Le conflit foncier tourne à la tentative de meurtre


Crédit photo : Garance Colbert
Tahiti, le 13 mars 2023 – Le procès d'un retraité de 70 ans poursuivi pour avoir, le 20 février 2021 à Mataiea, foncé sur son voisin avec lequel il avait un litige foncier, s'est ouvert devant la cour d'assises lundi. L'accusé, qui a toujours affirmé qu'il avait été agressé par la victime avant de tenter de l'écraser, encourt trente de réclusion criminelle. 

Alors que la cour d'assises de Papeete examine généralement des dossiers de viols sur mineurs ou de coups mortels sur fond d'alcool, elle s'est penchée lundi matin sur le cas d'un retraité de 70 ans, père de sept enfants, qui est poursuivi pour une tentative de meurtre commise sur son voisin il y a deux ans pour un conflit lié à des terres.
 
Les policiers municipaux de Teva I Uta avaient été informés le 20 février 2021 peu après 19 heures qu'une bagarre avait éclaté au PK 46 à Mataiea et qu'un homme était blessé. Arrivés sur place, les mūto’i avaient découvert un homme de 59 ans gravement blessé qui était allongé sur le sol alors qu'une “foule alcoolisé”évoluait autour de la victime dans une “ambiance tendue”. Les premiers témoignages recueillis sur place avaient permis d'établir que c'est un habitant de la servitude, un retraité alors âgé de 68 ans, qui avait foncé sur la victime avec son véhicule après une altercation verbale. Interrogé, le conducteur de la voiture avait reconnu avoir “délibérément” foncé sur son voisin en expliquant cependant que ce dernier avait tenté de lui bloquer l'accès à sa maison. Un témoin de la scène ainsi qu'un autre habitant de la servitude avaient toutefois contredit cette version en indiquant que la victime se trouvait sur le côté de la route et que l'accusé avait volontairement tourné pour l'écraser. 
 
Multiples fractures
 
Prise en charge par les secours, la victime avait été immédiatement hospitalisée. Le médecin légiste qui l'avait examinée avait alors relevé qu'elle souffrait notamment d'un traumatisme crânien, d'un “traumatisme par écrasement de la face avec multiples fractures du nez”, d'un traumatisme du rachis ainsi que de “lésions et cicatrices dont une probablement attribuable à une brulure par le pot d'échappement”. L'incapacité totale de travail initiale fixée à huit jours avait finalement été ré-évaluée et portée à 21 jours. Les éléments recueillis par les enquêteurs dans le cadre de l'information judiciaire ouverte pour tentative de meurtre avaient permis de démontrer que l'accusé et la victime étaient en conflit pour une question de partage des terres dans la servitude.
 
Deux ans après les faits, le procès de l'accusé – qui comparaît détenu – s'est donc ouvert devant la cour d'assises de Papeete lundi matin. En cette première matinée de débats et comme il est d'usage, il a d'abord été question de la personnalité de cet ancien entrepreneur du BTP, père de sept enfants et catholique pratiquant décrit par ses proches comme un bon père et un bon grand-père. Alors que sa femme affirmait à la barre que son époux avait toujours été un homme calme, la présidente de la cour d'assises a rappelé que le septuagénaire avait déjà agressé l'un de ses voisins en 2018 toujours pour un conflit de nature foncière. Il avait à l'époque mis un coup de barre de fer sur la tête d'un jeune homme qui tentait de s'interposer et avait été condamné en correctionnelle à deux mois de prison avec sursis. 
 
Déclarations mises à mal
 
Après les proches de l'accusé, ce sont les enquêteurs de la gendarmerie en charge de cette affaire qui ont été entendus par la cour. Tel qu'il l'avait déjà relaté dans le cadre de l'information judiciaire, le directeur d'enquête a rappelé que lorsqu'il était arrivé sur les lieux, la situation était très “tendue” et que les proches de l'accusé et de la victime se trouvaient sur place. Il a également expliqué que la version de l'accusé selon laquelle son voisin voulait l'agresser avait été rapidement mise à mal par plusieurs témoins dont un policier municipal qui habitait dans la servitude. 
 
Le procès doit reprendre mardi matin avec, notamment, l'audition des différents experts de ce dossier. L'accusé, qui fêtera ses 71 ans en mai prochain, encourt la réclusion criminelle s'il est reconnu coupable de tentative de meurtre. 
 

Rédigé par Garance Colbert le Lundi 13 Mars 2023 à 18:48 | Lu 2977 fois