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Le Mediator responsable d'au moins 1.300 morts en France


Le Mediator responsable d'au moins 1.300 morts en France
PARIS, 9 février 2012 (AFP) - Le Mediator a "probablement" causé 3.100 hospitalisations et au moins 1.300 morts entre 1976 et 2009 en France, selon une étude sur la mortalité attribuable à ce médicament, la première publiée dans une revue scientifique internationale.

Il s'agit vraisemblablement d'une "sous-estimation", a déclaré à l'AFP le chercheur Mahmoud Zureik, coauteur de cette étude, publiée jeudi dans le journal spécialisé Pharmacoepidemiology & Drug Safety, qui conforte des données préliminaires déjà évoquées.

La parution de cet article est un élément de plus au dossier de l'affaire du coupe-faim des laboratoires Servier, qui fait l'objet de plusieurs procédures judiciaires en cours.

Les deux auteurs de l'étude -- Mahmoud Zureik, directeur de recherche de l'Inserm, et l'épidémiologiste Agnès Fournier -- avaient fin 2010 avancé une fourchette de 1.000 à 2.000 morts, chiffre jugé "pas du tout exagéré" par l'épidémiologiste Catherine Hill (Institut Gustave Roussy, Villejuif).

L'étude s'est penchée sur un des effets néfastes graves du Mediator, les atteintes des valves cardiaques ou valvulopathies à l'origine d'hospitalisations, d'opérations et de décès.

Le Mediator des laboratoires Servier, qui contient un coupe-faim, le benfluorex, a été indiqué, d'abord contre l'excès de graisses du sang, puis comme traitement adjuvant chez les diabétiques en surpoids, avant son retrait du marché en novembre 2009. Il a en fait été largement prescrit pour maigrir.

145 millions de boîtes de Mediator au total ont été vendues en France avant son retrait du marché, selon le fabricant.

Les auteurs, qui avaient déjà communiqué des estimations à l'agence du médicament (Afssaps) en 2010, réalisent avec cette publication une étude plus fouillée et précise.

Ils ont établi leurs calculs avec des données de l’Assurance maladie portant sur 303.336 patients ayant eu au moins un remboursement en 2006 pour le Mediator, 54% l'utilisant encore en 2007, 39% en 2008 et 31% en 2009.

Les chercheurs ont extrapolé le nombre d'hospitalisations pour insuffisance valvulaire entre 2006 et 2009, en partant de ceux qui avaient pris du Mediator en 2006, rapportés au nombre total d’utilisateurs du produit entre 1976 et 2009.

La moitié des gens hospitalisés ont été opérés et donc avaient des formes graves de valvulopathies, selon M. Zureik.

Pour évaluer la mortalité, les chercheurs ont retenu une étude américaine montrant qu'en cas d'atteinte valvulaire modérée à sévère, le risque de décès prématuré était de 43%.

"L'étude ne prend en compte que les gros consommateurs (54 boîtes prises sur deux ans et demi environ)", précise à l'AFP Mahmoud Zureik.

Elle n'englobe pas l'autre grave méfait du Mediator, l'hypertension artérielle pulmonaire (HTAP), ni les décès non précédés d'une hospitalisation pour valvulopathies.

Les chiffres, ajoutent les auteurs, sont probablement sous-estimés, principalement parce que les atteintes des valves cardiaques touchant des patients ayant consommé moins de 30 boîtes de Mediator (correspondant à une année et demie d'utilisation) ne sont pas prises en compte, faute de données disponibles.

Ainsi, près de la moitié des boîtes vendues en France ont été considérées comme dépourvues de risque, "alors qu'une exposition relativement courte pourrait causer la maladie des valves, comme le suggèrent des études sur les autres dérivés de fenfluramine", notent-ils.

L'étude avance une fourchette de 1.050 à 1.700 décès. Mais leur nombre pourrait aller au delà de cette estimation, ajoute M. Zureik.

BC/ot/fa/fm

Rédigé par Par Brigitte CASTELNAU le Jeudi 9 Février 2012 à 05:19 | Lu 297 fois