Le Centre islamique de Tahiti se replie en privé


Les locaux du 11 rue Gauguin sont actuellement proposés à la location. Le Centre islamique de Tahiti ne loue plus de local à bail commercial.
PAPEETE, le 17 novembre 2014. En une année d'existence, depuis octobre 2013, le Centre islamique de Tahiti a été la cible de multiples critiques et de deux manifestations d'opposants dans les rues de Papeete. Désormais, l'association poursuit son activité de rassemblement des musulmans "qui le souhaitent", sans être exposée en pleine lumière.

Le 14 octobre 2013, le CIT (centre islamique de Tahiti) ouvrait grand ses portes au 11 rue Gauguin en plein cœur de Papeete. La "mosquée" de Tahiti, en l'occurrence une salle de prières, était inaugurée par le président de l'association Centre islamique de Tahiti, Hicham Barkani, arrivé quelques semaines plus tôt de métropole. La levée de boucliers a été immédiate : deux jours plus tard, la mairie signifiait à l'association une interdiction de rassemblement dans ses locaux de la rue Gauguin en mettant en avant la réglementation qui s'impose à tout lieu recevant du public. Le 9 novembre, une manifestation "anti-mosquée" rassemblait quelques centaines de personnes.

Après quelques mois de silence, le CIT revient sur le devant de la scène médiatique avec le retour à Tahiti de son président à la fin du mois de juin dernier. De nouveau, les locaux de la rue Gauguin se retrouvent au centre d'une polémique car les activités de l'association n'ont pas cessé sur place depuis le mois d'octobre 2013, faute d'une injonction claire à ce sujet. Cette fois, la municipalité de Papeete fait notifier officiellement le 10 juillet dernier, l'ordre de fermeture des locaux. Avant cette décision, une commission de sécurité était venue constater sur place la non-conformité des locaux à recevoir du public en dépit de la centaine de m2 du plateau commercial loué. Trois jours plus tard, une deuxième manifestation anti-mosquée dépasse cette fois, à la veille du 14 juillet, le millier de participants dans les rues de Papeete.

Faute de pouvoir mener ses activités au grand jour et avec pignon sur rue sans être la cible de vives polémiques, le CIT a donc fini par rompre le bail commercial de la rue Gauguin. "On a toujours notre siège d'association mais pas dans les mêmes locaux. On a pris un logement, avec un bail d'habitation" indique le porte-parole de l'association. Le CIT est donc aujourd'hui moins visible, moins exposé aussi. "L'association a pour but de rassembler, nous sommes là pour la dignité de ceux qui pratiquent ce culte. La visibilité a conduit à ce que des pratiquants de ce culte soient montrés du doigt, ils se sont fait huer. Nous ne sommes pas là pour faire du bazar ".

Jouant la carte de l'apaisement et du repli sur soi, le Centre islamique de Tahiti fait donc le dos rond "pour laisser passer la tempête". Au point que personne de l'association ne participera, ce mardi, au procès de ceux qui ont déposé des têtes de porc, au seuil du CIT à la fin du mois de juin dernier. "Il y avait eu un dépôt de plainte initial contre ce que l'on estime être un acte isolé, puis c'est le procureur qui a suivi cette affaire au regard de la loi républicaine. Nous ne serons pas là car nous ne demandons rien en compensation" poursuit le porte-parole.
Loin des polémiques médiatiques, l'association poursuit sa levée de fonds en vue de la création d'un site dont elle serait propriétaire. Pas question en tout cas de jeter de l'huile sur le feu : le dossier pénal ne regarde que la justice. Les deux frères impliqués dans ce dossier, qui sont poursuivis pour "provocation à la haine ou à la violence en raison de l'origine, l'ethnie, la nation, la race ou la religion" risquent jusqu'à un an de prison et/ou 5,3 millions de Fcfp d'amende.

Rédigé par Mireille Loubet le Lundi 17 Novembre 2014 à 16:47 | Lu 8389 fois