Le jardin de corail de Taha'a nettoyé de ses “mauvaises herbes”


Taha’a, le 2 Octobre 2022 – Un grand projet de restauration du jardin de corail de Taha’a a commencé la semaine dernière. Il durera un an et consiste à arracher les algues présentes en surnombre. Une prolifération due à l'activité humaine qui conduit à la lente mort des coraux si rien n’est fait sur ce site très fréquenté.
 
Le jardin de corail de Taha’a, situé entre le motu Tau Tau et le motu Tu Tae à Taha’a, fait face à un développement massif de macro-algues, dont la majorité est la turbinaria ornata, une algue marron que l’on aperçoit généralement flottant en banc. La situation est préoccupante puisque ces algues prolifèrent et étouffent les parties vivantes du jardin de corail, tuant petit à petit le corail qu'elles recouvrent. Cette prolifération est due à l’activité humaine, notamment tout ce qui est déversé dans l’eau, tels les produits ménagers, qui contiennent entre autres du nitrate et phosphate, qui sont des nutriments pour ces algues.
 
L’exceptionnel jardin de corail de Taha’a, apprécié par les divers prestataires touristiques, est donc envahi d’algues. Le problème est commun en Polynésie et traîne depuis des années, comme nous l’explique Jérôme Sowinski, spécialisé dans la préservation corallienne : “Cette prolifération d’algues, c’est malheureusement un constat général. Même à Bora Bora où on intervient, le constat est le même dans les 14 éco-sites.”
 
Une restauration pérenne
 
Un grand projet de restauration a donc été mis en place, et consiste à l’arrachage des algues. Le jardin de corail a déjà fait l’objet de campagnes d’arrachage ponctuelles, mais celles-ci n’étaient pas suffisamment poussées pour régler le problème. Ici, le projet est de nettoyer chaque mois pendant un an. Le chantier a commencé par une première mission de cinq jours, du lundi 26 au vendredi 30 septembre.

Espace Bleu et Sea Narea, spécialisés dans la préservation corallienne constituent l'équipe missionnée pour ces interventions. Espace Bleu s’occupait à l’origine de la maintenance des jardins de corail dans les divers hôtels de Bora Bora et Taha’a. Depuis, l’entreprise se diversifie avec la volonté d’agir également dans le milieu naturel. C’est pour cela qu’a été créée Sea Narea, elle propose des animations dans les hôtels, consistant à expliquer ce qu’est le corail et les divers enjeux qui l’entourent. Les bénéfices de la vente de ces animations servent ensuite à financer des actions de restaurations en milieu naturel ou des actions de sensibilisation auprès de la population.
 

En plus de l’arrachage des algues, l’équipe se charge de rajouter de nouvelles colonies de corail sur les zones nettoyées. En effet, le corail a une croissance lente, de 15 cm par an pour le plus rapide, à 1 cm pour les plus lents. Laisser les coraux nettoyés ainsi à nu ne donnerait qu’un nouveau terrain favorable pour l’installation de nouvelles algues. Après une semaine de travail, le résultat est bien présent sur la cinquantaine de mètres nettoyés. La différence est frappante entre la partie traitée et celles qui restent à faire.
 
Le projet a été mis en place grâce à deux clientes américaines ayant séjourné en janvier à l’hôtel Le Taha’a by Pearl Resorts, situé juste à côté du jardin de corail, qui ont constaté la situation et ont proposé de financer la restauration par la fondation américaine Scintilla Foundation. L’hôtel participe également en mettant à disposition des moyens logistiques et organisationnels (accueil et hébergement) des équipes de travail.
 

Avant l'arrachage des algues.

La même zone après l'arrachage des algues.

Jérôme Sowinski, spécialisé dans la préservation corallienne : “Stopper l'hémorragie”
 
“Il y a des méthodes particulières, puisqu’il peut y avoir de la vie dedans, il y a des coraux en dessous. Donc il faut abîmer le moins possible ce qu’il y a autour. Il y a aussi des endroits qu’on ne va pas toucher car on a vu qu’un poulpe vivait là par exemple. Le but est de protéger la biodiversité, donc il faut procéder à l’arrachage de manière mesurée et réfléchie. Certaines variétés d’algues, comme la sargasse, peuvent aussi contenir de la vie. Donc les algues visées ici sont surtout la turbinaria et l’halimeda qui sont trop présentes dans le jardin. Ces algues ont bien des prédateurs naturels, une étude à Bora a commencé sur l’herbivorie des oursins, les vana, qui mangent ces algues, mais ici il n’y en a pas. Et il n’est pas prévu d’en introduire, car cela pourrait perturber l’écosystème. L’arrachage est donc la seule solution pour stopper l’hémorragie.”

Rédigé par V.Leroi le Dimanche 2 Octobre 2022 à 13:32 | Lu 2471 fois