Une représentation d'architecte imaginant une île flottante. Les chances que ce prototype très high tech voie le jour en Polynésie ont fortement diminué ces derniers mois. (crédit photo : Blue Frontiers)
PAPEETE, le 17 mai 2018 - La société Blue Frontiers, qui porte le projet de prototype d'île flottante dans le lagon tahitien, a lancé un grand concours international pour tenter de trouver un nouveau pays hôte. Il est doté de 10 millions de francs cfp pour récompenser celui qui trouvera un nouveau coin de lagon quelque part dans le monde pour héberger le projet.
Le projet d'île flottante se fera-t-il vraiment à Tahiti ? Nous avons posé la question à Jean-Christophe Bouissou, le porte-parole du gouvernement sortant, et il nous a expliqué que "le projet, comme le président l'a annoncé, est devenu caduc comme prévu dans le MoU qui a été signé." Le MoU (Memorendum of Understanding ou Recueil d'intentions réciproques en français) signé en janvier 2017 encadrait le développement du projet conjointement entre la fondation Seasteading et le Pays. L'accord prévoyait que "les parties collaboreront activement afin de finaliser le cadre réglementaire spécial avant la fin de l'année 2017", ce qui n'a pas été fait.
Selon le ministre, "manifestement le site qu'ils semblaient préconiser posait problème, il y a quand même une réaction importante de la population. Et le sujet est arrivé à un moment... qui n'était pas propice. Donc pour l'instant il n'y a pas d'actualité sur ce sujet. Ce n'est pas une question de savoir si le gouvernement est favorable ou pas. Le porteur du projet, Marc Collins en l'occurrence, est intervenu dans un contexte qui n'était pas approprié, et le MoU est devenu caduc. Mais il faudra poser la question au nouveau gouvernement pour connaitre la suite donnée à ce dossier."
L'entreprise Blue Frontiers, créée à Singapour spécialement pour le projet d'île flottante polynésienne, semble d'ailleurs s'habituer à l'idée qu'il va falloir déménager son prototype. Elle a lancé un grand concours international doté de 100 000 dollars (10 millions de francs) en cash pour celui qui arrivera à convaincre un gouvernement de construire le prototype dans ses eaux. Le processus repart de zéro puisque les entrepreneurs intéressés par cette récompense devront commencer par proposer un nouveau coin de mer pour l'île flottante et réaliser une vidéo expliquant pourquoi ce serait le lieu idéal... Ils devront ensuite faire inviter Blue Frontiers par le pays hôte. Le versement des 100 000 dollars dépendra de la publication d'une loi créant la zone économique spéciale réservée au projet. Toutes les étapes intermédiaires seront aussi récompensées avec une dotation dans la monnaie officielle de ces futures îles flottantes, le Varyon (voir encadré).
POURQUOI L'ÎLE FLOTTANTE POURRAIT METTRE LES VOILES
Si Blue Frontiers a respecté ses engagements en 2017 et a publié des études sur l'impact économique, législatif et environnemental de son projet polynésien, l'opinion publique locale semble avoir rejeté le projet.
Ainsi, les sondages lancés par les internautes sur les plus gros groupes Facebook du territoire donnent régulièrement un ratio allant jusqu'à 80% de votants opposés à l'initiative du Seasteading Institute, contre 20% qui lui sont favorables. Le samedi 7 avril, en pleine campagne électorale, entre 300 et 500 personnes manifestaient physiquement contre le projet à Teva i Uta, mobilisés par un collectif de pêcheurs inquiets de son impact environnemental et d'une éventuelle privatisation du lagon tahitien.
Le gouvernement, particulièrement à l'écoute de l'opinion sur ces grands projets d'investissements étrangers, était devenu très prudent sur le sujet avant même la campagne des élections territoriales. D'autant que l'opposition souverainiste, en particulier portée par la représentante Valentina Cross (réélue à l'Assemblée pour le parti indépendantiste Tavini Huiraatira et également conseillère municipale à Teva i Uta, la commune pressentie pour accueillir l'île flottante), s'est ruée dans la brèche et a mis le projet au pilori dans sa commune.
Au final le travail sur la loi créant une zone économique spéciale pour l'île flottante et ses bâtiments au sol, comme prévu dans le Memorendum of Understanding, n'a même jamais commencé... Il faut également préciser que l'État voit d'un très mauvais œil la création de cette zone économique spéciale contrôlée par des investisseurs étrangers. René Bidal, haut-commissaire de la République en Polynésie française, nous confirme en outre qu'il n'a jamais été contacté par les représentants de Blue Frontiers.
Peut-être que la fin des élections va désormais calmer les oppositions politiques au projet et lui donnera un nouveau souffle. Mais tant que Blue Frontiers n'arrive pas à changer l'opinion des Polynésiens, il ira de difficulté en difficulté. L'investisseur tente tout de même de dissiper les malentendus qui ont mobilisé l'opposition à son île flottante... Ainsi, le site web dédié serait en cours de traduction en tahitien. Il clame que le prototype ne sera pas un État dans l'État, qu'il ne coutera rien aux Polynésiens, que toutes les dernières technologies de développement durables seront utilisées pour protéger l'environnement, que le lagon ne sera pas privatisé... Mais en attendant cet éventuel retournement de l'opinion, les technophiles de Blue Frontiers ont décidé d'en revenir un très vieil adage : "il ne faut pas mettre tous ses œufs dans le même panier".
Le projet d'île flottante se fera-t-il vraiment à Tahiti ? Nous avons posé la question à Jean-Christophe Bouissou, le porte-parole du gouvernement sortant, et il nous a expliqué que "le projet, comme le président l'a annoncé, est devenu caduc comme prévu dans le MoU qui a été signé." Le MoU (Memorendum of Understanding ou Recueil d'intentions réciproques en français) signé en janvier 2017 encadrait le développement du projet conjointement entre la fondation Seasteading et le Pays. L'accord prévoyait que "les parties collaboreront activement afin de finaliser le cadre réglementaire spécial avant la fin de l'année 2017", ce qui n'a pas été fait.
Selon le ministre, "manifestement le site qu'ils semblaient préconiser posait problème, il y a quand même une réaction importante de la population. Et le sujet est arrivé à un moment... qui n'était pas propice. Donc pour l'instant il n'y a pas d'actualité sur ce sujet. Ce n'est pas une question de savoir si le gouvernement est favorable ou pas. Le porteur du projet, Marc Collins en l'occurrence, est intervenu dans un contexte qui n'était pas approprié, et le MoU est devenu caduc. Mais il faudra poser la question au nouveau gouvernement pour connaitre la suite donnée à ce dossier."
L'entreprise Blue Frontiers, créée à Singapour spécialement pour le projet d'île flottante polynésienne, semble d'ailleurs s'habituer à l'idée qu'il va falloir déménager son prototype. Elle a lancé un grand concours international doté de 100 000 dollars (10 millions de francs) en cash pour celui qui arrivera à convaincre un gouvernement de construire le prototype dans ses eaux. Le processus repart de zéro puisque les entrepreneurs intéressés par cette récompense devront commencer par proposer un nouveau coin de mer pour l'île flottante et réaliser une vidéo expliquant pourquoi ce serait le lieu idéal... Ils devront ensuite faire inviter Blue Frontiers par le pays hôte. Le versement des 100 000 dollars dépendra de la publication d'une loi créant la zone économique spéciale réservée au projet. Toutes les étapes intermédiaires seront aussi récompensées avec une dotation dans la monnaie officielle de ces futures îles flottantes, le Varyon (voir encadré).
POURQUOI L'ÎLE FLOTTANTE POURRAIT METTRE LES VOILES
Si Blue Frontiers a respecté ses engagements en 2017 et a publié des études sur l'impact économique, législatif et environnemental de son projet polynésien, l'opinion publique locale semble avoir rejeté le projet.
Ainsi, les sondages lancés par les internautes sur les plus gros groupes Facebook du territoire donnent régulièrement un ratio allant jusqu'à 80% de votants opposés à l'initiative du Seasteading Institute, contre 20% qui lui sont favorables. Le samedi 7 avril, en pleine campagne électorale, entre 300 et 500 personnes manifestaient physiquement contre le projet à Teva i Uta, mobilisés par un collectif de pêcheurs inquiets de son impact environnemental et d'une éventuelle privatisation du lagon tahitien.
Le gouvernement, particulièrement à l'écoute de l'opinion sur ces grands projets d'investissements étrangers, était devenu très prudent sur le sujet avant même la campagne des élections territoriales. D'autant que l'opposition souverainiste, en particulier portée par la représentante Valentina Cross (réélue à l'Assemblée pour le parti indépendantiste Tavini Huiraatira et également conseillère municipale à Teva i Uta, la commune pressentie pour accueillir l'île flottante), s'est ruée dans la brèche et a mis le projet au pilori dans sa commune.
Au final le travail sur la loi créant une zone économique spéciale pour l'île flottante et ses bâtiments au sol, comme prévu dans le Memorendum of Understanding, n'a même jamais commencé... Il faut également préciser que l'État voit d'un très mauvais œil la création de cette zone économique spéciale contrôlée par des investisseurs étrangers. René Bidal, haut-commissaire de la République en Polynésie française, nous confirme en outre qu'il n'a jamais été contacté par les représentants de Blue Frontiers.
Peut-être que la fin des élections va désormais calmer les oppositions politiques au projet et lui donnera un nouveau souffle. Mais tant que Blue Frontiers n'arrive pas à changer l'opinion des Polynésiens, il ira de difficulté en difficulté. L'investisseur tente tout de même de dissiper les malentendus qui ont mobilisé l'opposition à son île flottante... Ainsi, le site web dédié serait en cours de traduction en tahitien. Il clame que le prototype ne sera pas un État dans l'État, qu'il ne coutera rien aux Polynésiens, que toutes les dernières technologies de développement durables seront utilisées pour protéger l'environnement, que le lagon ne sera pas privatisé... Mais en attendant cet éventuel retournement de l'opinion, les technophiles de Blue Frontiers ont décidé d'en revenir un très vieil adage : "il ne faut pas mettre tous ses œufs dans le même panier".
Qu'est-ce que le Varyon ?
Le Varyon (voir www.blue-frontiers.com/fr/varyon) est le nom de la crypto-monnaie créée par Blue Frontiers pour financer son île flottante. Sa création avait été annoncée en janvier et son ICO est en cours en ce moment même. Une ICO est une "Initial Coin Offering", la mise sur le marché d'une nouvelle crypto-monnaie. L'offre permet au public d'acheter des Varyon en échange d'autres crypto-monnaies comme le Bitcoin ou l'Ethereum. Si l'opération est un succès, cette ICO devrait rapporter l'équivalent de 3 à 15 millions de dollars à Blue Frontiers, ce qui permettra de démarrer le projet officiellement. D'autres fonds seront tout de même requis puisque le prototype d'île flottante devrait coûter entre 36 et 60 millions de dollars, soit entre 3,6 et 6 milliards Fcfp. À noter que le Varyon sera la monnaie officielle des îles flottantes, servant à acheter les logements, les produits du quotidien, payer les services publics... Donc en acheter est un pari sur le succès du projet.
Si vous n'avez rien compris au Bitcoin, à la blockchain et aux ICO, lisez notre article sur le sujet (voir l'encadré en bas du lien) !
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