Laurent et Meherio, sains et saufs, racontent leurs sept jours de dérive


Laurent (à gauche) et Meherio (à droite), qui porte le dernier-né de Laurent.
MATAIEA, le 14 novembre 2016. Laurent et Meherio ont été retrouvés sains et saufs ce lundi après-midi par un pêcheur de Paea. Ils étaient portés disparus depuis mardi dernier. Entourés de leur famille et visiblement en bonne forme, ils ont raconté leur mésaventure. Partis avec 10 litres d'eau et des vivres, ils ont pu pêcher pour se nourrir et ont installé une voile sur leur poti marara pour naviguer avec le maramu.

"Ils sont là en forme ! Ils n'ont pas maigri", souligne Robert Para avec soulagement. Le papa est soulagé de retrouver ses enfants Laurent et Meherio, qui étaient portés disparus depuis mardi dernier. Ils ont été retrouvés lundi après-midi par un pêcheur de Paea, connu sous le nom de "Barbu".

Le pêcheur les a aperçus à seulement 15 nautiques de Papara vers 14 h 30 ce lundi après-midi. Il a alors remorqué le bateau jusqu'à Papara où Laurent et Meherio ont pu retrouver les membres de leur famille.

Dans la salle d'attente du cabinet du médecin, qui les a examinés ce lundi pour savoir s'ils devaient être placés sous observation, le frère et la sœur, en apparente bonne forme, ont raconté leur mésaventure avec beaucoup de simplicité et d'énergie.

Laurent et Meherio sont partis mardi 8 novembre au matin de Huahine. Ils étaient attendus en milieu de journée à Maiao. Mais le compas de leur bateau avait un "défaut de 10 degrés". Difficile dans ces conditions de trouver la direction de Maiao. Alors qu'ils auraient dû arriver en milieu de journée, Laurent sent au bout de plusieurs heures qu'ils sont sur la mauvaise route. Il décide alors de couper le moteur et de laisser l'embarcation dériver. Il souhaite garder du carburant au cas où ils passeraient à proximité d'une île.

Alors que Laurent coupe le moteur, l'alerte auprès du JRCC est donnée vers 20 heures. Une première de nuit de recherches commence avec le Gardian et le Dauphin. Pour la famille de Laurent, une première de nuit d'inquiétudes débute.

10 LITRES D'EAU A BORD
A bord de leur bateau, Laurent et Meherio ont 10 litres d'eau et des vivres. Equipés, ils pourront aussi pêcher. Mercredi, après un jour de dérive, ils prennent une bâche et s'en font une voile. Des cannes à pêche font office de mât. L'embase du moteur fait office de gouvernail, raconte Laurent, qui compte sur le maramu pour retrouver son île. Vendredi, le frère et la sœur aperçoivent le mont Orohena. Ah y est Tahiti est en vue ! Malheureusement, leur réservoir de carburant a été vidé par leur déplacement pour pêcher afin de se nourrir. Au-dessus de leurs têtes, ils voient les appareils des autorités mais ceux-ci ne les repèrent pas.

Dimanche matin, les recherches sont officiellement arrêtées par les autorités. Le centre de coordination de sauvetage aéro-maritime (JRCC) assure avoir organisé, entre mercredi et samedi, le passage au "peigne fin" d’une zone maritime d’environ 70 000 km2, scrutés pendant quatre jours depuis le ciel dans des conditions météorologiques idéales, par beau temps et mer calme, avec l’appui de moyens radars performants. Les 55 heures de recherches aériennes n’ont rien donné.

La famille, elle, garde encore l'espoir de les retrouver. "On garde l’espoir. On a la foi", soulignait hier matin, Robert Para, le papa. Depuis lundi matin, les proches des disparus continuaient les recherches en finançant sur fonds propres la poursuite de recherches aéroportées, avec le secours d’un avion privé et de pilotes bénévoles. Deux thoniers et plusieurs poti marara ont également participé à ces recherches vers Tikehau, au Tuamotu où ils étaient supposé avoir dérivé. Un appel aux dons avait été lancé pour participer à l’approvisionnement en carburants des moyens nautiques et à la location de l'avion.

Une célébration religieuse a été organisée hier soir à Mataiea pour fêter leur retour.

Robert Para, papa de Laurent et Meherio : "Je n'y croyais pas"

Comment avez-vous appris que vos enfants avaient été retrouvés ?
"On était tous chez moi à Mataiea avec mes deux filles, ma belle-fille et mes trois petits enfants. On était en train de jeûner depuis ce lundi matin 6 heures, avec la prière.
Vers 14 heures, je faisais une petite sieste et le téléphone a sonné. Soi-disant c'était ma fille. Mais je ne le croyais pas. Ca a coupé. J'ai rappelé le numéro et j'ai entendu sa voix. Là, je l'ai reconnue : c'était bien elle ! "Papa je vais rentrer bientôt dans la passe. Viens me chercher à Papara".
Je ne voulais pas donner des informations avant de l'avoir vue de mes yeux. Je ne voulais pas me tromper.
Les larmes sont tombées toutes seules. Des larmes qu'on avait gardées depuis mardi dernier jusqu'à aujourd'hui. Je ne veux pas oublier le Seigneur, il a été avec nous, avec les enfants. (…) Dimanche, encore, on était en discussion avec tous les amis de la marina de Mataiea et les tavana pour concentrer toutes nos forces pour les retrouver et faire des quêtes d'argent pour payer les avions. Ce qu'on a fait ce n'est pas pour nous, c'est pour eux."


Rédigé par JPV avec MT le Lundi 14 Novembre 2016 à 17:35 | Lu 21456 fois