Le procès d’une “expédition punitive”


Tahiti, le 18 janvier 2024 – Deux hommes déjà bien connus de la justice ont été condamnés jeudi par le tribunal correctionnel pour avoir menacé et frappé un individu de 18 ans auquel ils reprochaient d'avoir commis un vol. 
 
Le tribunal correctionnel a jugé jeudi deux hommes de 25 et 29 ans qui étaient poursuivis pour des violences volontaires commises sur un jeune homme de 18 ans. Le 26 décembre, ce dernier s'était présenté, affolé, à la guérite du port de Papeete en expliquant qu'il venait d'être séquestré, menacé et frappé par les deux prévenus dans la salle de sports se trouvant au-dessus du X-Bar. La victime avait alors expliqué que le plus jeune des deux prévenus, un homme qu'il connaît depuis son enfance, lui avait ordonné de monter dans sa voiture et l'avait ensuite menacé avec une arme afin qu'il aille dans la salle de sports où il avait reçu plusieurs coups. Interpellé, le plus jeune des deux prévenus avait reconnu avoir voulu donner une leçon à celui qui avait cambriolé la maison de sa mère deux ans auparavant…
 
À la barre du tribunal jeudi, le prévenu de 25 ans a réaffirmé qu'il voulait corriger la victime en niant catégoriquement l'avoir menacée avec une arme. “Le vol de la télé de votre mère date d'il y a deux ans, vous êtes une personne rancunière !”, a ironisé le président du tribunal, traduisant ainsi le sentiment général de l'auditoire sur les réels motifs de ces faits qu'il a qualifiés d'“expédition punitive”. Le prévenu de 29 ans, qui a jadis eu une petite notoriété médiatique car il avait mis en place le premier élevage biologique de poules à Tahiti, a quant à lui assuré qu'il ne faisait qu'accompagner son ami et qu'il n'avait absolument rien à se reprocher. 
 
Une “petite correction”
 
Évoquant un dossier “déconcertant”, le procureur de la République n'a pas mâché ses mots quant à la version livrée par les prévenus lors de cette audience : “Si nous les écoutons, il s'agissait d'une promenade de santé au cours de laquelle ils ont discuté entre amis ! Je pense plutôt qu'il s'agit d'une expédition punitive pour une sombre histoire qui remonte à longtemps.” “Il est inadmissible de se faire justice soi-même”, a-t-il conclu avant de requérir trois ans de prison ferme contre le plus jeune des prévenus et deux ans ferme contre son acolyte. 
 
Constituée pour la défense des deux individus, Me Betty Hayoun a ensuite affirmé que ses clients comptaient seulement administrer une “petite correction” à la victime, une personne qui ne cesse de voler, afin de la remettre dans le droit chemin. Après en avoir délibéré, le tribunal a condamné le prévenu de 25 ans à deux ans de prison ferme et son coprévenu à un an de prison ferme. Le tout assorti du maintien en détention. 
 

Rédigé par Garance Colbert le Jeudi 18 Janvier 2024 à 16:33 | Lu 5694 fois