Le Pays bétonne sa relance


Tahiti, le 12 juillet 2020 - Avant de présenter les détails de son plan de relance annoncé "dans le courant du mois d'août", Édouard Fritch veut faire du BTP le "moteur de la relance à court terme". Le gouvernement a présenté, vendredi, le détail de ses chantiers en cours et à venir, pour lesquels il entend accélérer les procédures. Objectif : passer de 21 à 30 milliards de liquidations d'ici la fin de l'année.
 
Édouard Fritch et la quasi-totalité du gouvernement étaient réunis, vendredi matin, à la présidence, en face de plusieurs chefs d'entreprises du secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) et des médias, pour présenter le premier volet du "plan de relance" pour la Polynésie française. Plus exactement, c'est une sorte d'étape intermédiaire entre les premières "mesures d'urgence" débloquées pendant la crise et le véritable plan de relance "en cours de finalisation" et qui "sera présenté dans le courant du mois d'août", dixit Édouard Fritch, qui a été présentée vendredi. Une étape d'accélération de la commande publique "déjà inscrite dans le budget 2020", consistant à faire du BTP le "moteur de la relance à court terme".
 
Et sur ce plan, pas besoin d'emprunt ou d'avance de trésorerie. "Grâce à notre gestion budgétaire saine et rigoureuse des deniers publics durant les années passées, nous avons pu dégager des capacités d’investissement importantes. Il s’agit, aujourd’hui, de les mobiliser au mieux et très rapidement", a indiqué Édouard Fritch. L'enveloppe d'investissement du Pays est en effet conséquente : 61,7 milliards de Fcfp de commandes, marchés ou travaux à entamer, poursuivre ou finaliser sur l'ensemble de l'année 2020. Tout l'enjeu sera de réussir à les mobiliser. Le vice-président, Teva Rohfritsch, annonce en effet 20,9 milliards de Fcfp de "liquidations" – donc de chantiers terminés – actuellement prévues d'ici à la fin de l'année. Et il se fixe comme objectif d'accélérer les procédures administratives pour que ce montant atteigne les 30 milliards de Fcfp.
 
Une commission, un comité, un observatoire
 
Parmi les "outils" annoncés par le Pays pour atteindre cet objectif ambitieux, le gouvernement a rappelé son annonce d'un "assouplissement des procédures publiques" pendant trois ans. "Ça ne veut pas dire qu'on sera moins regardant", a souhaité préciser Teva Rohfritsch, "ça veut dire qu'on fera en sorte de traiter et transmettre les dossiers plus vite". Les "seuils et formalités" seront néanmoins "adaptés" pendant cette période, confirme bien le document de travail du Pays.
 
Une "commission interministérielle de relance" sera également créée et réunira "tous les services instructeurs sous l'autorité du président et du vice-président". Un organe d'accélération des procédures là-aussi, pour centraliser la validation des "permis de construire prioritaires". Enfin, un "comité de pilotage des investissements publics" sera créé pour la planification et le suivi des projets côté public (Pays-État-Communes) et l'Observatoire du BTP sera "réactivé" pour le suivi avec le privé.
 
Logement et Équipement en force
 
Vendredi matin, l'ensemble des ministres, à l'exception des absentes Isabelle Sachet et Christelle Lehartel, ont présenté les principaux chantiers en cours dans chacun de leurs ministères (voir encadré). Ceux du Logement et de l'Équipement trustant sans surprise la plus grosse part du gâteau : 8,7 milliards de liquidations prévues pour l'Équipement et 4,9 milliards pour le Logement, sur un total de près de 21 milliards… Visiblement "rassurés", les acteurs du BTP présents sur place ont salué cette revue de détail.
 
On attend maintenant le plan de relance dans les semaines à venir pour "soutenir notre économie et pallier les difficultés sociales", selon Édouard Fritch. "Nous ne sommes pas au bout de nos peines", a prévenu le président. "Sur le plan économique, les experts assurent que le plus dur reste probablement à venir". Un plan qui est, pour l'heure, en phase de "concertation", mais qui sera nécessairement tributaire du montant de l'emprunt garanti par l'État. Un emprunt dont le montant total - estimé à 56 milliards - n'est toujours pas, pour le coup, garanti par Paris.
 

Quels grands chantiers ?

Le gouvernement a présenté avec force de détails les grands chantiers prévus, déjà lancés ou en "instance de lancement" d'ici la fin de l'année et le début 2021.
 
Pour le ministère de l'Équipement, on note la reconstruction du pont de la rivière Hamuta sur l'avenue de Gaulle pour 450 millions de Fcfp de budget, l'aménagement de la traversée de Papeari pour 450 millions, mais aussi dans les îles, les aérodromes de Kaukura et Takume pour 500 millions chacun, la marina de Moerai à Rurutu pour 537 millions, les débarcadères de Nukutavake et Hereheretue pour 450 millions chacun.
 
Côté Logement, parmi les nombreux chantiers en projet, les 46 logements OPH Amoe 1 à Mahina représentent un budget de 1,6 milliard, les 68 logements OPH Timiona 2 à Pirae 1,8 milliard ou encore les 48 logements de Hotuarea Est à Faa'a 1,3 milliard.
 
Le Tourisme prévoit quant à lui 670 millions de Fcfp pour l'aménagement de Vaitupa ou encore 100 millions pour les trois cascades à Tiarei. La Culture annonce 747 millions pour l'aménagement et la rénovation du Musée de Tahiti et des îles.
 
Enfin, notons parmi les "projets en cours" que le gouvernement évoque pêle-mêle l'aménagement du centre de mémoire des essais nucléaires, l'aménagement et les équipements publics du projet du Village tahitien, l'aménagement de la zone biomarine de Faratea, la construction du pôle de recherche à l'UPF ou encore le Swac de l'hôpital…
 

Heirangi Nouveau, président de la chambre syndicale des métiers du génie civil : "On est agréablement rassurés"

Vous êtes rassuré par ces annonces pour le secteur du BTP ?
 
"Il n'y a pas que le BTP, ce sont toutes les entreprises en général. On est confronté à une crise. Le président a annoncé hier que les mesures sociales ont pesé près de 11 milliards de Fcfp et on se demande combien elles vont encore coûter à l'avenir. On s'est demandé à un moment donné si le gouvernement n'allait pas être obligé de prélever dans le budget d'investissement pour financer le fonctionnement du Pays et payer ces mesures sociales. On était dans l'incertitude."
 
Comment se porte votre secteur aujourd'hui ?
 
"Je pense qu'il n'y a pas eu de pertes d'emploi à l'échelle de ce qui se passe dans le tourisme. Vous vous rappelez que, lors du confinement, le BTP a travaillé de concert avec le gouvernement pour rapidement mettre en place des mesures de gestes barrières professionnels. C'est-à-dire pour continuer à travailler tout en respectant les règles sanitaires. Donc nous n'avons pas attendu la fin du confinement pour reprendre une activité et nous avons pu limiter la casse. Donc aujourd'hui, on va dire que le BTP a pu limiter la casse. Et avec les chiffres qui nous sont annoncés, on est agréablement rassurés pour l'avenir ?"
 
Est-ce que le Pays paye rapidement ses factures ?
 
"Depuis la fin de l'année dernière, on n'a pas de retard de paiement du Pays."
 

Rédigé par Antoine Samoyeau le Dimanche 12 Juillet 2020 à 15:26 | Lu 2645 fois