La fiscalité communale ce n'est pas pour demain


Le congrès des communes est très attendu par les tavana et les élus municipaux selon Cyril Tetuanui le président du SPC. Le dernier s'était réuni en 2013.
PIRAE, le 13 septembre 2015. Le 26e congrès des communes s'ouvre officiellement ce lundi après-midi en mairie de Pirae. Au programme quatre journées de travail et de réflexion sur la situation des communes polynésiennes. On y parlera compétences sociales et économiques, mode de scrutin des communes associées. Mais aussi de la fiscalité communale dont les travaux avec le Pays ont pris du retard.

En décembre 2014, le président du Pays, Edouard Fritch avait réuni l'ensemble des maires polynésiens pour les associer au contrat de projets 2015-2020 et ouvrir un contrat spécifique Etat/Pays/Communes ce qui n'avait jamais existé auparavant. Une manière appuyée de reconnaître l'existence des ces institutions de proximité et leur travail auprès des populations. Au même moment, l'idée de créer une fiscalité communale propre aux communes était lancée et Edouard Fritch annonçait même qu'elle serait sur les rails dès la fin de l'année afin que tout soit opérationnel en 2016.

Quelques mois plus tard, en avril 2015, le président du Pays réunissait à nouveau les tavana, leurs représentants ou techniciens pour un atelier de travail sur ce thème, un comité de travail était constitué, mais le calendrier devenait beaucoup plus flou. En l'occurrence, les travaux de réflexion sur ce thème sont restés pour l'instant lettre morte. Selon Cyril Tetuanui, le président du Syndicat pour la promotion des communes (SPC), ils ne devraient pas commencer avant le mois d'octobre prochain. Conséquence évidente : il n'y aura toujours pas de fiscalité communale applicable en Polynésie française en 2016.

DES COMMUNES AUX MOYENS LIMITEES

La fiscalité communale existante actuellement en Polynésie française est très embryonnaire comparée à l'arsenal fiscal des municipalités métropolitaines où sont prélevées notamment les taxes foncières sur le bâti et le non bâti, la taxe d'habitation, contribution économique territoriale (ancienne taxe professionnelle) pour ne citer que les quatre plus importantes. Elle est composée des impôts et taxes adossés aux impôts territoriaux et gérés par les services du Pays (centimes additionnels à la contribution des patentes, à l’impôt foncier sur les propriétés bâties et à la contribution des licences et taxe sur la valeur locative sur les locaux professionnels) et des impôts et taxes gérés par les communes en direct (taxe sur l’électricité, taxe de séjour, et taxe sur la publicité).

Cette situation tient avant tout à l'histoire de la Polynésie et à son statut de collectivité autonome. "Le statut particulier de la Collectivité de la Polynésie française a conditionné la répartition des compétences entre elle-même, l'Etat et les communes" expliquait le rapport 2014 de l'Observatoire des communes publié par l'Agence française de développement (AFD). Ainsi à la grande différence des communes de la France métropolitaine et des départements d'outre-mer, "la clause de compétence générale" qui permet aux communes de France et des DOM d'agir "dans tous les domaines de l'action publique dans la mesure où est enjeu un intérêt public local" revient en Polynésie française au Pays.

DES MISSIONS SUPPLEMENTAIRES

Le statut de 2004 a permis de franchir une étape importante dans le processus d’autonomie en reconnaissant une compétence de principe à la Polynésie française et une compétence d’attribution à l’Etat et aux communes. Toutefois dix ans plus tard, une certaine porosité des compétences de chacune des institutions locales est observée. Les municipalités exercent de plus en plus des missions normalement dévolues au Pays. C'est particulièrement vrai notamment pour l'action sociale que les communes ont développé en étant le premier guichet d'accueil des familles en difficulté. D'autant "qu'en période de crise économique ces choses là se précisent. La commune c'est le maillon de proximité de la population. Quand un citoyen a un problème il s'adresse en priorité au maire. Et celui-ci est amené souvent à devoir régler ces problèmes parce qu'il y a urgence et à mettre en place des dispositifs qui vont aider la population à être un peu plus confortable au quotidien" explique Ivana Surdacki, directrice générale adjointe du SPC.

Pour autant le congrès des communes qui se déroule cette semaine ne permettra pas d'aboutir rapidement à un transfert de compétences (et financier) du Pays vers les communes, "le congrès c'est vraiment pour poser les discussions, commencer à travailler. Ce qui est attendu très fortement de la part des communes c'est qu'à l'issue du congrès on ait un calendrier de travail précis avec les techniciens du Pays". Tout l'enjeu de la fiscalité communale à venir est là car pour exercer ces missions sociales qui se sont greffées naturellement dans le giron des municipalités, il va bien falloir trouver des ressources financières nouvelles. Sans compter les investissements à réaliser par les communes d'ici 2024 pour proposer eau potable et réseau d'assainissement à leurs administrés, comme les textes les y obligent.



Comparaison de la structure des recettes de fonctionnement en 2011 des communes polynésiennes par rapport aux communes de France métropolitaine et des DOM. La structure des recettes communales polynésiennes se caractérise avant tout par un faible poids des recettes fiscales et par l'importance des dotations de l'Etat et du Pays via le FIP (fonds intercommunal de péréquation).
Des communes dépendantes


Dans son rapport 2014, l'Observatoire des communes de Polynésie française met en exerce la dépendance des communes au soutien financier et technique de l’Etat et du Pays. Sans subvention de ces deux entités, les communes polynésiennes ne peuvent pas assurer le minimum de leurs compétences. Et pour cause : la fiscalité locale communale est peu développée et les principales ressources financières des communes : la dotation globale de fonctionnement (DGF) versée par l’Etat et le Fonds intercommunal de péréquation (FIP) issu des taxes du Pays, échappent aux décisions des conseils municipaux. Faute de ressources suffisantes, certaines communes ont commencé à recouvrer des taxes communales comme la taxe sur l’électricité –instituée en 2011 dans 38 communes- ou la taxe de séjour, créée en 2011 également dans 14 communes. Mais les ressources de ces taxes locales sont encore très faibles.

Rédigé par Mireille Loubet le Dimanche 13 Septembre 2015 à 21:03 | Lu 1522 fois