Le Haut conseil de Polynésie encore bousculé en justice


«Ce qui est sanctionné, c’est la décision du législateur polynésien d’aller à l’encontre du législateur national, d’aller contre la loi organique qui a supprimé le Haut conseil de Polynésie» a déclaré Me Philippe Neuffer, défendant la position d'Oscar Temaru ce mardi matin au tribunal administratif.
PAPEETE, le 8 avril 2014. Un nouvel épisode judiciaire pour le Haut conseil de Polynésie ce mardi devant le tribunal administratif, et on pressent déjà que ce ne sera pas le dernier, après la décision du 19 février 2014 du Conseil d’Etat déclarant illégale la Loi du Pays l’instituant. Ce mardi, le tribunal administratif de Polynésie examinait les recours déposés par le représentant à l’assemblée, Oscar Temaru. La figure de proue des indépendantistes demandait que soient annulés la délibération du 11 juillet 2013 créant ce Haut conseil et l’arrêté ministériel d’août 2013 nommant Stéphane Diemert comme président de cette «autorité consultative indépendante».
Après avoir argumenté «d’un point de vue juridique» seulement les tenants et les aboutissants de cet épineux dossier politique, le rapporteur public a demandé d’annuler la délibération de l’assemblée de la Polynésie française créant le Haut conseil, en se référant à la décision rendue à ce sujet par le Conseil d’Etat en février dernier. En revanche, il demande au tribunal de rejeter la requête d’Oscar Temaru au sujet de la nomination de Stéphane Diemert, la déclarant irrecevable. Cette nomination ne fait aucun grief à Oscar Temaru ni en tant que maire de Faa’a, ni comme représentant de l’assemblée de Polynésie, ni comme chef de parti. La décision du tribunal administratif a été mise en délibéré et sera rendue dans quelques semaines.

Ce nouvel épisode judiciaire de la saga du Haut conseil de Polynésie intervient, alors que la semaine dernière, ont été publiés au Journal officiel du vendredi 4 avril, deux nouveaux arrêtés. L’un pour prendre en compte les dispositions d’une nouvelle délibération adoptée le 14 mars par l’assemblée de Polynésie créant le Haut conseil ; le second pour nommer de nouveau (pour la 2e fois en 7 mois) Stéphane Diemert comme président du Haut conseil pour six ans ! Dans son exposé, le rapporteur public a souligné que la délibération de juillet 2013 «est entachée d’illégalité» et que le tribunal doit «suivre la voie ouverte par le Conseil d’Etat et le même raisonnement, à savoir l’incompétence de la Polynésie française» a créer des organismes qui relèvent des seules compétences des législateurs. Pour les mêmes raisons, l’arrêté nommant le président du Haut conseil est entaché d’illégalité puisqu’il y a une «incompétence de la Polynésie française à nommer quelqu’un à la tête d’un organisme qu’elle ne peut pas créer».

A la sortie de l’audience, Me Philippe Neuffer défendant les intérêts d’Oscar Temaru a souligné l’incongruité du tribunal administratif à statuer sur la délibération de juillet 2013, dès lors qu’une nouvelle délibération a été adoptée par l’assemblée de Polynésie le 14 mars dernier. Il dénonçait ainsi un «mille-feuilles immangeable». Dans cet acharnement du gouvernement à créer ce Haut conseil coûte que coûte, accumulant Loi du Pays, délibérations et arrêtés successifs on se demande quel en sera le sort final. Car, ce Haut conseil censé donner des conseils juridiques au gouvernement sur ses textes législatifs n’a pas réussi à se sauvegarder lui-même des contentieux et des recours. Il apparait clairement que la nouvelle délibération du 14 mars 2014 sera attaquée également sur sa légalité, d’autant qu’elle n’abroge pas tous les articles de celle de juillet 2013. En cas d’échec, la survie du Haut conseil en tant qu’autorité indépendante semble largement compromise.

Rédigé par Mireille Loubet le Mardi 8 Avril 2014 à 14:41 | Lu 1859 fois