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Le premier collectif budgétaire de l'année adopté sur fond de polémique


PAPEETE, 11 mai 2017 - Le premier ajustement du budget général prévisionnel 2017 de la collectivité a été adopté jeudi grâce à une majorité de 41 voix, sur fond de polémique. Au cœur de ce collectif budgétaire, les aides libérées suite aux intempéries de début d’année.

Le collectif budgétaire adopté jeudi s’équilibre en section de fonctionnement à 3,01 milliards Fcfp et en section d’investissement 1,74 milliard Fcfp. Il s’est agi en priorité, pour les représentants polynésiens, de comptabiliser en écriture les mesures d’aides et de réparation financées en urgence ou à engager suite aux intempéries de début d’année (2,72 milliards Fcfp), de renflouer (158 millions Fcfp) et abonder (+400 millions Fcfp) le compte des dépenses imprévues et de prévoir le financement en 2017 des opérations hérités du Compte d’aide aux victimes de calamités (CAVC), clôturé en janvier dernier avant de verser le solde de 1,4 milliard Fcfp au budget du Pays.

Le budget prévisionnel du Régime de solidarité de la Polynésie française (RSPF) a également été modifié pour prendre en compte, d’une part, une dotation supplémentaire de 17,8 millions Fcfp tirée du Fonds pour l’emploi et la lutte contre la pauvreté (FELP). Celle-ci vient compenser des aides d’urgence tirées sur le régime de solidarité à la suite des fortes pluies. D’autre part, la dotation du RSPF est abondée du reliquat de 358 millions Fcfp de la participation de l’État au titre de l’exercice 2016, versée courant mars dernier. En conséquence, la dotation du RSPF pour 2017 est augmentée de 375,8 millions Fcfp pour s’établir à 28,2 milliards Fcfp pour l’exercice.

Mais l’essentiel des débats s’est concentré jeudi, par le biais de multiples interventions du groupe Tahoera’a Huiraatira, sur le choix du gouvernement Fritch et de sa majorité (RMA) à l’assemblée de supprimer le Compte d’aide aux victimes de calamités (CAVC), en lui préférant un "compte des dépenses imprévues".

La représentante Gilda Vaiho est tout de suite montée au créneau en reprochant à la majorité gouvernementale de proposer ce collectif budgétaire 4 mois après les premiers dégâts liés aux intempéries : "On se trouve devant l’inefficacité du compte des dépenses imprévues", a-t-elle regretté en soulignant "la lenteur de la saisine de l’assemblée" qui aurait selon elle "retardé la mise à l’abri des sinistrés". Et d’interpeller : "gouverner, c’est prévoir !". La représentante orange dénonce également le versement du solde de 1,4 milliard Fcfp du CAVC dans le budget général de la collectivité : "un budget de combat, pour reprendre les termes d’Edouard Fritch. Nous ne sommes pas dupes, il s’agit bien d’un budget de combat pour acheter des voix !", a-t-elle accusé.

Problème de compréhension ?

Le représentant RMA Antonio Perez est intervenu de suite pour reprocher au groupe Tahoera’a de se livrer à une "exploitation démagogique de la détresse des gens". Le gouvernement s’était engagé, dès les premiers recensements des dégâts et sinistres occasionnés par les intempéries de début d’année, à mettre en œuvre tous les moyens disponibles de la collectivité et à agir en urgence auprès des populations, des entreprises et sur les infrastructures publiques. Cela s’est traduit par la déclaration de l’état de calamité naturelle sur les communes des îles de Tahiti et Moorea et sur certaines communes des Tuamotu mais aussi par la mise en place, dès janvier 2017, d’une commission de recensement des sinistres et de répartition des secours afin de répondre rapidement aux besoins urgents des populations. Les premières aides avaient été débloquées dès le 25 janvier, soit 4 jours à peine après les fortes pluies du 21 et 3 jours après la première déclaration de calamité naturelle. "Le compte des dépenses imprévues a permis une réactivité accrue", a contredit Antonio Perez, là où l'emploi du CAVC aurait nécessité une séance plénière ad hoc de l'assemblée, durant l'intersession, pour pourvoir le compte spécial des finances nécessaires.

Armelle Merceron (RMA) a préféré voir dans l’interpellation des élus Tahoera’a un "problème de compréhension" plus que "de la mauvaise foi" : "Cette organisation a été imaginée pour plus d’efficacité et de réactivité des interventions de secours : les moyens financiers existaient. Ils ont été employés. Nous sommes là aujourd’hui pour ré-abonder les lignes budgétaires utilisées", a-t-elle expliqué à l’attention de Gilda Vaiho. "Je pense que nous devrions plutôt saluer la capacité d’anticipation du gouvernement".

"Une réelle incompréhension du dispositif" qu’a également tenu à souligner le vice-président Teva Rohfritsch, ministre de l’économie et des finances. "La démonstration a été faite que sans le CAVC, nous sommes intervenus. C’est pour ça que nous sommes devant vous aujourd’hui", a-t-il insisté, agacé : "il ne faut pas faire de la récupération politique sur la situation des personnes sinistrées".

Depuis sa création, suite aux intempéries de janvier, la commission de recensement des sinistres et de répartition des secours s’est réunie à cinq reprises et a validé l’octroi de 304 dispositifs AAHI, 59 relogements en fare, 25 relogements AISPF ; 536 aides individuelles ; l’indemnisation de 71 exploitations agricoles sinistrées ; des aides en faveur de 264 entreprises et 214 aides pour le rachat de véhicules sinistrés. Sur les infrastructures publiques, seuls des travaux de réparation d’urgence ont été effectués. L’estimation des travaux de réparation définitifs est en cours.

L’enveloppe globale votée jeudi pour compenser ces dépenses a été de 2,725 milliards Fcfp dont 1,436 milliard Fcfp en section de fonctionnement et 1,289 milliard Fcfp en section d’investissement.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Jeudi 11 Mai 2017 à 14:23 | Lu 2101 fois