Le Fare Tama Toto devra encore attendre


Tahiti, le 10 juillet 2024 – Ce mardi, le tribunal administratif a rejeté les demandes du Fare Tama Toto visant d'une part à annuler l'arrêté ministériel l'empêchant d'installer ses 24 postes de dialyse, et d'autre part, à condamner le “duopole” existant entre Apair-Apurad et Isis Polynésie. En cause, des carences administratives et fonctionnelles évidentes du nouveau venu dans le secteur de la dialyse.
 
L'affaire court depuis un an. Le marché de la dialyse se trouve être le théâtre d'une bataille juridique et financière saillante entre ces acteurs historiques, d’un côté, l'association Apair-Apurad et la société Isis, et et de l’autre le nouveau venu, la SARL Fare Tama Toto. Pour rappel, en juillet dernier déjà, le juge des référés avait débouté le Fare Tama Toto dans sa demande d'enjoindre Apair-Apurad et Isis de signer une convention permettant à ce dernier d'obtenir l'agrément de l'Agence de régulation de l'action sanitaire et sociale (Arass). Une décision justifiée à l'époque par un manque de préparation et de concertation en amont entre le Fare Tama Toto et les structures existantes. En effet, le nouveau venu, dépourvu de numéro Kbis au mois de juillet 2023, ne pouvait bénéficier d’une quelconque jurisprudence sans être immatriculé. Et si ce dernier a effectivement obtenu l'accord de coopération du CHPF, il n'a pas obtenu celui des autres acteurs du marché, pourtant indispensable à l'exercice de son activité. Déçue mais pas résignée, la SARL Fare Tama Toto s'est ainsi tournée vers la justice administrative pour obtenir gain de cause.
 
La requérante a donc demandé au tribunal administratif l'annulation pure et simple de l'arrêté ministériel visant à empêcher l'installation de ses 24 postes permettant l'activité de soins de traitement de l'insuffisance rénale chronique qu'elle souhaite mettre en place. De plus, elle demande à l’instance d'enjoindre au président de la Polynésie française de se prononcer à nouveau sur sa demande d'autorisation. En effet, selon la SARL Fare Tama Toto, “l'acte a été pris par une autorité incompétente dès lors que l'autorité compétente pour prendre des arrêtés relatifs aux autorisations portant sur le traitement de l'insuffisance rénale est incontestablement le président de la Polynésie française et non le ministre de la Santé”. La requérante en a également profité pour dénoncer la position dominante d'Apair-Apurad et d'Isis, empêchant de facto la SARL de candidater efficacement à un accord de coopération, et a demandé l'annulation de l'installation des 16 postes accordés à Isis et des trois postes accordés à Apair-Apurad.
 
L'ensemble des requêtes rejetées
 
Ce mardi, le tribunal administratif a rendu sa décision et le moins que l'on puisse dire c'est qu'il a tranché, rejetant l'ensemble des requêtes émises par la SARL Fare Tama Toto. En effet, le tribunal considère, pour commencer, que le ministre de la Santé était tout à fait dans son droit de ne pas autoriser l'installation des 24 postes. Il disposait en effet d’une délégation de pouvoir du président du Pays suite à un arrêté du 15 mai 2023.
 
De ce fait, le tribunal administratif a rappelé les motivations du ministre de la Santé quant à sa décision de s'opposer à la demande d'autorisation formulée par le Fare Tama Toto, fondées sur l'absence de convention de coopération signée avec l'ensemble des structures sanitaires organisant la prise en charge des patients dialysés, ainsi que sur le manque de garanties de la continuité et de la globalité de la prise en charge adaptée de ces patients. En effet, l'article 1 et 2 de l'arrêté n°194 du conseil des ministres datant du 4 février 2009 est on ne peut plus clair : “L'activité de traitement de l'insuffisance rénale chronique par la pratique de l'épuration extrarénale est exercées selon les quatre modalités suivantes : l'Hémodialyse en centre, l'hémodialyse en unité de dialyse médicalisée, l'hémodialyse en unité d'auto-dialyse simple ou assistée et la dialyse à domicile par hémodialyse ou dialyse péritonéale. […] Lorsque la structure sanitaire ne propose pas toutes les modalités de traitement, l'autorisation ne peut être délivrée que si elle a conclu des conventions de coopération avec une ou plusieurs structures sanitaires organisant la prise en charge des patients.” Et c'est là que le bât blesse, car si la société requérante a effectivement produit une convention de coopération signée le 6 juillet 2023 avec le CHPF, pour la seule prise en charge de la modalité “hémodialyse en centre”, le Fare Tama Toto n'a cependant pas présenté de dossier de convention de coopération signé avec une autre structure de santé proposant la modalité “dialyse à domicile”. Et pour cause, l'association Apair-Apurad affirme avoir refusé de signer la convention envisagée “au motif notamment qu'elle n'a pas à se substituer à la carence volontaire de la SARL Fare Tama Toto” qui refuse selon elle d'assurer l'activité de dialyse péritonéale (à domicile), réputée “non rentable”.

le Mercredi 10 Juillet 2024 à 18:28 | Lu 1920 fois