Laureline Raynaud, tisseuse d'e-liens


TAHITI, le 10 août 2022 - Elle a fondé E’lien, une plateforme qui met en relation les producteurs et les consommateurs du territoire. Laureline Raynaud, engagée pour la cause environnementale, veut faire changer les choses. Elle aspire à une consommation qui respecte l’homme et son milieu.

Aujourd’hui une trentaine de partenaires travaillent avec Laureline Raynaud et sa plateforme E’lien. Ce groupe s’étoffe régulièrement pour offrir au consommateur un panel toujours plus riche de produits, voire de services, disponibles sur le territoire. “Je veux ce qu’il y a de meilleur et de durable”, résume Laureline Raynaud. Avec son initiative, elle espère faire évoluer les habitudes. La consommation durable et responsable n’est plus un choix. C’est “la seule vers laquelle nous devrions aller, pour notre santé et celle de la planète, mais aussi pour notre économie ou notre cadre de vie…

Un site sobre et fonctionnel


L’idée de la plateforme E’lien, est “de mettre en lumière toutes les initiatives locales qui nous permettent de mieux consommer, de mieux vivre dans le respect de l’environnement et des hommes”. C’est aussi de rendre la consommation durable plus aisée. Un habitant de la Presqu’île qui repère un joli cadeau à offrir chez un créateur du centre-ville ne fait pas toujours le déplacement. Un résident de Punaauia qui raffole d’un miel vendu à Faaone ne s’astreint pas à une visite régulière chez son apiculteur favori pour faire le plein.


Concrètement sur le site se trouve un panel de producteurs de fruits, de légumes, d’épices, huiles, vinaigre… mais aussi de produits de soins. Les internautes prennent connaissance de l’offre, choisissent, commandes puis ils sont livrés dans les jours qui suivent.

Le site est éco-conçu. Laureline Raynaud rappelle qu'en juin 2020, le web mondial ne comptait pas moins de 1,78 milliard de sites web, et ce n’est pas sans conséquences. En effet, 10% des émissions de gaz à effet de serre peuvent être imputé au monde d’internet. “Nous ne pouvions donc pas décemment envisager de développer E’lien et ses valeurs qui nous sont chères sans prendre en compte cette problématique. Le principe de sobriété s’est imposé, en toute logique.” Le choix d’une technologie simple qui répond aux besoins sans fioriture a été privilégié. Hébergement, design, fonctionnalités, médias, rien n’a été laissé au hasard. E’lien est léger et sur fond noir pour réduire les datas et donc le stockage de données, il ne contient aucune vidéo, ne laisse pas s’échapper de pop-up. Une première opération test a eu lieu fin mars 2021 et s’est poursuivie au mois d’août.

Comprendre le monde

Laureline Raynaud a 40 ans cette année. Elle est née dans le sud de la France, a vécu sept années à la Réunion avant de s’installer en Polynésie. Ses parents avaient envie “de découvrir autre chose”. Elle est arrivée à Tahiti en 1991, elle avait à peine 10 ans. Elle a suivi toute sa scolarité sur l’île.

Petite, elle voulait être archéologue. “J’ai d’ailleurs fait un stage au Musée de Tahiti et des îles en 4e”, se rappelle-t-elle. Elle était fascinée par “les secrets des temps anciens”, par “tout ce qui avait déjà pu se passer”. Finalement, elle ne s’est pas engagée dans cette voix. Elle a opté pour la philosophie car elle voulait “comprendre le monde”. C’est à Nice en métropole qu’elle a suivi ce cursus universitaire. Elle a terminé par une maîtrise en philosophie et un Diplôme d’études approfondies (DEA) de communication avec mention anthropologie de la communication. Elle a effectué son mémoire de DEA sur l’identité polynésienne, s’intéressant au lien entre culture et identité. Elle a, un temps, envisagé une thèse en anthropologie mais n’a jamais pu trouver un thème qui lui convenait parfaitement.

Agir pour l’environnement


En 2017, Laureline Raynaud a suivi une formation d’éco-sentinelle proposée par la Fédération des associations de protection de l’environnement, la Fape, Te Ora Nao. Peu après, elle a imaginé les ateliers Mon fare durable. “Ma conscience écologique à l’époque était en cours de positionnement, je suis passé dans le concret cette année-là.” Avant cela, elle se disait “écolo”, mais pas “engagée”.

Portés par la Fape où elle était devenue chargée de projet, les ateliers Mon fare durable ont consisté en des animations dans les quartiers pour éveiller les consciences. Il était question de mobilité, de déchets, d’alimentation. “On expliquait à quel point notre société de consommation est inadaptée à notre santé et à notre environnement.” Au total, elle a touché près de 200 familles qui ont pu apprendre par exemple à faire des cosmétiques, des produits ménagers.

Par ailleurs, Laureline Raynaud a organisé le Festival zéro déchet pour Pirae à l’occasion de l’inauguration du premier composteur de la commune. Elle a fondé l’association de protection de l’environnement, Uni’terre Tamarii no te ao nei, elle a imaginé l’initiative Mon lagon et moi. Et puis, le Covid est arrivé, bouleversant son quotidien, comme celui de tant d’autres personnes. “Cela a été comme un petit séisme”, décrit-elle. Ce séisme lui a fait prendre de la distance vis-à-vis de certaines choses, “et ça a donné de l’espoir sur la possibilité de construire le monde différemment…” Cela a été une période charnière pour Laureline Raynaud.

Dans son quotidien, et depuis longtemps, Laureline Raynaud a des habitudes de vie durable. Elle cherche à présent à encourager d’autres à en faire autant, à aider ceux qui souhaitent le faire mais sont freinés dans leur quotidien “soit parce qu’ils ne connaissent pas toute l’offre disponible sur le territoire, les gens ne se rendent vraiment pas compte de tout ce qu’il y a ! Soit parce que l’offre est trop éloignée de chez eux”. E’lien est né dans ce contexte là. L’idée était là depuis un moment, elle germait, elle a éclos.

Bien sûr, Laureline Raynaud aimerait faire plus, sans doute plus vite. Elle avance avec ses moyens. “Je ne suis pas en mesure d’inventer quelque chose d’incroyable”, elle sait qu’elle ne pourrait rien révolutionner. En revanche, elle est convaincue de l’importance d’agir même avec des petits gestes.

Pratique

Site : https://elien.pf/
Il suffit de sélectionner ses produits sur le site internet, directement en ligne. Les commandes sont ensuite livrées plusieurs fois par semaine.

Rédigé par Delphine Barrais le Mercredi 10 Aout 2022 à 19:36 | Lu 2259 fois