La station de sondage de Météo France Faa'a sera entièrement automatisée


Sébastien Hugony, responsable communication de Météo France, avec un ballon-sonde de Météo France. Il présentait cette administration au public de la Fête de la Science en octobre dernier.
PAPEETE, le 16 novembre 2017 - Météo France a décidé d'investir dans une toute nouvelle technologie permettant de lancer automatiquement ses ballons-sondes météorologiques. C'est la station de Faa'a qui sera équipée, courant 2018. Le but est de faire des économies de personnel, mais surtout de pouvoir utiliser de l'hydrogène au lieu de l'hélium pour faire flotter ces ballons.

Les habitants de Faa'a qui aiment regarder le ciel voient parfois passer de grands ballons blancs s'élevant dans le ciel. Il s'agit des ballons-sondes de Météo France, qui sont expédiés deux fois par jour, tous les jours de l'année, depuis la station météo située dans la commune.

Ces ballons ne sont pas destinés à alimenter les théories sur la présence d'extra-terrestres dans nos îles. Ils sont d'une importance cruciale pour alimenter les modèles informatique et prédire le temps dans les jours, ou même les mois à venir. Et dès l'année prochaine, c'est un robot qui se chargera de les lancer tous les jours.

Pour l'instant, la station emploie 6 techniciens pour effectuer deux lancers de ballon-sonde chaque jour. Le premier a lieu en milieu de journée, à 14h heure de Tahiti pour correspondre à minuit en heure universelle de Greenwich (GMT) afin de se synchroniser avec l'ensemble des stations météos du monde. Logiquement, le deuxième lancer a lieu au milieu de la nuit, à 2h du matin (midi GMT). Ces ballons sont bardés de capteurs qui permettent aux météorologues de connaitre la température, pression, force et direction de vent, l'humidité, etc, sur plusieurs kilomètres de hauteur.

Une photo de la station Robotsonde. C'est une technologie française.
Si les données restent cruciales pour tous les services météos du monde (les ballons-sondes sont rares dans le Pacifique), la méthode de lancement encore très manuelle va prendre un sacré coup de jeune en 2018. Les six techniciens assurant l'opération 24h/24 de la station seront remplacés par une station-météo robotisée qui se chargera toute seule de gonfler les ballons et de les catapulter dans l'atmosphère. Plus aucun technicien ne sera sur place, et tout sera piloté à distance ! C'est Sébastien Hugony, responsable communication de Météo France, qui a annoncé publiquement la nouvelle lors d'une présentation dédiée lors de la Fête de la Science en octobre dernier.

Le robotsonde et ses ballons à l'hydrogène

Il a expliqué à la petite assistance comment des expériences avec des stations de lancement automatiques avaient déjà eu lieu à travers la France et les Outremers. Des stations robotisées fonctionnent déjà en Nouvelle-Calédonie, en Guadeloupe ou en Guyane, et elles ont démontré des performances similaires entre le robot et les techniciens humains. En plus c'est une technologie française, le Robotsonde de MeteoModem, qui est utilisée.

Le robot présente divers avantages sur les humains : il travaille de jour comme de nuit, coûte beaucoup moins cher en main d'œuvre… et surtout permet de remplir les fameux ballons d'hydrogène au lieu de les gonfler à l'hélium.

Un chimiste comprend aussitôt l'intérêt du robot rien qu'avec cette dernière information. Si l'hélium et l'hydrogène fonctionnent aussi bien l'un que l'autre pour faire flotter des ballons, ils sont chimiquement très différents. L'hélium est un gaz très rare, très cher, non renouvelable (il n'est produit sur Terre que par la décomposition radioactive naturelle d'éléments lourds, c'est pour dire). Mais l'Hélium a l'intérêt primordial d'être complètement inerte. Chaque bonbonne coûte des millions de francs, mais au moins il n'y a aucun risque d'explosions qui mettrait la vie des techniciens météos en danger.

Avec l'hydrogène, c'est exactement l'inverse. Ce gaz est extrêmement commun sur Terre, est presque gratuit à fabriquer (il suffit de faire passer un courant électrique dans de l'eau distillée pour obtenir de l'hydrogène et de l'oxygène)… Mais il est extrêmement explosif. Pour comprendre le danger qu'il y a à gonfler un ballon à l'hydrogène, cherchez les photos du zeppelin Hindenburg sur internet ou dans un dictionnaire. Effrayant. Sauf que le robot, plus inconscient que courageux, n'a pas peur du passif tragique des ballons à hydrogène. Il produit lui-même son gaz juste avant un lancer, remplit ses ballons et les catapulte dans les airs sans la moindre intervention humaine. La seule intervention nécessaire est une visite d'un seul technicien tous les trois jours, pour remettre des ballons dans le carrousel de lancement et étalonner correctement toutes les sondes.

Pour l'instant, entre l'hélium et les heures de nuit, chaque lancer de sonde coûte 40 000 Fcfp à Météo France. Et l'administration en lance deux par jour depuis Faa'a… Le calcul a vite été fait. Mais rassurez-vous, tous les techniciens concernés sont des fonctionnaires et seront recasés dans l'administration de Météo France.

Il y a trois autres petites stations météo en Polynésie, aux Tuamotu, aux Marquises et à Rapa, qui n'effectuent qu'un seul lancer par jour. Certains marins ont également été formés pour effectuer des sondages. Aucune de ces structures n'est concernée par l'automatisation.



Qu'arrive-t-il aux ballons-sondes après la fin de leur mission ?

La sonde attachée au ballon est en polystyrène biodégradable car elle atterrira dans l'océan. Le ballon lui-même et même la pile qui alimente le circuit électronique sont également biodégradables.
Après avoir été lancé, le ballon-sonde reste en contact avec les météorologues par onde radio jusqu'à avoir rempli sa mission. Mais il est à usage unique, et ne revolera jamais. Quand il flotte au-dessus d'un continent, il peut être récupéré pour être envoyé au recyclage, mais dans nos îles c'est impossible car ils atterrissent à des dizaines voire centaines de kilomètres au large.

A la place, Météo France envoie des ballons qui sont entièrement bio-dégradable. Le ballon se dissout dans l'eau, il est alimentée par une pile à l'eau qui ne contient aucun produit toxique, et la sonde elle-même est en polystyrène biodégradable. La seule chose qui coulera au fond de l'océan est le petit circuit imprimé en cuivre de la sonde.

Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Jeudi 16 Novembre 2017 à 14:32 | Lu 1660 fois