La réforme sportive voulue par le Pays boxe dans le vide au Cesec


Le projet de loi du Pays visant à remanier les dispositifs encadrant les associations et fédérations sportives n'a engagé qu'un enthousiasme limité au Cesec ce mardi. Les membres du conseil se sont contentés de voté pour une série de recommandations, sans pour autant donner un avis tranché. Crédit photo : Thibault Segalard.
Tahiti, le 17 septembre 2024 - Le Cesec s’est penché, ce mardi, sur un projet de loi censé réformer le paysage et les finances sportives polynésiennes. Avec un dossier aussi épais qu’un manuel de stratégie pour match nul, le Pays tente d’y redéfinir les règles du jeu pour les associations et fédérations sportives. Mais malgré de grandes ambitions affichées, les sempiternelles brouilles liées aux doubles fédérations ont encore de beaux jours devant elles.
 
Le dossier du projet de loi trônait fièrement sur chaque bureau des membres du Conseil économique, social, environnemental et culturel (Cesec) ce mardi matin. Un dossier épais, c’est vrai. Mais comme l’a souligné avec une pointe de désillusion Louis Provost, le président du Comité olympique de Polynésie française (COPF), “il ne va pas au fond des choses” et n’aborde pas de front le vrai problème : celui des doubles fédérations sportives. En clair, si ce projet de loi redéfinit les conditions d’accès aux délégations de service public (DSP) octroyées par le Pays aux associations et fédérations sportives, il n'interdit en rien l’existence des doubles fédérations sportives.
 
Ce mardi matin, en séance plénière, les membres du Cesec, flanqués de plusieurs dirigeants d’associations sportives, sont restés... de marbre. Le projet de loi du Pays, ambitieux sur le papier, entendait pourtant réformer les dispositifs encadrant ces fédérations en introduisant de nouvelles obligations de collecte et de diffusion des données, en précisant les devoirs des fédérations détentrices d’une DSP, et en créant une nouvelle instance : la Conférence polynésienne du sport. Cette dernière est censée clarifier les compétences du COPF et améliorer l’efficacité des fédérations ainsi que la gestion des DSP, qui ont déjà fait couler beaucoup d’encre. On se souvient encore du bras de fer entre la Polynesian Boxing Association de Tauhiti Nena et la Fédération de boxe de Polynésie d’Ismaël Tahiata. Un combat acharné, réglé au tribunal administratif, où Nena a remporté une victoire difficile. La guerre, toutefois, est loin d’être terminée, avec une nouvelle bataille qui s’annonce pour l’année prochaine.
 
Tel est l'avis... du Cesec
 
“On n’a pas voulu pencher d’un côté ou de l’autre”, a sobrement commenté Louis Provost à l’issue de la séance, interrogé par Tahiti Infos. Les membres du Cesec ont voté une série de recommandations à transmettre au gouvernement, mais sans prendre clairement position pour ou contre le projet de loi. Certes, ce dernier contient quelques idées intéressantes, mais il ne donne pas le grand coup de pied dans la fourmilière tant attendu par de nombreuses associations sportives. Heirangi Nouveau, le président de la fédération polynésienne de kayak-surfski, s'est, lui, autorisé à rêver de voir les délais d'instructions des subventions se réduire. “On veut croire que cette nouvelle méthode de subventions pluriannuelle règle ce problème. Car les délais mettent en péril les compétitions se déroulant en début d'année.”
 
Parmi les recommandations, on retrouve “la création d’un nouveau schéma directeur du sport axé sur les infrastructures”, ainsi qu’un soutien renforcé aux conseillers techniques fédéraux, ces petites mains souvent invisibles, mais cruciales pour le développement des jeunes talents. Pourtant, le sujet brûlant des doubles fédérations n’est, lui, que peu ciblé.
 
Une DSP à critères
 
Aucune ligne dans le texte n’interdit en effet la création de nouvelles fédérations. Comme l’ont précisé les rapporteurs, celles qui seront nouvellement créées pourront candidater à une DSP après quatre ans d’existence, sous réserve également de remplir certains critères, comme un nombre minimum de licenciés. Le problème ? Le statut d’autonomie de la Polynésie et ses particularités juridiques se heurtent aux réalités nationales et internationales. “Ça ne règle en rien le problème des doubles fédérations, alors que c’était censé être au cœur même de cette réforme”, déplore Louis Provost. “On ne pourra rien interdire, quoi qu’on dise… Et ça reste à améliorer. Il faut trouver la bonne solution, parce que ça risque de nous poser de gros soucis en 2027, lors des Jeux du Pacifique à Tahiti.”
 
Le gouvernement a donc du pain sur la planche, et les nombreuses recommandations du Cesec devront être soigneusement étudiées pour peaufiner ce projet de loi avant sa présentation devant l’assemblée territoriale. Quant au fameux pavé dans la mare tant attendu, il semble pour l’instant remis à plus tard.
 

Rédigé par Thibault Segalard le Mardi 17 Septembre 2024 à 16:03 | Lu 1400 fois