahana Beach, ce vaste projet de complexe touristique prévu depuis presque dix ans à l’entrée de Punaauia. Vendredi matin, le ministre des Grands Travaux, René Temeharo, a convié la presse au sein des locaux de l’établissement Grands Projets de Polynésie (G2P), maître d’ouvrage. Entouré de Nicolas Bertholon, adjoint à la commune de Punaauia en charge de l’aménagement urbain, et de Marc Chin Foo, responsable du pôle aménagement et équipement à G2P (ex-TNAD), il a annoncé le lancement du prochain appel à projets pour mardi prochain, le 6 septembre.
 
“Nous sommes tous préoccupé de finaliser enfin cette opération”, a souligné le ministre, qui a présenté un projet réduit, “à taille humaine”. Jusqu’à maintenant, il était question d’un complexe touristique de grande ampleur, 60 hectares pour six lots comptabilisant 3 000 clés, nécessitant 3 millions de mètres cubes de remblais, ce qui avait suscité la grogne des associations environnementales de la commune. Le projet prévoyait également la construction de salles de spectacles et d’un centre de congrès sur les plateaux du haut Outumaoro.
 
Mais une succession de revers a mis le projet à mal au fil des ans. Tout d’abord, la procédure d’appel d’offres pourtant remportée par un groupement d’investisseurs néo-zélandais et samoans en 2018 s’était soldée par un échec. En juillet 2021, c’est la procédure d’appel à manifestation d’intérêts pour les six premiers lots, lancée en grande pompe en septembre 2019, qui avait été déclarée infructueuse. Cinq investisseurs s’étaient pourtant portés candidats, parmi lesquels les groupes Wane et Degage, mais tous s’étaient retirés un à un, de manière plus ou moins volontaire. Parmi les freins évoqués, outre la crise Covid, la question du foncier était un point bloquant. Le Pays proposait alors des baux administratifs sur des terrains relevant du domaine public, limités à 35 ans et renouvelables une fois, ce qui ne permettait pas la sous-location et limitait les recours à la défiscalisation.
 
Les emprises du projet réduites
 
Dans ses derniers ajustements présentés vendredi, le Pays a souhaité “reconfigurer le site par nécessité de le ramener à l’échelle de la Polynésie” mais aussi de satisfaire les investisseurs privés précédents, qui ont continué de s’intéresser au projet. C’est ainsi qu’il est aujourd’hui proposé une zone prioritaire d’aménagement du territoire (ZPADT) réduite, ramenée à 44 hectares au lieu des 60 initialement prévus. Mais également des remblais maritimes de 450 000 m3 (au lieu de 3 millions), soit un volume comparable à ceux réalisés pour le parc Paofai.
 
La nature du foncier, qui avait été décriée les fois précédentes, a également été modifiée. Les parcelles ont été déclassées dans le domaine privé, ce qui permet de proposer aujourd’hui des baux privés de 99 ans. Les programmes hôteliers ont également été ajustés. Si les six lots sont maintenus, ils ne comptent désormais plus que 800 clés a minima (jusqu’à 1 000 clés maximum), ce qui correspond davantage aux attentes des investisseurs et du marché local d’après le ministre. Le coût de la construction des projets hôteliers sur les six lots est aujourd’hui ramené à 50 milliards de Fcfp.
 
Pour les locaux autant que les touristes
 
Le concept a lui aussi évolué. Plus qu’un complexe hôtelier, il s’agit aujourd’hui de permettre à la population locale de bénéficier du site autant que les touristes. Des espaces culturels sont prévus au nord, autour de la source sacrée. Une plage publique de 250 à 300 mètres linéaires sera accessible à tous et l’actuel parc Vairai, apprécié des administrés de Punaauia et Faa’a, sera conservé au cœur du lieu. Une place publique, bordée de commerces et de restaurants, organisera l’interface entre la plage, le parc et les lots hôteliers. Enfin, une promenade piétonne, partant du nord, permettra de rejoindre la nouvelle marina aménagée au sud, dans la continuité de celle de Taina. “Cette nouvelle marina permettra de régler le problème des mouillages sauvages que l’on trouve tout du long en réglementant et obligeant les voiliers à s’installer dans la structure”, a précisé Marc Chin Foo. Côté parking, 1 500 places de stationnement sont prévus en différents points.
 
Exit donc les salles de spectacles et autre centre de congrès, qui ne font plus partie des priorités du Pays. La zone qui devait les accueillir, en haut de Outumaoro, est désormais sortie de l’emprise foncière. Elle devrait à la place accueillir d’autres projets, comme celui du pôle de santé privé unique qui doit permettre de mieux répartir l’offre de soins entre les côtes est et ouest de Tahiti. Il semblerait donc que le calendrier du Village tahitien se précise, à l’approche des prochaines échéances électorales. Prochain objectif affiché par le ministre : que les six lots soient attribués mi-janvier prochain. Soit à peine trois mois avant les élections territoriales.
 

Nicolas Bertholon, 2e adjoint au maire de Punaauia en charge de l’aménagement urbain : “Nos demandes ont été respectées”

“Au départ, le projet Mahana Beach, c’était 3 000 clés, voire plus, avec des tours qui dénaturaient complètement le paysage. Aujourd’hui, ça a changé. On a notamment demandé à maintenir le parc public et l’accès à la mer pour la population de Punaauia et de Faa’a. On conserve également l’état naturel et l’impact culturel de la pointe Tata’a. On réserve un espace du terrain, dans la partie en haut côté montagne, à la construction du pôle de santé privé unique. Et enfin, élément très important, notamment pour les associations de protection de l’environnement qui sont très sensibles au projet, on empiète beaucoup moins sur le lagon, qui est un peu le garde-manger de la population de Punaauia. On est passé de plusieurs millions de mètres cubes de remblais à 400 ou 450 000 m3. C’est beaucoup plus raisonnable. Tout cela faisait partie des demandes du tāvana et du conseil municipal. C’est en négociant avec le Pays qu’on a obtenu ces éléments-là. Nous sommes aujourd’hui totalement en phase avec ce qui est proposé car nos demandes ont été respectées.”
 




Rédigé par Lucie Ceccarelli le Vendredi 2 Septembre 2022 à 16:39 | Lu 4021 fois