La justice enquête sur du paka en "vente libre" sur Facebook


Certains messages explicites s'apparentent à des petites annonces.
PAPEETE, le 23 mars 2017 - Le parquet de Papeete a ouvert une enquête il y a plusieurs mois visant des groupes Facebook locaux dédiés au pakalolo et dont les utilisateurs, tarifs et photos à l'appui, proposaient pour certains leurs produits à la vente en mode public, et livraison comprise aux quatre coins de Tahiti.


On trouve de tout sur internet. Et sur Facebook. Même… du pakalolo en vente libre. A tel point que selon nos informations, la justice a décidé de s'emparer du sujet. C'est sur la base d'une dénonciation que le parquet de Papeete a en effet décidé, il y a plusieurs mois déjà, d'ouvrir une enquête au long cours, confiée aux enquêteurs de la brigade de recherches de la gendarmerie, afin de tenter de découvrir l'identité des administrateurs d'un certain nombre de groupes Facebook locaux dédiés au pakalolo.

Si se regrouper en communauté pour parler du sujet n'est pas interdit, en faire la promotion et en faciliter l'accès et l'usage l'est. Or c'est ce qui semble ici avoir provoqué l'action judiciaire. Alors que la plupart des groupes Facebook traitant du sujet sont administrés, on comprend pourquoi, en mode "fermé", c'est un groupe administré de façon assez surprenante en mode "public" qui a servi de point de départ du travail des enquêteurs.

Vitrine ou réalité ?

Sur cette page, dont nous avons pu nous procurer quelques captures d'écran qui ont intéressé la justice, les choses sont claires. Un véritable petit supermarché de la drogue. En vitrine en tout cas, à défaut de pouvoir prouver la réalité des transactions sur le terrain. Les posts des "vendeurs" défilent les uns après les autres photos à l'appui, comme sur un site de petites annonces : "10 000 francs le verre de 12 (sticks) bien servi livrable dans la matinée à PPT", "boîte 7 y a que 1 qui reste à récup sur Papara", "23 000 les 5 box à récupérer sur Papara" ou encore "vend stick 1000 méga et bien servi dispo MP sur Faa'a". Certains vendent mais d'autres passent aussi commande. Les prix s'envolent parfois pour atteindre plusieurs centaines de milliers de francs pour les quantités les plus importantes proposées.

Créé en 2015, ce groupe d'utilisateurs dans le collimateur de la justice semble avoir été ouvert à l'origine, à en lire ses premières publications, pour distiller des conseils plus généraux en matière de culture biologique. Mais il s'est rapidement transformé en vitrine promotionnelle pour vendeurs de pakalolo. L'enquête se poursuit et un certain nombre de ces groupes ont depuis été fermés par leurs administrateurs.

Le règlement et les conditions d'utilisation du célèbre réseau social interdisent "toute tentative d’achat, de vente ou de commercialisation de médicaments sur ordonnances, de cannabis et d’armes à feu de la part de revendeurs non agréés". On peut en revanche trouver des pages appelant à la légalisation du cannabis dans certains pays, Facebook fait la différence entre le soutien à la légalisation et à la promotion de la vente.


Procès de la filière paka : vingt prévenus à la barre

Outumaoro avait été le théâtre d'une importante descente de gendarmerie.
Le tribunal correctionnel s'apprête à juger l'un des plus vastes trafics de pakalolo jamais démantelé au fenua. L'audience se tiendra exceptionnellement sur trois jours, les 11, 12 et 13 avril prochains. Pas moins de vingt prévenus seront appelés à la barre dans ce dossier qui avait mobilisé les enquêteurs de la gendarmerie pendant plus d'un an, entre 2013 et 2014.

Les perquisitions, interpellations et placements en détention provisoire s'étaient enchaînés début 2014 dans cette affaire mettant un terme à un important trafic organisé entre des producteurs de la Presqu'ile et des grossistes de Faa'a.
L'enquête avait rebondi jusqu'à Huahine avec la découverte d'une filière d'approvisionnement à destination de Tahiti. Des fûts contenant parfois jusqu'à 50 kilos de pakalolo étaient ainsi régulièrement acheminés jusqu'à Tahiti en poti marara. Selon les estimations des enquêteurs, ce trafic aurait rapporté plus de 140 millions de francs à ces principaux animateurs.

L'enquête avait connu un coup d'accélérateur fin 2013 avec l'interpellation d'un important grossiste de Faa'a, qui faisait travailler l'essentiel des dealers de la commune. La gendarmerie s'était félicitée de cette opération à l'époque, estimant avoir "porté un coup" sérieux à la filière pakalolo. De l'ice et des armes avaient aussi été découverts chez certains des protagonistes du dossier. Les vingt prévenus sont renvoyés devant le tribunal pour infraction à la législation sur les stupéfiants. Deux sont détenus dans le cadre d'autres affaires. Les 18 autres comparaîtront libres.

Rédigé par Raphaël Pierre le Jeudi 23 Mars 2017 à 05:00 | Lu 13204 fois