Le Pays veut revisiter les aides aux pensions de famille


© Greg Boissy
Tahiti, le 16 février 2023 – La commission du tourisme à l'assemblée a examiné, vendredi dernier, trois projets de loi sur le tourisme. Fort des excellents chiffres de fréquentation de 2022, le Pays souhaite améliorer et diversifier l'hébergement . Pour cela, il propose de revoir le dispositif d'aides en vigueur en faveur des pensions pour la réalisation de travaux. Des aides dont l'obtention est soumise au classement de l'établissement. Il est donc également proposé de mettre en place un “classement provisoire” afin d'accélérer l'accès à ces aides.
 
L'année 2022 a connu des chiffres du tourisme exceptionnels, comme Tahiti Infos le relatait dans ses colonnes, mardi. En effet, on comptait 218 000 touristes (hors excursionnistes) sur l'année et l'hébergement terrestre a atteint plus de 90% de la fréquentation de 2019 avec 2,2 millions de nuitées vendues (pensions de famille et hôtels confondus). Afin de soutenir ce secteur-clé de l'économie et alors que le Pays vise 280 000 touristes par an – un “objectif atteignable” selon Tahiti Tourisme – le président du Pays a transmis à l'assemblée de la Polynésie trois projets de loi du Pays relatives à la réglementation en matière d'hébergement de tourisme, aux aides en faveur des pensions de famille, ainsi qu'au pilotage et à la déconcentration de la politique touristique. Ces trois textes ont été examinés vendredi dernier par la commission du tourisme, de l'écologie, de la culture, de l'aménagement du territoire et du transport aérien à l'assemblée, qui a leur donné un avis favorable à l'unanimité.
 
Le premier texte, relatif à la réglementation en matière d'hébergement de tourisme, porte modification de la loi du 29 mars 2018 et a pour objectif d'accompagner les professionnels dans la montée en gamme de leurs établissements. L’amélioration et la diversification de l’hébergement étant l'un des objectifs majeurs de la Stratégie de développement touristique 2022-2027, baptisée Fārira'a Manihi 2027. Alors que la loi avait déjà été modifiée en février 2021 afin de mieux encadrer l'activité de meublés de tourisme (type Airbnb), le texte propose tout d'abord de préciser la définition d'une pension de famille pour bien faire la différenciation avec les meublés. Ainsi, une pension de famille doit disposer “d’un espace commun affecté au service du petit déjeuner”.
 
Le projet de loi propose ensuite de modifier les dispositions relatives au classement des établissements hôteliers et pensions de famille, avec à la clé un système qui leur ouvre la possibilité de bénéficier d’aides publiques et d’avantages fiscaux. Estimant que les villas de luxe sont un marché de niche qui ne nécessite pas ces aides pour se développer, il est proposé de les retirer de ce classement. Pour les autres établissements, le texte propose d'établir un “classement provisoire” afin d'accélérer leur accès aux avantages fiscaux et aides publiques. Ainsi, le récépissé de dépôt de dossier complet de demande de classement vaudra désormais classement provisoire donnant droit à ces avantages. Le classement provisoire sera valable un an mais pourra être prorogé pendant deux ans. En revanche, si à l'issue de l'examen de la demande, celle-ci est refusée, les aides perçues pendant ce laps de temps devront être remboursées.

Jusqu'à 10 millions de Fcfp d'aides

Le deuxième texte examiné en commission s'inscrit dans le prolongement du premier. Il propose de revoir le dispositif d'aides en vigueur en faveur des pensions de familles. Jusqu'à présent, l'aide au développement s'élevait à 50% de la dépense totale (hors taxes) pour Tahiti et 60% pour les îles. Elle était plafonnée à 10 millions de Fcfp pour une création, 7 millions pour une extension ou une rénovation et 5 millions pour les autres programmes de développement. Dans le nouveau dispositif, l'aide au développement est différenciée de l'aide à la mise en conformité, qui peuvent toutefois se cumuler. La loi vise ainsi à encourager la mise en conformité, car l'année dernière, 56 pensions étaient inclassables pour cause de non-conformité aux normes de sécurité. Dorénavant, l'aide au développement ne sera plus que de 40% du montant des travaux pour Tahiti et 50% pour les îles, mais le plafond sera de 10 millions de Fcfp, quel que soit le type de travaux. À noter que comme auparavant, une majoration de 20% pourra être accordée pour des travaux relatifs à la performance environnementale et à l'accessibilité des personnes à mobilité réduite. De son côté, l'aide à la mise en conformité sera de 50% du montant des travaux, quelle que soit l'île, et plafonnée à 1,5 million de Fcfp.
 
En 2022, sur 284 établissements, seulement 84 pensions étaient classées ou en cours de classement. Par ces mesures, le gouvernement veut inciter les établissements à être classés, synonyme d'un certain gage de qualité. Pour bénéficier de ces aides, les exploitants de pension doivent d'ailleurs s'engager à faire la demande de classement. Parmi les autres obligations, on notera celle de poursuivre l'exploitation pendant 10 ans afin d'éviter la spéculation sur la vente ou encore celle de suivre une formation “pluridisciplinaire (commercialisation, comptabilité, accueil...)” afin de “maintenir la qualité de service”.

Les comités touristiques, des acteurs à privilégier

Avec sa stratégie touristique 2027, le Pays souhaite mieux répartir les flux touristiques entre les îles, qui font actuellement l'objet d'une grande disparité, avec une forte concentration sur l'archipel de la Société. Pour ce faire, il soumet un projet de loi du Pays pour renforcer le pilotage et la déconcentration de la politique touristique. Il propose ainsi de donner un cadre juridique aux comités de tourisme, qui sont des organismes de droit privé formés en association et agissant à titre bénévole. On en compte actuellement 27 répartis sur les cinq archipels, qui ont pour missions principales la coordination des professionnels du secteur, la sensibilisation des populations à l'accueil et le développement du tourisme durable. Le projet de loi prévoit la mise en place d’un outil de pilotage pluriannuel et une reconnaissance et un soutien accru à ces comités.
 
En se basant sur une étude réalisée en mai 2022 par Tahiti Tourisme, il est également proposé de classer les comités selon trois catégories : les “relais de la destination” situés dans les îles les plus touristiques ; les “développeurs” dans les îles en cours de développement touristique ; et les “animateurs locaux” situés dans les îles avec une aspiration au développement de l’activité. La mise en œuvre de ce projet est organisée en trois phases. D'abord une phase de mise à niveau des comités actuels, suivie d'une phase de reconnaissance des comités par agrément du président du Pays pour une durée de 5 ans, puis la mise en place de conventions pluriannuelles dans lesquelles viendront s'inscrire les actions menées par les comités. Elles définiront des objectifs à atteindre en fonction des moyens humains et matériels.

Rédigé par Anne-Laure Guffroy le Jeudi 16 Février 2023 à 15:31 | Lu 2259 fois