Le budget 2015 de la Polynésie française sera guidé par la raison


Le vice-président de la Polynésie à la tribune gouvernementale lors du débat sur les orientations budgétaires 2015.
PAPEETE, le 30 octobre 2014. Le débat d'orientations budgétaires en séance plénière de l'assemblée de Polynésie française, ce jeudi matin, a permis au gouvernement d'Edouard Fritch d'affirmer une continuité d'action avec son prédécesseur pour l'année 2015 à venir. Pourtant certaines méthodes changent pour aller vers plus de réalisme.
Edouard Fritch a ouvert le débat d'orientations budgétaires, par un plaidoyer de sa méthode de gouvernance "ouverte au dialogue" avant de présenter l'esprit du projet de budget 2015 qui sera transmis dès la semaine prochaine aux élus. "Aux rumeurs de fractures ou de dissensions colportées de ci, de là, je répondrai par l’unité pleine et entière de notre majorité tout au long de cette session budgétaire", a-t-il affirmé. Le projet de budget 2015 est présenté comme la poursuite de l'"œuvre de stabilisation des comptes publics en mettant l’accent sur les réformes structurelles qui doivent nécessairement être conduites".
Il évoque ainsi une réforme de la Protection sociale généralisée, la réforme de l'administration, la fluidification du marché de l'emploi, l'installation en Polynésie de l'Autorité polynésienne de la concurrence. Edouard Fritch a par ailleurs confirmé la pause fiscale -déjà annoncée-pour 2015, se laissant une année de réflexion sur la réforme de l'impôt sur les transactions dont la mise en application sera repoussée à 2016 "à produit fiscal constant".


Si le président du Pays est resté volontairement vague sur les montants des crédits et enveloppes budgétaires dans son discours, Nuihau Laurey de son côté s'est livré à une démonstration chiffrée sur certains points particuliers. "Poursuivre la politique de maîtrise des dépenses est le seul moyen de générer des ressources propres" affirme-t-il. Sauf que les 31 milliards de Fcfp annuels du poste des emplois publics a bien du mal à se rétrécir en dépit de successifs plans de départs volontaires. La conjoncture locale de l'emploi ne se prêtant guère à abandonner un statut de fonctionnaire. Avec des chiffres précis, le vice-président va plus loin encore et passe la moitié de son discours à tenter de faire comprendre aux ministres l'intérêt comptable de prévoir un budget le plus réaliste possible. "Plus de la moitié des crédits sollicités ne sont pas utilisés" indique-t-il. La preuve encore sur le budget 2015, où près de 23 milliards de Fcfp de crédits d'investissement de 2014 seront reportés. "Cette surdotation tend à altérer la sincérité budgétaire (…) Cet affichage des crédits d'investissements par milliards masque un décalage ! Soyons humbles, modestes, raisonnables dans nos ambitions budgétaires et nous serons plus crédibles" poursuit le ministre des finances.
Il termine avec un passage rapide sur l'endettement du Pays établi à 93 milliards de Fcfp "important, mais pas déraisonnable" puisqu'il représente moins de 20% du PIB. En 2015 pour répondre à cette exigence de vérité budgétaire, le Pays ne devrait pas emprunter plus de 7 milliards de Fcfp, deux fois moins que cette année. Dans l'après-midi, les élus de l'assemblée ont adopté le 4e et dernier collectif modifiant le budget 2014 du Pays. Il a été approuvé par 46 voix pour et 11 abstention.


Les projets Mahana Beach à Tahiti et Moorea sont sur pause

"Ne confondons pas vitesse et précipitation. Il en va de notre crédibilité" voilà une petite phrase du président Edouard Fritch qui en dit long au sujet des grands projets entamés par lé précédent gouvernement Tahoeraa. "L’importance de l’investissement et des financements en jeu, nécessitent d’affiner très précisément la démarche qui doit être retenue pour assurer le succès de ce projet d’une envergure encore inconnue jusqu’ici. Il nous faut trouver les investisseurs pour porter ce projet, mais également lever quelques difficultés administratives qui se font jour".
La preuve que ces grands projets sont en situation d'attente est venue d'une autre déclaration du président, au cours du débat : "Nous aurions pu inscrire près de 10 milliards de Fcfp pour les travaux d'infrastructures du Tahiti Mahana Beach et près de 5 milliards de Fcfp pour les acquisitions foncières du Moorea Mahana Beach, mais ces projets ne sont pas encore suffisamment précisés".

C'est sur cette question des grands projets que la fissure de la majorité orange est la plus sensible. Ainsi, Elise Vanaa pour le groupe Tahoeraa a déclaré : "Vous avez souhaité un peu de temps pour considérer ces grands projets, pour vous les approprier, et vous assurer également de certains aspects juridiques comme vous venez de nous l’expliquer. Nous ne doutons pas que ces précautions sont nécessaires vu la taille des projets. Mais ne prenez pas trop de temps, car ces chantiers sont attendus par des entreprises qui sont à bout de souffle. Ils sont attendus par nos populations qui y verront enfin la concrétisation de la reprise et la fin de leurs difficultés".

Nicole Bouteau (A Ti'a Porinetia)

"J'ai l'impression que le groupe A Ti'a Porinetia montre plus d'enthousiasme sur vos orientations budgétaires que la majorité orange qui distille quelques messages subliminaux qui nous interpellent".


Antony Géros (UPLD)

"La première impression de ce débat d'orientations budgétaires est le paradoxe sans lequel il s'inscrit : une extrême transparence des résultats de votre prédécesseur et des objectifs à atteindre que ne viennent pas corréler les moyens dont dispose aujourd'hui le Pays (…) Après une année de promesses électorales et de saupoudrage médiatique, l'heure est au bilan. D'extravagances en invraisemblances, le seul point que l'on y trouve est la reprise mot pour mot du DOB 2014 : on y trouve finalement que poursuite, reprise et reconduction".

Elise Vanaa (Tahoeraa)

"Ce débat préalable nous permet précisément d’exprimer nos impressions et nos attentes. Voyez, Monsieur le Président, dans nos interrogations et les ajustements que nous souhaitons, notre volonté d’être constructif et de vous soutenir dans l’œuvre de redressement, dont nous savions tous qu’elle serait difficile et longue".

Rédigé par Mireille Loubet le Jeudi 30 Octobre 2014 à 17:00 | Lu 1387 fois